L’amour nous mène en bateau
Le 2 juin 2014
Un couple s’éteint, un autre s’éveille. Philip Seymour Hoffman filme avec délicatesse cette symétrie amoureuse. Joli coup d’essai.
- Réalisateur : Philip Seymour Hoffman
- Acteurs : Philip Seymour Hoffman, Amy Ryan, John Ortiz, Daphne Rubin-Vega
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h31mn
- Titre original : Jack Goes Boating
- Date de sortie : 29 décembre 2010
- Plus d'informations : Le site officiel du film
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Un couple s’éteint, un autre s’éveille. Philip Seymour Hoffman filme avec délicatesse cette symétrie amoureuse. Joli coup d’essai.
L’argument : Jack est un chauffeur de limousine attachant et socialement un peu inadapté. Il passe le plus clair de son temps avec son ami Clyde et sa femme Lucy. Grace à eux, il rencontre la fragile et maladroite Connie et en tombe amoureux. Afin de la séduire, Jack apprend à cuisiner avec ténacité, se prend à rêver d’une nouvelle carrière et va même jusqu’à apprendre à nager. Jack veut absolument tenir la promesse qu’il a faite à Connie lors de leur rencontre : une ballade en bateau à Central Park !
Mais alors que le couple de Jack et Connie tente de dépasser leurs inhibitions sans renoncer à leur idéal, celui de Clyde et Lucy commence, lui, à s’effriter...
Notre avis : A bien des égards, la première réalisation de l’excellent acteur Philip Seymour Hoffman peut aisément, et paresseusement, se ranger dans la catégorie « comédie romantique indépendante ». Cette antichambre d’Hollywood regorge de personnages décalés, déphasés voire asociaux, qui cherchent l’amour et le trouve chez un partenaire soit aussi barré, soit assez sain pour équilibrer la balance. Assurément, Jack et Connie font partie de ces personnages tout comme ceux de Punch drunk love, film magistral du cinéaste fétiche d’Hoffman, Paul Thomas Anderson, sans doute l’une des œuvres les plus accomplies dans ce genre à part entière. Si Rendez-vous l’été prochain (malheureux et insipide titre français pour Jack goes boating) n’a pas la puissance formelle de son glorieux modèle, il en a tout de même la saveur corsée.
En filmant l’histoire de ces deux couples, l’un naissant, l’autre sur le déclin, Hoffman a su parfaitement saisir et détailler ce que l’on appelle communément l’ironie du sort, à savoir une situation à la fois initiée et subie par les protagonistes, qui n’a rien à voir avec le destin mais dont les racines se situent plutôt du côté de l’inconscient. Au début du film, il ne fait aucun doute que le rapport entre Jack et le couple Clyde/Lucy est d’ordre filial, malgré le fait qu’ils soient tous quadragénaires. Ils veillent sur Jack comme sur leur enfant qu’ils n’ont pas, veulent le caser avec Connie, lui apprennent à nager, faire les courses, l’inscrivent à un cours de cuisine, etc. En revanche, la nature de cet investissement est beaucoup moins claire et sert surtout, inconsciemment donc, à éluder leurs problèmes de couple. Mais petit à petit le film va renverser de manière symétrique ce rapport complexe. L’explosion hystérique et adolescente de Clyde et Lucy contraste ainsi avec la fraîche idylle de Jack et Connie, synonyme d’accession à la maturité. Ironie teintée d’amertume.
Pour autant, si Hoffman oppose effectivement au sein même de son film les codes de la comédie romantique et ceux du drame sentimental, la frontière reste poreuse et permet un magnifique mélange des sentiments exprimés à l’écran et ressentis par le spectateur. Après tout, le couple Jack/Connie naît des cendres du couple Clyde/Lucy, ce dernier étant le seul modèle référentiel à disposition de Jack. Ironique, encore une fois, mais surtout chargé de menaces futures.
De ces sentiments contradictoires se dégage un malaise parfois prenant qui culmine vers la fin dans une scène de dîner mémorable où toutes les tensions explosent. Un moment de bravoure dont la longueur et les enchaînements viennent nous rappeler que le film est l’adaptation d’une pièce de théâtre montée par la troupe d’Hoffman. Il était donc en terrain connu pour sa première réalisation ce qui dénote, non pas un manque d’ambition, mais plutôt un désir de se faire la main avec modestie. Car si c’est effectivement du tout cuit, c’est loin d’être du réchauffé. La douceur, parfois la grâce, et l’amplitude de la mise en scène, aidée par une musique indé aérienne (Grizzly Bear en tête), laissent en effet augurer de bien belles choses pour la suite.
La bande-annonce : ICI
- © Le Pacte
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