Le 29 avril 2016
Meilleur film et Meilleur réalisateur aux Oscars, un classique indémodable sur la vie des mineurs au Pays de Galles dans les années 40.
- Réalisateur : John Ford
- Acteurs : Roddy McDowall, Walter Pidgeon, Maureen O’Hara
- Genre : Drame
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h58mn
- Titre original : How Green Was My Valley
- Date de sortie : 10 juillet 1946
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Reprise : le 27 avril 2016
Meilleur film et Meilleur réalisateur aux Oscars, un classique indémodable sur la vie des mineurs au Pays de Galles dans les années 40.
L’argument : Au moment de quitter sa maison natale, Huw Morgan se souvient de son enfance, il y a cinquante ans de cela, dans cette vallée du Pays de Galles. Son père, Gwilyn, et ses cinq grands frères travaillaient alors à la mine de charbon et la vie quotidienne s’écoulait paisiblement, rythmée par des habitudes qui équivalaient à de véritables rites. Mais les conditions de travail devinrent de plus en plus difficiles, des ouvriers furent renvoyés et les salaires diminués. Les fils Morgan, s’opposant à leur père, décidèrent de faire grève et durent quitter la maison familiale. Ce fut le début d’une longue série de malheurs...
Notre avis : Qu’est-ce qui fait que nous, spectateurs post-modernes, endurcis et goguenards, soyons encore sensibles à une histoire pleine de candeur et de bons sentiments qui repose sur d’antiques valeurs et des personnages univoques ? Car c’est bien le mystère de ce film, qu’on commence à regarder le sourire narquois et qui, peu à peu, insinue en nous une petite musique émouvante et forte, entêtante aussi. En suivant cette famille de mineurs au gré des événements somme toute banals (naissance, mariages, décès, enfants qui grandissent et qui partent), Ford parvient à doter de chair des caractères et à nous faire partager leurs joies et peines, le tout nimbé dans une mélancolie présente dès le début, avec la belle idée du flash-back et de la voix off. On le sait, Qu’elle était verte ma vallée ne lui était pas destinée (c’est William Wyler qui devait le réaliser), mais il s’empare du sujet avec une rigueur sans faille et choisit de filmer non pas à hauteur d’homme, mais à hauteur d’enfant, en respectant le point de vue du narrateur, Huw, ce qui explique les nombreuses contre-plongées aussi bien que, par exemple, le fait que la mine n’apparaisse que quand le garçon y descend.
La structure très classique du scénario repose sur un système complexe de parallélismes : deux bagarres à l’école, deux mariages, deux morts dans la mine, deux réunions de diacres, etc. Mais le génie de Ford est de jouer de ces échos en de subtiles variations qui sont autant de moyens de travailler la suggestion. Ainsi le mariage malheureux n’est-il vu qu’à la sortie par le visage résigné de Maureen O’Hara ; ainsi le décès du père est-il suggéré par le retour du monte-charge vide. De même le goût du détail purement cinématographique charge-t-il d’émotion des plans intenses : aux mêmes noces, le voile blanc qui flotte au vent, comme un signe de rébellion muette. Ford ne cesse de s’attarder sur des images, des gros plans de ses acteurs ou de savantes compositions autour de portes ou de fenêtres, avec une retenue qui empêche le film de sombrer dans une imagerie sulpicienne. C’est de là sans doute que vient la réelle émotion qui étreint le spectateur : le cinéaste y croit, il ne prend aucune distance avec un sujet aux relents mélodramatiques. Pas de clin d’œil, pas de jugement surplombant, on est de plein pied avec les personnages.
Limitée à quelques lieux-clé comme la grande rue pentue ou l’intérieur de la maison familiale au bas plafond, l’action alterne grands et petits moments, sourires et drames ; mais plus que les péripéties prévisibles, c’est l’humain qui intéresse Ford : il célèbre avec un lyrisme sincère des valeurs traditionnelles fortes, la droiture, la fierté, la pudeur, la solidarité, la famille. Jamais cependant un discours pataud ne vient perturber une narration chronologique et simple ; c’est davantage par contraste que ces valeurs prennent leur force : car Ford règle des comptes avec les bigots (le diacre ou la gouvernante) comme avec les grandes idées désincarnées (on n’est pas ici dans un film socio-politique).
Encore une fois, c’est l’humain qui l’intéresse, loin des grandes causes : c’est l’émerveillement d’un enfant, le miracle toujours possible (la séquence de la marche sur la colline) ou le beau visage de Maureen O’Hara qu’il filme avec attention. Plus que tout, l’idée d’une humanité possiblement solidaire (magnifiques scènes de groupes qui chantent) nous vaut les belles envolées lyriques et c’est les femmes que le cinéaste charge d’espoir : voir la séquence bouleversante dans laquelle les morts apparaissent à la mère. Et, au fond, par une fin qui reprend les images idylliques du début, il suggère que les souvenirs constituent des présences réelles qui forment un temps cyclique, ou immobile, infiniment nostalgique. C’est la beauté sobre d’un film qui, sans atteindre les grandes réussites fordiennes, comporte assez de grands moments pour satisfaire tous les publics.
Reprise à Paris le 27 avril dans le cadre de la ressortie de trois John Ford en copie restaurée HD.
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