Massoud, l’Afghan - le documentaire

Notre avis : C’est un film à la fois triste et noble, comme un accord de rubab. Le journaliste Christophe de Ponfilly, décédé en 2006, suit le mythique "Lion du Pandjchir", Ahmed Chah Massoud, alors sur la défensive, au nord-est de l’Afghanistan, tentant de contenir, avec ses fidèles moudjahidines - quelques centaines d’hommes qui s’illustrèrent déjà dans leur résistance à l’invasion soviétique - les assauts des talibans, au pouvoir en 1996. Ponfilly connaît bien Massoud, qu’il accompagne depuis son premier reportage dans le pays en 1981. Revenu plusieurs fois, il a saisi avec sa caméra les espoirs et les désillusions d’un pays ravagé par les guerres. En 1997, l’ancien ministre de la Défense du président Rabbani semble bien seul, même si le fol espoir de reprendre Kaboul, comme en 1992, ne l’abandonne pas dans un premier temps. La communauté internationale est alors indifférente au sort des Afghans livrés à une dictature fondamentaliste féroce.
Le réalisateur filme Massoud, sans le figer dans une vision mystificatrice, parce qu’il évoque aussi, à hauteur d’homme, le courage des combattants et, par le biais d’un commentaire sobre, porte une éthique engagée du reportage, qui pourfend toute forme de spectacularisation du réel. La pudeur du journaliste rencontre celle d’un homme qui se livre peu, parce qu’il déteste les interviews. Quelques confidences plus personnelles sont obtenues ici et là, mais, tout à sa lutte contre l’ennemi, le commandant de l’Alliance du Nord ne s’épanchera pas davantage sur les livres qu’il aime, sur sa vie intime, ne donnant pas vraiment suite à une lettre du reporter qui lui est adressée. Massoud l’Afghan assume son parti pris subjectif ("l’objectivité journalistique me semblait suspecte", "j’ai filmé ce que j’ai aimé") et rend hommage à un chef charismatique, mort assassiné, deux jours avant les attentats du 11 septembre, quatre ans après le tournage de ce documentaire.