Le 20 septembre 2017
- Durée : 2
- Scénariste : Beka
- Dessinateur : Marko
- Famille : BD Franco-belge
- Editeur : BAMBOO
- Date de sortie : 23 août 2017
Cette semaine, nous avons pu rencontrer dans les bureaux de Bamboo, après un cours de yoga donné par Amélie Annoni , les auteurs des deux BD « Le Jour où le bus est reparti sans elle » et sa suite « Le Jour où elle a pris son envol », à savoir le duo Beka et le dessinateur Marko. Il ne manquait que la coloriste Maëla Cosson pour que l’équipe soit au complet.
Résumé : Cette semaine, nous avons pu rencontrer dans les bureaux de Bamboo, après un cours de yoga donné par Amélie Annoni , les auteurs des deux BD « Le Jour où le bus est reparti sans elle » et sa suite « Le Jour où elle a pris son envol », à savoir le duo Beka et le dessinateur Marko. Il ne manquait que la coloriste Maëla Cosson pour que l’équipe soit au complet.
Si vous ne le savez pas encore, le duo de scénaristes œuvrant sous le pseudonyme Beka est composé de Bertrand Escaich (Be) et Caroline Roque (Ka).
Nous vous avions déjà parlé du premier tome de cette série, « Le Jour où le bus est reparti sans elle », dans un article précédent. Et pour marquer la sortie de la suite des aventures de Clémentine, toujours en recherche d’elle-même après sa rencontre imprévue avec Antoine, nous avons pu échanger un moment avec trois des auteurs autour de ces deux volumes.
Mais un petit avertissement s’impose : Nous parlons des personnages, des événements qui se produisent, des idées exposées... Si vous voulez garder la surprise de la découverte de ces BD, foncez lire ces deux volumes avant de prendre connaissance des propos tenus dans cette rencontre ! Et tout vous paraîtra beaucoup plus clair... Sinon, préparez-vous à en apprendre beaucoup sur le contenu de ces deux opus.
Caroline Roque, Marko et Bertrand Escaich
crédit photo : ©A.Moreau Bamboo édition
aVoiraLire : Bonjour Caroline, bonjour Bertrand. Tout d’abord merci pour cette BD. Lors de la lecture de ces deux volumes, j’ai passé un très bon moment. Et j’ai aussi apprécié le fait que cette histoire pousse à la réflexion une fois le livre fermé. Le petit un sur la tranche laissait supposer un tome deux, qui est arrivé. De plus, juste après le cours de yoga, vous nous avez annoncé qu’un troisième tome était lancé. Vous êtes-vous dit dès le départ que ce serait une trilogie ?
Caroline Roque : Non, pas vraiment. Au départ, on ne savait pas si ce serait trois, quatre, voire deux tomes seulement.
Bertrand Escaich : Déjà, il y a une contrainte éditoriale. Il faut qu’il y ait un minimum de ventes pour que l’éditeur puisse envisager de poursuivre sereinement une série. C’est normal. Il est donc très dur de se projeter dès le départ. Nous, on avait envie de continuer… et Olivier Sulpice, notre éditeur, aussi !
Caroline Roque : Oui !
Bertrand Escaich : Le personnage de Clémentine avec ses doutes et ses envies de vivre mieux nous est apparu et s’est construit au fur et à mesure qu’on écrivait l’histoire. On se rendait compte qu’elle avait beaucoup d’autres choses à proposer, à raconter, et elle allait être confrontée à beaucoup d’autres événements dans sa vie, passer des étapes et déboucher sur plein d’autres situations qu’on avait envie de développer.
Caroline Roque : Il y avait aussi le personnage d’Antoine qui restait assez mystérieux dans les tome un et deux et que l’on va davantage développer dans le tome trois.
Bertrand Escaich : Dans le tome trois, on saura d’où il vient.
Caroline Roque : Il aura fallu trois tomes pour en savoir plus sur lui. (rires)
aVoiraLire : D’ailleurs, Antoine dit dans le tome deux qu’il parle peu de lui. Une autre chose m’avait beaucoup marqué. Le premier tome ressemble à un road-movie inversé. Normalement, dans un road-movie, le personnage part et sur son trajet, il fait des rencontres qui le font évoluer. Dans votre BD, le personnage arrive à un endroit, se pose et les gens passent. Les rencontres viennent à lui. L’avez-vous pensé de cette manière ?
Caroline Roque : On ne l’avait pas pensé comme ça. On a plutôt visualisé la maison comme une sorte d’îlot au milieu de cette forêt isolée, et les gens y passaient. C’est plutôt la maison qui était le centre, le lieu de l’histoire.
