Le cœur corrompu
Le 20 mars 2021
Othello concentre tout ce qui a fait la renommée d’Orson Welles dans l’Histoire du cinéma : une remarquable étude de mœurs, doublée d’un superbe exercice de style.
- Réalisateur : Orson Welles
- Acteurs : Orson Welles, Suzanne Cloutier, Micheál MacLiammóir, Robert Coote, Hilton Edwards
- Genre : Drame, Noir et blanc
- Nationalité : Américain, Français, Italien, Marocain
- Distributeur : Carlotta Films, Les Films Marceau-Cocinor
- Durée : 1h35mn
- Date télé : 28 mars 2021 00:05
- Chaîne : France 5
- Reprise: 23 avril 2014
- Titre original : The Tragedy of Othello: The Moor of Venice
- Date de sortie : 19 novembre 1952
- Voir le dossier : Shakespeare au cinéma
- Festival : Festival de Cannes 1952
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Résumé : À Venise, des noces ont lieu en secret entre le Maure Othello, général vénitien estimé par ses pairs, et la belle Desdémone, fille du sénateur Brabantio. Au fond de l’église, deux hommes se tiennent en retrait : il y a là Iago, l’officier d’Othello, qui voue à son supérieur une haine incommensurable, et Roderigo, amoureux éperdu de Desdémone. Après leur union, Othello s’en va combattre la flotte turque, puis retrouve sa femme sur l’île de Chypre où il est nommé gouverneur. Le fourbe Iago est alors résolu à détruire le bonheur des jeunes mariés et va pour cela s’employer à manipuler leur entourage…
Critique : En son temps, Othello a marqué les esprits cinéphiles et culturels. D’abord, parce qu’aucun film d’Orson Welles ne fut si compliqué à produire que celui-ci. Le premier producteur italien ayant abandonné le projet qu’il n’était plus en mesure de financer, Orson Welles alla tourner Le Troisième homme de Carol Reed et injecta son cachet dans la production d’Othello. Ses autres longs-métrages ayant subi, de la part des producteurs, des coupures et des montages divergeant de sa direction artistique, Othello est, avec Citizen Kane, le seul film dont Welles maîtrisa la fabrication de bout en bout.
En résulte une œuvre dense et puissante, qui fut récompensée par le Grand Prix du Festival international du Film de Cannes, connu aujourd’hui sous le nom de Palme d’or.
- Copyright Carlotta Films
Le premier personnage de l’œuvre ne fait pas partie des protagonistes, ni des antagonistes de l’histoire. Il s’agit du palais de Chypre, dans lequel se déroule l’intrigue. Ses pièces somptueuses, ses longs couloirs, ses hautes colonnes sont les témoins privilégiés de l’action. L’unité de lieu, les très nombreuses séquences tournées en intérieur, et la photographie expressionniste jouant sur le clair-obscur des décors, attestent du fait que ce sont bien les émotions, les mœurs, la psyché, les conflits internes des personnages – et particulièrement ceux d’Othello – que sonde la caméra.
Le héros tragique est enfermé, prisonnier de sa passion dévorante et de son amour sincère et fidèle pour la belle et empathique Desdémone. Mais aussi prisonnier de sa naïveté, de sa confiance trop facilement accordée. Une brèche dans laquelle s’empresse de s’engouffrer le cupide Iago, mécontent que le lieutenant Cassio ait obtenu une promotion à sa place et désirant se venger du Maure par tous les stratagèmes possibles.
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La réalisation se met brillamment au service des fourberies de Iago, qui se mettent brillamment au service du récit : les coups bas verbaux de sa vile rhétorique sont majestueusement filmés par de longs travellings, le temps de semer la confusion dans l’esprit d’Othello, immédiatement traduite par des champs-contrechamps appuyés, les tirades shakespeariennes en gros plans, des panoramiques tourbillonnants, vertigineux.
À l’instar de la narration, la mise en scène, superbe et nerveuse, monte crescendo la montagne du drame jusqu’à son dénouement tragique. L’ultime tirade que prononce Othello, le visage comme flottant sans corps dans une eau noire de ténèbres, conclut l’intrigue par une image cinématographique grandiose dont ce cher Orson Welles a le secret, comme le travelling arrière de Citizen Kane ou la séquence du palais des miroirs de La Dame de Shanghai.
L’on comprend aisément comment Othello s’est fait une place de choix parmi les grands classiques de l’Histoire du cinéma : le réalisateur ne néglige aucun détail esthétique, narratif, psychologique, pour raconter cette tragédie d’une densité et d’une profondeur remarquables, intemporelles.
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