Le 28 février 2019
Film à charge contre les mariages contraints, Nour vaut davantage par la description d’un enfer conjugal que par des scènes d’insouciance convenues.
- Réalisateur : Khalil Dreyfus Zaarour
- Acteurs : Julia Kassar, Vanessa Ayoub, Aïda Sabra
- Genre : Drame
- Nationalité : Libanais
- Distributeur : Panoceanic Films
- Durée : 1h31mn
- Date de sortie : 4 mars 2019
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– Année de production : 2017
Résumé : Des journées d’été pleines de rêves, d’amour et de joie, tel est le quotidien de Nour, 16 ans, et de sa bande d’amis. Jusqu’à ce que Maurice, 35 ans, jette son dévolu sur elle et qu’elle soit contrainte de l’épouser. Sa joyeuse insouciance se transforme alors en un quotidien lugubre sur fond de confinement dans les tâches ménagères...
Notre avis : On ne saurait douter de la sincérité d’un tel film, qui aborde le thème âpre des mariages arrangés dans la société contemporaine : le fait qu’il se passe au Liban, dans un milieu catholique, n’est qu’une variable d’ajustement ; il pourrait se situer dans nombre de pays, hélas, et le scandale n’en serait pas amoindri. Ici c’est prêtre qui s’assure que Nour est consentante, caution religieuse qui devrait soutenir la jeune fille. Mais s’il le fait, dans une belle scène tendue, c’est en présence de la mère et du frère qui ont décidé pour elle. La pression est telle, sociale, familiale, financière, traditionnelle, qu’elle ne peut qu’accepter. C’en est donc fini d’une vie insouciante, de jeux et de chapardages, montrée assez complaisamment dans la première demi-heure. Fini aussi le flirt très léger avec Wassim.
- Copyright Panoceanic Films
Cette seconde partie, le mariage et ses conséquences, est de loin la plus réussie : le cinéaste y abandonne son goût de la belle image consensuelle pour une vraie réflexion de cinéma, qui tourne autour de la représentation du mal-être. S’il n’évite pas le manichéisme (le mari et la belle-mère sont gratinés), il sait par de petites touches délicates, suggérer la détresse de Nour : sa caméra qui s’attarde dans la maison vide pendant les noces ou le plan répété d’une télé allumée dans le noir disent assez la béance d’une vie qui ne permet plus que l’obéissance et l’ennui. Quelquefois, Khalil Dreyfus Zaarour use de métaphores subtiles : alors qu’elle faisait de la balançoire avec ses amis, lorsqu’elle essaie en tant qu’épouse, ses pieds accrochent le sol. Elle ne s’envole plus, trop lourde, trop préoccupée.
Mais Nour n’est pas qu’une suite de petites scènes symboliques : la violence bien réelle ponctue le film avec une brutalité difficilement supportable ; que ce soit la gifle magistrale que Maurice envoie à sa femme pour une remarque un peu forte ou la traumatisante « nuit de noces » filmée en plan-séquence, des moments aussi puissants et aussi justes clouent le spectateur sur son siège. De cette indignation le cinéaste ne fait pas un système, la réservant à des climax et à quelques scènes d’un quotidien pénible. Mais elle innerve même les fugues dangereuses et rend plus tendues les rares échappées.
- Copyright Panoceanic Films
S’il n’évite pas toujours les clichés ni les facilités, Nour ne se contente pas non plus de flatter notre bonne conscience dans un message balourd. C’est que la jeune actrice, qui incarne le rôle-titre et débute avec lui, a assez de force pour porter le personnage sans le caricaturer. Quant au réalisateur, lui aussi débutant (il n’avait tourné qu’un documentaire, Habits d’ange), il met tout son poids dans le patibulaire Maurice, froid et brutal. Et, malgré quelques flottements (les moments avec Wassim se traînent à répéter les mêmes figures), le scénario garde une certaine densité qui l’empêche de sombrer dans le pathos ou la charge sans nuances.
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