Nice Girls Don’t Stay For Breakfast - la critique du documentaire

Notre avis : C’était en 1997, lorsque le monde apprenait la disparition de Robert Mitchum, que Bruce Weber décida de mettre fin à son projet de documentaire sur la star. 2018, le film ressort des cartons : il fut présenté à la 75e Mostra de Venise et, six mois plus tard, connaît une distribution dans les salles françaises.
Le montage grâce auquel le célèbre photographe a choisi de peindre le portrait de l’acteur de La Griffe du Passé alterne entre des anecdotes racontées par des célébrités et des images de Mitchum qu’il a réussi à capter, quelques jours avant lla mort de l’icône.
Parmi les intervenants, beaucoup d’acteurs (Johnny Depp, Danny Trejo, Benicio Del Toro...) alimentent le mythe qui entoure leur aïeul, tandis que certains de ses contemporains (dont surtout son ancienne partenaire Marianne Faithfull) multiplient les anecdotes mordantes - sans citer ceux qui, comme Clint Eastwood, n’ont rien à en dire. Evidemment, le plus intéressant de ces témoignages naît dès que certains de ces tiers nous affirment que Mitchum n’était pas, dans l’intimité, le bad boy dont il se donnait l’image.

Copyright Bruce Weber

Plusieurs décennies d’images d’archives, jusqu’à celles de 1997, entretiennent ce personnage de charmeur bourru, devenu nonchalant avec les années, qui, un demi-siècle plus tôt, avait fait de Robert Mitchum un modèle de virilité. L’idée de Weber consiste à mettre en opposition cette représentation populaire de l’acteur et le visage, plus sincère, qu’il affichait lors de l’enregistrement d’un album de jazz alors qu’il était âgé de 79 ans. Cependant, cette partie s’avère peu développée puisque la description de Mitchum en tant que « poète qui repose derrière le antihéros », doit se contenter des témoignages parfois laconiques, se limitant souvent à des bruits, des rumeurs. D’apprendre que c’est dans la musique que cet homme à femmes cassait son image pour se montrer véritablement romantique, a pour véritable conséquence de faire regretter que ses deux premiers albums, enregistrés dans les années 50, n’aient pas connu la même popularité internationale que des films tels que La Nuit du Chasseur ou Rivière sans Retour. De la musique, c’est notamment de la que provient le titre Nice Girls Don’t Stay For Breakfast, qui était une chanson de Julie London, qui partageait l’affiche avec Mitchum dans L’Aventurier du Rio Grande.

Copyright Bruce Weber

Les nombreux fans de ce monument du cinéma hollywoodien, ainsi que les cinéphiles curieux qui auraient consulté sa page Wikipédia ; ne découvriront pas la carrière de chanteur de Mitchum, à travers ce film. Ce que l’on attend d’un tel documentaire, c’est qu’il essaie de percer le mystère qui entoure la personnalité trouble de la star qu’il ausculte, mais au lieu de cela, Bruce Weber ne fait que l’épaissir. Grâce à ses talents de photographe, il réussit toutefois à filmer ses interviews dans un très beau noir et blanc mais surtout à compiler un magnifique livre d’images qui donnera assurément envie à son public de se replonger dans la filmographie de cette gloire.
In fine, si le regard de Bruce Weber alimente une part de nostalgie, c’est en fin de compte surtout le fruit de son choix d’avoir attendu vingt ans pour le sortir, alors qu’aujourd’hui, où le moindre scandale ruine une carrière hollywoodienne, il semble inconcevable de voir à nouveau émerger une figure sulfureuse telle que celle de Bob Mitchum.