Ma vie d’artiste - La chronique BD

Il faut une sacrée dose de courage pour embrasser une carrière d’artiste. Tout d’abord, il faut lutter pour faire accepter son choix à la famille, surmonter quelques douloureux souvenirs ou choisir la bonne école. Une fois dans l’école, excellent chapitre, sinon le meilleur, il faut s’imposer, combattre la fatigue, découvrir ses affinités... Enfin, se lancer dans le monde du travail, galérer, bifurquer, galérer encore, évoluer, se chercher et se trouver au final. Les étapes suivent un ordre chronologique, des influences de l’enfance jusqu’aux bureaux des éditions Delcourt, mais les épaisseurs des chapitres diffèrent, les idées fourmillent, vont et viennent, avec parfois des ellipses, parfois un petit flashback, mais un ensemble qui se révèle finalement assez cohérent, lisible et surtout très intéressant. Après un début un peu chaotique, très sentimental et personnel, les étapes de la vie d’adulte sont terriblement captivantes, témoignage plutôt inédit, d’une vie plus dessinée vive qu’écorchée vive.

© Delcourt

Toutefois, et l’on s’en aperçoit assez rapidement, la force de l’album réside non pas dans sa partie biographique scénaristique, mais dans son aspect biographique... graphique. En effet, Mademoiselle Caroline a choisi d’adapter chaque tranche de sa vie à son coup de crayon de l’époque. Une prouesse rendue possible par ses carnets de dessins gardés au chaud pour cette entreprise digne des Essais de Montaigne. Véritable évolution graphique de la première à la dernière page, le style se développe, prend ses aises, revient à ses premiers amours, s’étoffe pour devenir ce qu’il est aujourd’hui : une belle icône de la BD d’aujourd’hui.

© Delcourt

Fresque biographique d’une dessinatrice qui se penche sur des tableaux de dizaines de pages de sa propre vie, en y donnant sa patte et son pouls, Ma vie d’artiste est également un précieux témoignage des aléas et de la détermination nécessaires pour ce métier.