Le 24 août 2019


- Scénariste : Emmanuel Moynot >
- Dessinateur : Emmanuel Moynot
- Editeur : Glénat
- Famille : Roman graphique
- Date de sortie : 23 janvier 2002
Dans un dessin superbe, Moynot donne du sens à un format carré imposé. Malgré son mince scénario, Oscar & Monsieur O étonne.
Faire entrer la bande dessinée dans un carré : curieuse idée des éditions Glénat et de leur collection Carrément BD. Le dessinateur Moynot s’y était déjà essayé en compagnie de Dieter pour Monsieur Kohl. Il récidive, seul cette fois, pour une autre histoire d’hommes : Oscar & Monsieur O, nominé pour l’Alph-Art du meilleur dessin lors du 30e Festival d’Angoulême.
Dessinateur fragile, Oscar ne serait rien sans Monsieur O, son inspirateur imaginaire qui se fait pourtant bien réel, guidant sa main sur de nouveaux chemins créatifs. Amoureux de la froide Gladys, qui ne le lui rend pas, il ne se rend pas compte que le bonheur est là, tout proche, sur son palier, chez sa jolie, enceinte et abandonnée voisine Lilas. A qui l’accouchement apportera un fils et... l’amour d’Oscar. Voilà pour le scénario. Mince, non ? Oui. Et, peut-être, tant mieux. Car libéré du fil de ce récit léger, convenu, l’œil peut succomber pleinement aux charmes du dessin de cet album.
Lire Oscar et Monsieur O est ainsi, avant tout, une passionnante expérience graphique. En raison de son format, bien sûr, si inhabituel, mais aussi de l’abandon, par Moynot, des espacements blancs entre les cases. Chaque planche devient ainsi un bloc homogène, aquarelles à l’harmonie des couleurs splendide (et quel travail sur les ombres !), composition réfléchie aux diagonales et aux échos étourdissants. Par moment, le crayon se fait même caméra, passant, d’une case à l’autre, du dos d’un personnage à son visage (on le "voit" tourner) ou s’éloignant d’une fenêtre éclairée dans un long et triste travelling nocturne.
Enfermant chaque planche dans un espace clos, compact, carré, n’hésitant pas à verrouiller ses pages en brisant le sens gauche-droite en des instants qui, pourtant, appellent une suite, Moynot ne s’en prend pas moins qu’au fondement même de la bande dessinée. Il interroge nos habitudes de lecture, réussissant à donner du sens à ce changement de format qui n’aurait pu être qu’un gadget éditorial. Brillant ! Reste à lire et relire, ou plutôt voir et revoir Oscar & Monsieur O en guise d’entraînement avant un nouvel album au scénario, on l’espère, plus touffu.
56 pages - 15,50 €