Bertrand Escaich : Dans la vie, on est souvent confronté à des idées fausses, des a priori, autour de ce qu’on imagine. On est sûr que telle personne, telle situation sont pleines de richesses et d’enseignement, parfois à tort, et on peut dans le même temps passer totalement à côté de quelqu’un qu’on ne va pas remarquer. On va rater une rencontre, ou un beau moment. Et c’est un peu ce qu’on a voulu raconter. Des fois on veut suivre une voie, convaincu que c’est la bonne pour nous, on y croit à fond alors que la belle voie est juste à côté. Mais on ne la voit pas. D’où l’idée de cette maison isolée, de ce personnage, Antoine, que Clémentine aurait pu ne pas remarquer et qui a pu lui apporter finalement ce qu’elle cherchait.
aVoiraLire : Par rapport au personnage, j’ai trouvé Clémentine très humaine, dans ses hésitations, ses doutes. C’est une personne à laquelle on peut s’identifier alors que Jean-Eudes et Antoine sont deux extrêmes. C’était plus difficile de se retrouver en eux car je les trouvais plus tranchés, pas tranchés mais...
Bertrand Escaich : Ils ont plus de certitudes.
Caroline Roque : Oui.
Bertrand Escaich : Surtout Jean-Eudes.
aVoiraLire : Ils ont effectivement tous deux des certitudes, pour Jean-Eudes dans le négatif et pour Antoine dans le positif.
Bertrand Escaich : Antoine a choisi d’adopter cette attitude dans le tome un car Clémentine a des doutes. Il ne veut pas l’égarer encore plus donc, il va présenter une certaine assurance. Dans le cas d’Antoine, il en a conscience, c’est un choix délibéré. Il n’est pas aussi dogmatique au naturel. Mais avec Clémentine, c’était nécessaire. Et c’est comme cela que se conclut le tome trois. On verra que finalement lui-même a un passé, des épreuves.
Caroline Roque : Il adoptera une posture différente.
Bertrand Escaich : Il a une histoire assez compliquée en fait et il va effectivement changer un peu d’attitude aussi… Surprise !
aVoiraLire : C’est une surprise intéressante. Je me demandais si vous pensiez dès le départ avoir autour de Clémentine des personnages qui ont déjà trouvé leurs directions. Ou avez-vous hésité à leur rajouter de petites fractures ? Ou alors, comme vous parlez du tome trois, vous êtes-vous dit que vous alliez montrer les failles dans la suite car Clémentine n’est pas le seul personnage à revenir ?
Bertrand Escaich : Dans le tome trois, on va montrer les failles d’Antoine. Il en a énormément.
Caroline Roque : Et on en est à la page dix-neuf seulement ! (rires)
Bertrand Escaich : Mais dans le tome deux, on sent les fêlures du personnage de Chantal. On sait qu’elle a dû se faire violence pour réaliser son rêve d’écrire. On le ressent dans son attitude aussi. Ce n’est pas quelqu’un d’extraverti mais qui intériorise beaucoup. Et certainement par protection, pour ne pas être trop attaquée dans ce qu’elle aime et qui lui tient à cœur. En tout cas, on voulait le faire ressentir. Il faut savoir se protéger dans ce qui nous est le plus vital ! Ce que n’a pas besoin de faire quelqu’un comme Jean-Eudes car lui, il est totalement sûr de lui, convaincu. C’est une chance quelque part, mais qui empêche toute évolution.
aVoiraLire : Dans le tome deux, parmi les nouveaux personnages que Clémentine rencontre - on retrouve Chantal et Thomas du tome un - on découvre Xu Lun et d’autres. Finalement, toutes ces rencontres qui nourrissent Clémentine et qui s’appellent les unes les autres, les avez-vous construites en vous disant que des gens positifs avaient un entourage positif, et que la transmission en était facilitée ?
Caroline Roque : On avait cette idée-là. Mais on voulait aussi montrer des gens qui avaient réussi à concrétiser leur rêve sous différentes formes.
Bertrand Escaich : Je pense que c’est un peu le cas aussi, le positif appelle le positif. On crée des affinités autour de soi un peu liées à ce qu’on aime, ce qu’on ressent et qu’on partage avec les autres. Ça se fait à notre insu, quelque part. Je ne pense pas que le Dalaï-Lama soit pote avec Trump sur Facebook par exemple... (rires)
aVoiraLire : Sait-on jamais... Ce que je trouvais intéressant également dans le premier tome, c’était l’approche autour des histoires racontées par les personnages, on voyage sans bouger. Et dans le tome deux, on bascule plus dans une partie théorie et pratique aussi. Plus concrète, avec la méthode des chemins, avec l’image miroir par exemple.
Bertrand Escaich : On ne pouvait pas refaire exactement la même chose que dans le tome un. On voulait creuser un peu plus et donner quelques pistes, mais pas dogmatiques et surtout pas liées à une religion ou une philosophie particulières qui exprimeraient notre façon de voir le monde. Il fallait quelque chose de compatible avec les vies de chacun. L’idée était plus de rassembler que de diviser.
aVoiraLire : Quand j’ai lu la partie sur le chemin des possibles, j’ai trouvé que vous aviez développé à votre manière une idée que j’avais découverte dans Watchmen et que les auteurs avaient baptisé « Miracle Thermodynamique ».
