Littérature francophone - Prix Médicis 2002
Le 3 décembre 2002
Prix Médicis, Anne F. Garréta fait du désir le fil de ses nuits, dans un roman de tous les désordres. La règle y est alphabétique.
- Auteur : Anne F. Garréta
- Editeur : Grasset
- Genre : Roman & fiction, Littérature blanche
- Prix : MÉDICIS
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Pas un jour. "Pas un jour sans une femme", sentence posée comme un point de départ à l’exploration du désir. Contrainte oulipienne ? Cadre à transgresser ? La règle est à la fois simple et perverse : écrire "l’alphabet bégayant du désir" ; chaque jour, évoquer une femme qui a suscité ou éprouvé cet émoi. Une initiale pour la nommer ; l’ordre alphabétique pour la ranger. Mais le souvenir est capricieux, et fait de toute chose l’objet du désir. Une équipe de self-défense... Une belle américaine qui trace à travers les nuits d’insomnie.
Les jeux de l’amour et de la séduction sont si étrangement faits. L’attirance insolite pour celle qui ne vous a jamais fait vibrer... Un désir qu’on se refuse à admettre mais qu’on reconnaît pourtant. Celui encore qu’on n’a jamais su percevoir chez l’autre, et qui surgit, comme une évidence, alors qu’il n’est plus temps. Les caprices, les désespoirs, les attentes, les regrets... Anne F. Garréta ne nous refuse rien de ce qui fait l’étincelle de la vie, ce regard de l’autre qui soudain n’est plus le même, qui s’attarde un peu trop, cette occupation de l’esprit et des sens par celle qui, hier encore, n’était rien.
Mais si le cadre semble rigide, on est très loin de l’exercice entomologiste. La rigueur de la méthode se frotte à la liberté du souvenir. Pas question d’épingler ses amours sur un carton. Les images s’envolent, au gré de l’esprit, virevoltent, hésitent, se reprennent et se livrent, malicieuses, sur le fil d’une digression, au bonheur de la lecture.
Douze nuits pour égréner le souvenir, douze nuits pour aiguiser les sens du lecteur conciliant, qui se laisse mener par le bout du verbe. Douze nuits pour se raconter, s’interpeller, s’apostropher, dans un dialogue de l’auteur avec elle-même, qui ne laisse jamais le lecteur à la porte, mais l’entraîne dans ce tourbillon des sens, étourdi, ravi, ensorcelé par cette langue à la fois précieuse et badine, que rien n’arrête jamais.
La contrainte fait le jeu, et le jeu ne vaut souvent que si l’on triche ! Entre hasard et mauvaise mémoire, où est la vérité ? Et puis qu’importe. La boucle est bouclée. Le désir est insondable, volatile, aléatoire. Et on n’en a jamais assez !
Anne F. Garréta, Pas un jour, Grasset, 2002, 157 pages, 14 €
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