RBG - la critique du film

Notre avis : Inutile de se mentir, avant la sortie de RBG les Français ne connaissent pas Ruth Bader Ginsburg. Il est donc important de préciser que, depuis 2014, les coups de gueule de cette femme, membre de la Cour suprême des États-Unis, lui ont octroyé une immense popularité auprès des militantes féministes de son pays. Et, puisqu’aux USA, la notion de popularité est indissociable de celle de pop culture, c’est au rang de pop star que cette octogénaire s’est vite retrouvée érigée.
Alors, bien sûr, les spectateurs français peuvent penser que ce rappel n’est pas nécessaire puisque ce documentaire a pour vocation de leur expliquer toute l’histoire de cette femme. Mais, c’eut été considéré que celui-ci leur était destiné. Or, parce qu’elles sont partis du principe que les spectateurs américains savent pertinemment ce qui a mené, au cours des quatre dernières années, Ruth Bader Ginsburg à se faire surnommée « Notorious RBG », Betsy West et Julie Cohen n’ont pas jugé utile de revenir sur ses récentes déclarations qui font la une des journaux locaux et ont dédié leur documentaire sur le passé de cette femme, moins connu du grand public américain.

RBG © 2018 CNN Films - Storyville Films - L’Atelier Distribution - Tous droits réservés.

A défaut de justifier l’effet de mode médiatique qui rend actuellement cette juge si célèbre, et controversée, aux yeux de ses compatriotes, les deux réalisatrices ont réussi à tisser le récit oublié qui lui avait déjà, dans les années 70, donné une première vague de popularité. Et, à l’heure où le féminisme est une cause politique majeure, revenir sur le combat qu’avait à l’époque mené cette défenseure d’une égalité homme-femme s’avère capital.
A travers un dispositif sans fioriture et les interviews d’une vingtaine d’intervenants -aussi bien des amis d’enfance, collègues ou disciples que RBG elle-même- les deux documentaristes ont réussi à reconstituer le parcours de cette femme qui a dû lutter pour se faire une place dans un univers terriblement phallocrate. Un récit à ce point cinégénique qu’il se devait d’être traité avec le plus grand sérieux pour ne pas être pris pour un documenteur putassier. Et pourtant, l‘ardeur dont fait preuve ce petit bout de femme (qui, si elle devait être comparée à une Française, le serait à un mélange entre Simone Veil et Agnès Varda) ainsi que les nombreuses références à la place qu’elle s’est désormais fait au sein de la pop culture parvient à donner à ce documentaire un peu de l’énergie dont la prive de facto sa forme très télévisuelle.

RBG © 2018 CNN Films - Storyville Films - L’Atelier Distribution - Tous droits réservés.

Même il ne nous aide pas à partager l’admiration que les Américains anti-Trump ont pour ce qu’incarne Ruth Bader Ginsburg dans l’opposition à leur machiste de président, ce documentaire nous permet d’en savoir un peu plus sur elle. Visionner ce film est donc indispensable pour ceux qui veulent en savoir plus sur cette grande figure du féminisme américain, mais aussi qui souhaiteraient savoir qui est cette jeune avocate à qui Felicity Jones va prêter ses traits dans Une Femme d’Exception, dont la sortie en France est prévue à peine un mois plus tard. Ce biopic hollywoodien se donne lui aussi pour finalité de faire découvrir à son public ses combats juridiques dans les années 70... par le prisme de son histoire d’amour, c’est tellement plus hollywoodien. Quel que soit celui des deux films qui profitera le mieux du succès de l’autre, misons que ces deux approches complémentaires permettront de faire connaître un minimum l’acronyme RBG au-delà des frontières américaines.

RBG © 2018 CNN Films - Storyville Films - L’Atelier d’images - Tous droits réservés.