Mudbound - la critique du film

(c) 2017 Netflix

Notre avis : Adaptation du roman à succès d’Hillary Jackson, Mudbound est le deuxième film de la réalisatrice américaine Dee Rees après Pariah, sorti en 2011. Révélé (et acclamé) au festival de Sundance 2017, le film avait tout, de la thématique à fort potentiel au casting solide, pour devenir l’œuvre référence de Netflix.
Prenant place dans les États-Unis (le Mississippi, plus précisément) des années 40, Mudbound suit les destins entrelacés de deux familles (l’une noire, l’autre blanche donc), les McAllan et les Jackson, propriétaires terriens pour les premiers, locataires de ces mêmes terres pour les seconds. Sur fond de racisme extrême et ordinaire, l’arc narratif majeur du film s’articule autour de l’amitié improbable (et inacceptable aux yeux du monde) des deux fils de chaque famille, tous deux héros de guerre sur le retour.

(c) 2017 Netflix

Après une énigmatique introduction, commence un long flash-back nous dévoilant progressivement la détérioration attendue des relations entre les deux familles, depuis l’arrivée des McAllan, et nous mettant immédiatement face au grand problème du métrage : un enchaînement de situations et d’événements convenus et attendus jusqu’au dénouement, lui même prévisible. Aucun cliché ne sera malheureusement épargné au spectateur durant ces 2h14 d’ennui mortel. Du patriarche blanc suprématiste (et membre du KKK) jusqu’à l’ex-soldat inadapté au retour à la vie civile trouvant dans l’alcool son seul échappatoire, en passant par le triangle amoureux fraternel, toutes les cases seront cochées. Mais le plus grand regret sera de voir l’enjeu narratif le plus intéressant de tout le script, à savoir la relation semi assumée entre Jamie McAllan et Ronsel Jackson, respectivement anciens pilotes de bombardiers et chef de char de l’armée américaine, à peine effleurée : la représentation de leur amitié naissante se limitera à quelques scènes de bitures cachés dans une grange, et l’on devra s’en contenter. Le tout menant aux événements tragiques entrevus précédemment, qui viendront mettre fin à toute l’intrigue, y compris les arcs narratifs non bouclés. Terrible.

(c) 2017 Netflix

Du coté de la distribution, pas grand chose non plus à se mettre sous la dent. Certains, fort heureusement, semblent concernés (Carey Mulligan et Jason Clarke, toujours bons) alors que d’autres sont transparents, à l’image de Mary J. Blige. La chanteuse new-yorkaise donne l’impression de traverser le film comme un fantôme, en s’ennuyant au moins autant que le spectateur devant cet enchaînement de plans étirés en longueur jusqu’à l’épuisement. Ce qui nous permettra d’aborder la mise en scène : morne, quasi platonique et entrecoupée dans sa première partie par quelques souvenirs de guerre qui aurait gagné à être suggérés plus que montrés, tant le manque de moyens se fait sentir.

Mudbound est la preuve qu’une thématique, aussi forte et engagée soit elle, ne se suffit pas à elle même, et que la forme doit être soignée, pour pouvoir se mettre au service du fond. Un potentiel terriblement gâché.