Caroline Roque : On a aussi pris le parti de ne pas employer de terme de physique ou de mathématique. Comme on a fait des études dans ces domaines, on s’est dit « essayons de parler au maximum de personnes et n’utilisons pas de termes spécifiques ». Mais ce n’était pas évident.
Bertrand Escaich : Surtout dans le tome trois !
Caroline Roque : Oui. C’est compliqué de s’éloigner du concept physique.
aVoiraLire : C’est vrai qu’au départ, quand Simon parle de concepts de physique quantique, ça m’a fait peur mais finalement, tout s’éclaircit grâce au dessin de Marko d’ailleurs !
Caroline Roque : Oui, on cherchait une façon de le montrer, et le dessin est venu à point nommé.
Bertrand Escaich : En fait, c’est le principe de la fonction d’ondes… ou disons, du fait qu’une particule sous sa forme d’onde, va occuper tous les états disponibles en même temps… pour ensuite n’en choisir qu’un en devenant « particulaire ».
Caroline Roque : On n’a pas cherché à parler de la fonction d’onde, mais elle est venue toute seule... (rires)
Bertrand Escaich : Mais elle est présente dans le dessin. C’est intéressant car de plus en plus de physiciens font l’analogie entre le monde réel et le monde quantique car il y a cette notion de choix qui a perturbé les physiciens quantiques pendant des années. L’atome n’est pas comme on se le représente, une sphère avec de petites boules qui tournent autour. C’est plus compliqué et plus étonnant aussi. L’électron se situe dans un nuage de possibilités autour de l’atome. Et il n’y a qu’au moment où on va le voir, l’observer, qu’il va devoir adopter une position ou une vitesse précises. Sinon, il occupe tous les états et toutes les positions à la fois. C’est un peu ce qu’on a montré dans notre livre, en le transposant à notre vie. A chaque instant, tout un tas de possibilités s’offre à nous et on en choisit une. C’est une petite analogie qu’on a voulu utiliser. Ce n’est pas une parole divine qui tombe. C’est juste présent dans la nature. On passe de tout un éventail de possibilité à une seule, qui devient réelle dans notre vie.
aVoiraLire : D’ailleurs, cette double page avec les chemins des possibles est très belle. Très parlante.
Bertrand Escaich : Tout cohabite… et c’est à nous de choisir, avec nos audaces, notre imagination, nos peurs et notre histoire personnelle…
La double page du chemin des possibles
A voir A Lire : Et je me demandais comment vous l’aviez imaginée avec Marko.
Caroline Roque : On lui avait décrit l’image avec un dessin.
Bertrand Escaich : Ça se réfère à l’onde de probabilité qui est quelque chose de très précis sur le plan de la physique. Or, comme elle est expliquée par un personnage qui est physicien, il nous fallait être le plus juste possible. Mais il fallait évidemment extrapoler car on n’est pas dans la physique pure, on est dans la vie ! Marko avait proposé plusieurs dessins très graphiques. Mais ils devenaient très réels et donc, très connotés. Par exemple, il avait proposé des nuages qui se formaient autour des pas de Clémentine, chacun représentant un choix de vie. Mais le problème était que l’on voyait la totalité des choix qui s’offrent à elle, sans différences, si l’on peut dire… Comment expliquer ? (un temps de réflexion) Dans l’onde de probabilité telle qu’elle est définie en physique, diverses amplitudes apparaissent qui indiquent à chaque fois une probabilité différente de trouver la particule à cet endroit. Dans la proposition de Marko, tous les nuages étaient accolés et de tailles identiques, donc on avait l’impression que tous les choix étaient non seulement visibles, mais qu’ils avaient la même possibilité de devenirs réels. Or, ce n’est pas le cas. Dans la vie, certains choix vont s’imposer à nous plus que d’autres, ne serait-ce que par peur ou manque d’audace, ou de par notre éducation, nos principes ou nos valeurs. C’est pour cela qu’on n’avait pas retenu cette approche, même si le dessin était très beau. Mais peut-être que cette idée pourra resservir dans le tome trois.
Caroline Roque : On avait décrit à Marko quelques possibilités du devenir de Clémentine sur cette page, puis il en ajouté d’autres. Dans le tome trois, on réexplique cette théorie au début. Mais ça, Marko ne l’a pas encore vu… On explique le dessin et les différentes fonctions d’ondes, les choix de vies, d’une autre façon, bien plus graphique cette fois, car c’est Antoine qui en parle. Et Antoine n’est pas un physicien...
A suivre...
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