Moins par moins – LL De Mars - la chronique BD

Le scénario prend le temps d’installer les personnages. Alors que l’on pense avoir saisi les événements, l’histoire évolue de manière inattendue. Ce mode de narration, de rebond en rebond, jusqu’au dénouement final, joue sur le choc entre l’attendu et l’inattendu.
L’essentiel du récit passe par les dialogues, les échanges entre ces personnages que l’on ne voit pas.

LL De Mars / Rackham

En effet, les planches et les cases s’enchaînent. Le graphisme, travaillé, met en avant des silhouettes, des formes, des couleurs, mélangeant le tout, jouant sur les échelles, les distances, la répétition et les variations. Tout cela peut vraiment intriguer, voire perturber à la lecture. On se demande ce que l’on doit discerner dans ces formes, qu’est-ce que cela nous dit de l’histoire qui est en train d’être vécue par les personnages, pourquoi ce choix quasi-abstrait dans le dessin ?

Autant de questions qui, selon le sens que l’on donnera à l’aventure vécue par le personnage principal de ce récit, trouveront réponses, ou pas.
Pour vous conserver l’expérience complète, on ne peut rien vous dire de plus sur ce qui vous attend au détour des pages.

La question peut même se poser de savoir si graphisme et histoire sont si liés que cela dans cette BD ? Si l’un et l’autre ne seraient pas complètement déconnectés ? Pour nous, à un moment, les choses prennent sens. Mais nous ne pouvons garantir que c’est le sens auquel pensait LL de Mars.
Du coup, cette BD pourra en décontenancer plus d’un, car c’est à nous, lecteur, de lâcher nos a priori et de s’immerger dans ce Moins par moins, qui peut donner finalement plus à ceux qui auront la patience, la persévérance de lire cette histoire autant que de se plonger dans ses motifs parfois hypnotiques.

LL De Mars / Rackham

Le travail graphique de LL de Mars est pointu, précis, original, car ces formes abstraites ne sont pas de simples figures géométriques sur fond de couleur. Il s’agit d’un dessin minutieux de forme tracées, taillées, recopiées, répétées, modifiées, s’enchaînant parfois entre les cases, parfois rompant complètement d’une case à l’autre. Ce trait est si varié que lorsqu’on a l’impression de revoir la même chose, en regardant bien, on se rend compte que ce ne sont pas exactement les mêmes dessins. Des silhouettes humaines parcourent ces planches, silhouettes multipliées, formes identiques, parfois éthérées jusqu’à la disparition, parfois lourdes d’encre les rendant fortes, mais pourtant toujours silhouettes.

Moins par moins donne plus qu’une BD, le résultat est une expérience. Une expérience de lâcher prise, pour se plonger dans un récit sans concession, auquel on trouvera peut-être un sens, peut-être pas.