Paysages manufacturés - la critique du film

Un Grenelle de l’environnement sur grand écran. Le cinéma citoyen est arrivé à maturité...

L’argument : Jennifer Baichwal suit le photographe Edward Burtynsky dans ses repérages autour du monde. De pays en pays, elle filme les ravages de la pollution...

Notre avis : Les intervenants du Grenelle de l’environnement regrettaient le peu de temps qu’on leur avait alloué pour débattre du sort de la planète. Dans cette course contre la montre, le visionnage de Paysages manufacturés aurait été d’un grand secours. Jennifer Baichwal y livre un portrait gigogne : derrière le démontage fashion de l’œuvre d’Edward Burtynsky, la documentariste ausculte la nature rongée par la pollution et la mondialisation.
Depuis le mi-temps des années 90, le photographe canadien a transformé cette problématique en manne esthétique. Ses clichés sont d’une beauté lunaire, immortalisant une faune et une flore figées par la pollution. Baichwal, elle, filme les à-côtés des photographies : les étendues du Bangladesh engluées dans le pétrole, la Chine suffocant de vapeurs toxiques, etc., et détourne son film de toute visée contemplative.
De bout en bout, ce documentaire glace intelligemment le sang. Il fait un tour d’horizon des grandes zones de pollution du globe mais, c’est davantage le discours qu’il construit qui marquera les esprits. Jennifer Baichwal questionne notre conception de la nature. Alors que nous sommes dans une ère marquée par l’industrialisation, est-il encore possible de défendre un seuil de "zéro pollution" ? Nos besoins énergétiques sont exponentiels, doublant tous les trente-cinq ans. La nature, dans son acception romantique, est alors une conception passéiste, si ce n’est rétrograde. Bientôt, le monde ne sera que Paysages manufacturés...