La femme blessée
Le 8 mars 2012
La vengeance d’une femme humiliée. Ce coup d’essai d’une jeune réalisatrice russe est un petit bijou de sécheresse dramatique et d’étude de mœurs incisive.
- Réalisateur : Angelina Nikonova
- Acteurs : Olga Dihovichnaya, Serguei Borissov
- Genre : Drame
- Nationalité : Russe
- Distributeur : Rezo Films
- Durée : 1h45mn
- Titre original : Portret v sumerkakh
- Date de sortie : 22 février 2012
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– Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs.
– Art Film Festival 2012 : Meilleur film - Meilleure actrice pour Olga Dykhovichnaya
– Stockholm Film Festival 2011 : Meilleur acteur pour Sergei Borisov
– Thessaloniki Film Festival 2011 : Meilleur film - Meilleur réalisateur
L’argument : Marina, la trentaine, est assistante sociale pour enfants. Mais elle se cherche encore, dans son travail comme dans son couple. À l’issue d’une journée d’errance, elle se fait agresser par des policiers. Elle n’a dès lors plus qu’une obsession, se venger. Ses armes ne seront pas celles que l’on croit…
Notre avis : Grand Prix du Festival des Arcs en 2011, présenté à Venise et Toronto, ce premier long métrage tourné en partie caméra à l’épaule est un petit miracle russe au ton volontairement tourné vers un naturalisme pessimiste. Ce portrait de jeunes adultes sans lendemain dans une société patriarcale et inégalitaire gangrenée par le machisme et la corruption d’État révèle une cinéaste singulière encore que son film se nourrisse de références. C’est d’abord un beau récit féministe, sans que la cinéaste ne verse dans le simplisme, pêché mignon que même une Agnès Varda dans L’une chante, l’autre pas (1977) n’avait su éviter. On est ici davantage dans l’épure et le non-dit, et il est permis de rattacher Nikonova au style nerveux et fascinant d’Andrea Arnold Red road (2006), voire du Kieslowski de La double vie de Véronique (1991), par cette succession contradictoire d’ellipses et de plans-séquences ainsi que le refus de surligner l’action en ayant recours à des indications délibérément psychologiques.
- Copyright Rezo Films
Portrait au crépuscule trouve aussi sa force dans une dénonciation politique qui n’est jamais frontale. De la déliquescence des institutions censées protéger les citoyens (surréaliste séquence avec une policière dans un commissariat) aux familles démunies livrées à elles-mêmes au nom d’un individualisme ambiant, c’est toute une société qui semble abandonnée et même les rituels communautaires (effrayante scène d’anniversaire) ne font que faire ressortir rancœurs et frustrations. Angelina Nikonova filme enfin un suspense dramatique et policier en réussissant à distiller ce mélange d’étrangeté et d’oppression qui fait la force des modèles du genre. Elle est en cela bien aidée par l’actrice principale, Olga Dykhovitchnaia, aux faux airs d’Irène Jacob, et qui a également participé à l’élaboration du scénario. Elle contribue par la finesse de son jeu à l’intensité de ce projet périlleux sur la Russie moderne.
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