Vie de merde
Le 18 avril 2018
Milla est une marginale pleine de mélancolie. Le manque d’emphase avec lequel est filmé son quotidien, que celui-ci soit idéalisé ou au contraire affligeant, a au moins le bénéfice de rendre palpable son déplaisir.
- Réalisateur : Valérie Massadian
- Acteurs : Luc Chessel, Séverine Jonckeere, Valérie Massadian
- Genre : Romance, Expérimental, Drame social
- Nationalité : Français
- Distributeur : JHR Films
- Durée : 2h08mn
- Date de sortie : 25 avril 2018
- Festival : Festival de Locarno 2017
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Résumé : Milla 17 ans, et Leo à peine plus, trouvent refuge dans une petite ville au bord de la Manche. L’amour à vivre, la vie à inventer. La vie à tenir, coûte que coûte et malgré tout.
Notre avis : Il y a six ans, Valérie Massadian signait le portrait d’une petite fille prénommée Nana. Milla pourrait très bien être cette même gamine, désormais âgée de 17 ans. Davantage que le personnage, ce que l’on retrouve surtout c’est le minimalisme, tant formel que narratif, de la réalisatrice. Il lui suffit d’une chambre de quelques mètres carrés et d’une caméra pour filmer les conversations très littéraires d’un jeune couple, caricatures de la nouvelle génération de "bobo-intellos". Cette succession de plans fixes -qui n’est pas sans rappeler les débuts de Jim Jarmusch- et la superficialité des échanges qu’ils captent occupent la première moitié du film. Cette heure entière consacrée à cette vision très évanescente d’un amour de jeunesse peut sembler très longue, mais ce n’est que le début. La seconde moitié commence pourtant par une idée de mise en scène inattendue : un mouvement de caméra. Après une longue heure fixe, le premier travelling en arrive à sembler véritablement vertigineux.
- Copyright JHR Films
A mi-parcours la réalisatrice tente également une autre audace surprenante, celui de glisser là un passage musical. Une scène parfaitement inutile au niveau de la narrarion mais un intermède qui apparaît comme un souffle enjoué après cette première heure au rythme monocorde. Il s’agit surtout d’une preuve que Massadian n’a qu’une idée en tête, celle de faire fi de toute idée de dramaturgie. La deuxième heure du film suit toujours la petite Milla, mais que l’on retrouve cette fois après avoir été abandonnée par son Jules amateur de poésie après qu’il l’ait mis enceinte, et obligée de sortir de leur chambre pour se trouver un boulot. C’est ainsi qu’on la suit, toujours à travers une longue série de plans fixes, désormais bien moins verbeux, effectuer un contrat de femme de ménage dans un hôtel au coté d’une collègue qui apparaît comme une figure tutélaire et incarnée par Valérie Massadian elle-même. Cette seconde moitié s’apparente ainsi à un improbable "tuto aspirateur" où la superficialité viendrait à présent de la direction artistique très kaurismäkienne. Viennent s’ajouter à ceci quelques scènes consacrées au bébé dont Milla doit s’occuper, mais avec une froideur esthétique qui l’empêche de susciter la once d’intensité émotionnelle.
Malgré cette incapacité à trouver l’équilibre entre mélodrame intimiste et misérabilisme putassier, la rupture de ton qui se fait entre la première moitié, au contenu lyrique mais filmée avec un naturalisme âpre, et la seconde, qui s’apparente sur le papier à un drame social mais qui apparait à l’écran comme une expérience surréaliste, est tout de même une proposition singulière. Dommage que ce dispositif se fasse au milieu de deux longues heures anémiques.
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