Vertige sensoriel
Le 3 août 2005
L’enfant sauvage selon Shimizu : il est des voyages dont on ne revient pas.
- Réalisateur : Takashi Shimizu
- Acteurs : Shinya Tsukamoto, Tomomi Miyashita, Kazuhiro Nakahara
- Genre : Fantastique, Thriller
- Nationalité : Japonais
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– Durée : 1h32mn
– Interdit aux moins de 16 ans
L’enfant sauvage selon Shimizu : il est des voyages dont on ne revient pas.
L’argument : Masuoka est obsédé par les phénomènes de peur : d’où provient-elle et à quoi conduit-elle ? Il a filmé dans le métro le suicide particulièrement violent d’un homme dont le visage était marqué par une stupeur indicible. Ces images l’obsédant, il traque inlassablement dans les rues de Tokyo, caméra à la main, des éléments de compréhension. Ses recherches le conduisent à un monde souterrain, surnaturel et inquiétant...
Notre avis : Il vaut mieux savoir ce que l’on va voir avant d’assister à la projection de Marebito. Sur le papier, on a l’histoire d’un homme qui se lance dans la quête de la terreur ultime et tombe sur une étrange découverte qui va bouleverser son néant existentiel. En substance, c’est une plongée en apnée dans un monde ultra-violent où planent les ombres du mal-être, de la frustration, de la peur de l’inconnu. Le résultat est très singulier, réaliste et efficace. Beau comme un cauchemar opaque, dont on ne réussit pas à se remémorer les images. Cru comme un délire surréaliste.
S’inscrivant aux antipodes des codes narratifs, Takashi Shimizu (The grudge) a au moins le mérite d’affirmer qu’il est capable de distiller une atmosphère inquiétante autrement qu’en refaisant à l’envi le même film. Le constat est plus rassurant que le film qui, un peu à la manière de Tetsuo, instaure un climat oppressant et inconfortable. De manière très aléatoire et donc surprenante, Shimizu enchâsse les séquences perturbantes en s’attaquant entre autres aux mythes des légendes urbaines et du monde souterrain tokyoïte. Sa dérive convenue (le personnage perd tous ses repères) est traduite à l’écran de la manière la plus factuelle qui soit. Les dialogues sont rares et tout est perçu du point de vue du protagoniste. Cela revient à dire que s’il est fou, nous le sommes également puisque nous voyons tout ce qu’il voit. De manière à représenter cette schizophrénie, le personnage filme en même temps qu’il est peut-être filmé. Dans le rôle principal, l’idéal Shinya Tsukamoto renforce - par ce qu’il incarne - l’aspect hallucinatoire de cette virée glauque où se dessine, en creux, une réflexion sur le pouvoir de l’image et la fascination qu’elle exerce. Le recours à la DV et à la caméra subjective sont des atouts parce qu’ils épousent le concept minimaliste.
La seconde partie, moins prosaïque, plus ancrée dans le fantastique, exploite l’hypothèse selon laquelle des créatures fantastiques sont réfugiées dans les bas-fonds de Tokyo. Le fait que l’une d’elles pénètre directement dans le monde réel démontre que le personnage ne fait plus de distinction entre ce qui relève de l’onirisme et du réel. De manière à ménager le suspense, Shimizu utilise des ficelles proches de celles de Polanski en jouant à la fois sur l’enfermement et l’impression paranoïaque d’être épié, et assume avec un courage monstrueux les notions de vampirisme physique et intellectuel.
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