Millénium 3 - La reine dans le palais des courants d’air - La critique

Conclusion plutôt laborieuse de la saga noire venue du froid, où se bousculent tirades morales et détours narratifs alambiqués, sans grand sentiment de nouveauté ou d’originalité. Plutôt décevant pour cette fin de partie qui reste illuminée par son héroïne.

L’argument : Après avoir échappé de peu à la mort, Lisbeth Salander se retrouve immobilisée à l’hôpital, dans l’incapacité d’agir... De nombreux chefs d’accusation pèsent toujours sur elle et la font placer en isolement par la police, dans une chambre jouxtant celle de son père, qui la hait et qui n’est guère en meilleur état qu’elle... A l’extérieur, Mikael Blomkvist continue de mener l’enquête sans pouvoir avoir le moindre contact avec Lisbeth. Il ne tarde pas à mettre à jour certaines activités souterraines menées par les services secrets. Ce qui pourrait déstabiliser les hautes sphères de l’État mais surtout blanchir Lisbeth une bonne fois pour toutes.

Notre avis : Jamais deux sans trois : ça n’est peut-être pas une grande leçon de vie, mais en tout cas une règle assez commune des succès cinématographiques susceptibles d’engendrer des séries, à plus forte raison si les films sont eux-mêmes adaptés d’une série littéraire... Malheureusement, à de nombreux égards, ce Millénium 3 est l’épisode de trop, la touche de crème qui fait s’affaisser un plat déjà copieux, mais qui restait jusqu’ici appétissant. Sans faire étalage de quoi que ce soit du grand fracas de révélations qui concluait le volet précédent, on peut dire que le film s’inscrit dans sa continuité tant narrative que stylistique, tout en subissant un essoufflement sévère, et qui s’en ressent sur l’endurance du spectateur. Point de légèreté ici : à l’image de son héroïne grimée et coiffée à l’iroquoise dans une caricature de rébellion adulescente, le cinéaste empile les bons et grands sentiments, tartinés en abondance lors de longues tirades judiciaires, l’essentiel de l’action se déroulant sous la forme d’un procès. Dans tous les cas, il n’est pas question de prendre pitié des retardataires : malgré ses longueurs et son rythme didactique, Millénium 3 ne souffre pas d’expliquer outre mesure les ficelles les plus obscures de son récit aux spectateurs un peu distraits, qui devront retrouver tout seuls leur chemin dans les dédales généalogico-politiques de la vie de Lisbeth Salander. Avec maladresse, le scénario règle leur compte, dans le dernier quart d’heure, à tous les soubassements psychologiques et intrigues secondaires laissés de côté au cours du film, d’où une curieuse impression d’inachèvement pour cette saga pourtant fleuve...

© UGC Distribution

Car il est dommage que Millénium 3 vienne obscurcir les qualités de ses prédécesseurs, même si le film conserve quelques bons points. Encore une fois, l’oiseau de proie Noomi Rapace apporte suffisamment de conviction à un personnage déjà intéressant sur le papier pour que notre attention se maintienne jusqu’au bout sur le destin de Lisbeth Salander, bouc émissaire d’une société qui, selon la thèse de Larsson relayée par le film, essuie ses mains sales et douteuses sur les joues blanches des petites filles pas sages. Cependant, même ce filon de véhémence finit par s’épuiser, se perdant dans un sermon chevaleresque qui irrite son auditoire, davantage qu’il ne l’exalte. Le personnage auquel ressemble le plus le film est peut-être celui de Mikael Blomkvist, le journaliste désemparé interprété par un acteur apparemment ennuyé de son propre rôle : il erre dans l’irrésolution, rechignant à prendre une direction précise qui pourrait le relancer dans sa course. Selon des bruits de couloir plus qu’éventés dans le palais des courants d’air, David Fincher devrait réaliser une adaptation américaine de la trilogie noire et rouge : espérons que son tiercé sera, quant à lui, complètement gagnant.

– MILLENIUM 1, LA CRITIQUE ICI
– MILLENIUM 2, LA CRITIQUE ICI

© UGC Distribution