Le 20 juillet 2019
Alain Raoust entremêle habilement poésie et politique, pour nous interroger sur la marche du monde.
- Réalisateur : Alain Raoust
- Acteurs : Jacques Bonnaffé, Christine Citti, Yoann Zimmer, Salomé Richard, Estelle Meyer
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Distributeur : Shellac
- Durée : 1h32mn
- Date de sortie : 31 juillet 2019
- Festival : ACID 2019
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Salomé décroche un job d’été dans la déchetterie d’un village. Sous un soleil de western, dans ce lieu hors du monde, son adolescence rebelle la rattrape. De rencontres inattendues en chagrins partagés, surgit la promesse d’une vie nouvelle.
Notre avis : Alain Raoust est un réalisateur rare et discret. Après s’être consacré au cinéma expérimental, il réalise plusieurs courts et moyens métrages, dont le très remarqué La vie sauve, en 1997. En 2002, son premier long métrage La cage dépeint la mélancolie d’une jeune femme qui cherche à retrouver une place dans le monde. Cinq ans plus tard, avec L’été indien, il fait le récit de l’effondrement d’un homme miné par la crainte de l’échec et l’impossibilité d’accéder à un rêve social qu’il avait cru à portée de main. Avec ce troisième film, il poursuit son exploration de destins humains, malencontreusement placés à la périphérie d’une société qui ne tolère guère qu’on lui échappe.
- Copyright Shellac
Le temps d’un été, Salomé revient dans le village de son enfance, pour assurer la surveillance de la déchetterie. Elle y est accueillie par la responsable qui, après l’avoir sensibilisée au respect du travail et au sens des responsabilités, ne tiendra aucune de ses promesses, en particulier celle de lui fournir un logement décent en centre-ville. Salomé se voit donc contrainte de vivre dans ce réduit posé au cœur de ce bout du monde, brûlé par le soleil, aux allures de western méditerranéen. Elle succède à Mathis, son ex-amoureux, dont la mort lors d’une manifestation de Zadistes (il est ici fait référence à la mort de Rémi Fraisse), a mis fin à bien des utopies de jeunesse, mais dont l’ombre continue à planer à travers les objets qu’il y a laissés.
De ce huis clos en plein air, enserré au cœur des montagnes des Alpes de Haute-Provence chères au réalisateur, on ne perçoit tout d’abord que ces trois conteneurs : un bleu, un blanc, un rouge, histoire de bien annoncer la couleur politique. Trois bacs prêts à recevoir tout ce dont les autres ne veulent plus, et qui se font le miroir du sort réservé à ceux qui ne sont pas ou plus conformes à ce que la société attend d’eux, jusqu’à ce que le recyclage du passé laisse échapper la lueur d’une nouvelle forme « d’être ensemble ».
- Copyright Shellac
Le récit se structure autour de sa narration soignée et de l’esthétique de sa mise en scène, mais aussi et surtout grâce à l’entrecroisement de ces personnages gentiment rebelles, animés par une même volonté de s’inventer une vie différente de celle que la société leur propose. Bien calé au centre d’une actualité politique, l’histoire préserve une place de choix à Salomé (Salomé Richard), qui illumine le film et dont la sagesse et la rêverie apportent la juste dose nécessaire de poésie, face à l’énergie exubérante et vulgaire, mais finalement régénératrice de Jessica, (Estelle Meyer) candidate prisonnière d’une émission de télé-réalité, à l’énergie et à la liberté communicatives, tandis qu’un cycliste (Jacques Bonnaffé), après avoir perdu son travail et tous ses idéaux politiques, au point de s’être laissé happer par le gouffre de l’extrême droite, n’envisage plus qu’une issue fatale.
Evitant l’écueil du symbolisme à outrance, c’est en s’appuyant sur les contrastes de tons et d’émotions qu’Alain Raoust bâtit l’intensité de son histoire. Il provoque l’inattendu, dès que la routine s’annonce. Il fait rebondir personnages et situations, caracole avec vivacité et générosité du réalisme à la fable, sans jamais trébucher et choisit, avec cette œuvre romantique et ensoleillée, d’attirer sans violence l’attention sur les nouvelles luttes à mener.
- Copyright Shellac
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.