Red Swan
Le 8 janvier 2020
En abordant de manière trop illustrative, et donc trop crue, la question du harcèlement que peuvent subir les actrices, Midi Z, malgré une réalisation inventive, égare trop son spectateur pour lui permettre de comprendre la perversité du système qu’il dénonce.
- Réalisateur : Midi Z
- Acteurs : Wu Ke-xi, Vivian Sung, Ming-Shuai Shih
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Taïwanais, Malaisien, Birman
- Distributeur : Épicentre Films
- Durée : 1h43min
- Date de sortie : 8 janvier 2020
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Résumé : Nina Wu a tout quitté pour s’installer à Taipei dans l’espoir de faire une carrière d’actrice. Un jour, son agent lui propose le casting du rôle principal d’un film d’espionnage. Malgré sa réticence à la lecture des scènes de nu et de sexe, Nina se rend à l’audition.
- Copyright : Epicentre Films
Notre avis : Une fois n’est pas coutume, le scénario de Nina Wu n’a pas été écrit par Midi Z lui-même, mais par son actrice fétiche, la Taïwanaise Wu Ke-xi, qui s’est inspirée de l’affaire Weinstein, des révélations suscitées par le mouvement #MeToo, mais aussi de son expérience personnelle pour brosser le portrait d’une aspirante actrice, que l’industrie du cinéma considère moins comme un sujet que comme un objet sexuel et une marionnette manipulable à l’envi. En se proposant de nous dévoiler les coulisses du monde du cinéma, le film déroule ainsi le catalogue, quelque peu répétitif, des petites vexations, des insidieuses humiliations et des terribles sévices qu’une comédienne débutante risque de subir.
- Copyright : Epicentre Films
Pour ce cinquième film auréolé d’une présentation à Cannes dans la catégorie Un Certain Regard, Midi Z, le réalisateur d’Ice Poison et d’Adieu Mandalay, a certes le courage de s’attaquer à un sujet d’une actualité brûlante, mais il le traite de manière trop démonstrative et surtout trop esthétisante pour permettre au spectateur d’éprouver de l’empathie pour son personnage éponyme. D’autant que pour retranscrire le syndrome de stress post-traumatique qu’éprouve cette dernière, le récit fait le choix d’entremêler plusieurs niveaux de conscience, alternant sans cesse entre présent et passé, scènes réelles, rêvées et fantasmées, sans que l’on sache toujours bien où commencent les unes et où finissent les autres.
- Copyright : Epicentre Films
Et à mesure qu’on entre dans le labyrinthe de la psyché tourmentée de Nina Wu, qui se repasse et parfois ressasse le film de son existence, imagine, rêve d’autres scènes que celles qu’elle a pu vivre ou tourner, le scénario s’éparpille, perdant le spectateur. À partir du moment, en effet, où l’on ne peut plus distinguer les fantasmes de la victime des traumas qu’elle a subis, qu’on connaît surtout ses compromissions et son ambition dévorante, tout ce que le film prétend dénoncer peut être mis sur le compte de l’ « hystérie » dans laquelle sombre le personnage, par conséquent relativisé, achevant de faire de Nina Wu un thriller psychologique davantage qu’un film politique.
- Copyright : Epicentre Films
D’autant que Midi Z ne nous épargne aucun excès pour dépeindre la descente aux enfers de son personnage, recourant aux ficelles et aux clichés les plus éculés et filant les métaphores avec trop de littéralité, jusqu’à montrer l’affrontement sauvage entre des femmes convoitant le même rôle. Et alors que Wu Ke-xi incarne le rôle-titre avec un rare engagement et une bouleversante justesse, en entrant littéralement dans la peau d’une héroïne dont la personnalité vole en éclats, alors que Midi Z maîtrise pourtant d’un bout à l’autre sa mise-en-scène, Nina Wu est un de ses longs-métrages dont la trop grande virtuosité affaiblit le propos.
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