M. Popper et ses pingouins - la critique

Une comédie pour enfants sympathique, mais qui sacrifie un peu vite sa fantaisie au conformisme familial.

L’argument :Enfant, Tommy Popper attendait impatiemment les occasions de parler par radio à son père, un explorateur toujours parti aux quatre coins du monde. Des années plus tard, Popper est devenu un brillant promoteur immobilier à Manhattan. Sa réussite lui a coûté son couple : divorcé d’Amanda, il ne voit plus ses enfants qu’un week-end sur deux. M. Popper mène une vie solitaire et luxueuse dans son appartement ultramoderne de Park Avenue, et il est sur le point de devenir un des associés de la prestigieuse firme qui l’emploie. Mais lorsqu’un matin, il reçoit l’ultime cadeau de son père décédé - un pingouin vivant, sa vie bascule. En cherchant à se débarrasser de l’animal, M. Popper va juste réussir à en récupérer cinq autres. Alors que les adorables bestioles transforment peu à peu son appartement en banquise, M. Popper voit sa vie déraper. Tout va y passer : le contrat de ses rêves, ses relations, sa vie. Mais grâce à six petits pingouins, M. Popper va découvrir que le bonheur peut aussi faire boule de neige...

Notre avis : Comme Popper, vous pensiez que la réussite professionnelle suffirait à combler l’absence d’un père trop occupé à voyager aux quatre coins du globe ? Et si, en le croyant, vous aviez négligé votre propre famille et reproduit le schéma paternel ? Rien de tel, pour vous en faire prendre conscience, qu’une bonne livraison de pingouins en guise d’héritage. C’est à partir de cet argument a priori invraisemblable que M. Popper trouve d’abord un rythme plaisant. Bien entendu le film, volontiers caricatural et pétri de bons sentiments, entend surtout s’adresser à un jeune public, mais si l’on accepte de se laisser entraîner par la fougue d’un Jim Carrey toujours impeccable - encore que sa performance soit ici discrète au regard de son charisme habituel - alors on pourra être séduit par le comique de certaines situations et l’invraisemblance plutôt fantaisiste de l’ensemble.
Le charme de M. Popper tient essentiellement à son casting, et notamment au couple formé par Carrey et Carla Gugino (avec des seconds rôles efficaces, comme Angela Lansbury en riche new-yorkaise acariâtre mais philanthrope). Les personnages sont aussi schématiques que les caractères attribués aux différents manchots, mais le film se regarde d’abord sans déplaisir. Problème : l’intrigue est trop prévisible et manque d’enjeux. Les menaces qui pèsent sur cette famille demeurent bien fragiles et n’éveillent pas vraiment d’inquiétude chez le spectateur, d’autant que les "méchants" (employés du zoo notamment) sont souvent incarnés par des acteurs faibles. A mesure que l’intrigue progresse, le manque d’audace se substitue ainsi à la fantaisie des premières minutes, que ce soit dans le discours de fond (ultra-conventionnel) ou dans les partis pris esthétiques (mise en scène plate). Les dialogues deviennent irritants à force d’être explicatifs, particulièrement lorsqu’il s’agit d’insister sur la valeur métaphorique des pingouins - reflet de la famille idéale - et la leçon d’humanité qu’ils sont supposés apporter au personnage de Tom Popper.

Pour le coup, la valeur didactique de l’ensemble aurait gagné à être plus atténuée, peut-être en évitant la dispersion dans de trop nombreuses intrigues qui finissent par ennuyer tant elles se noient dans un même conformisme. Les personnages ne sont pas suffisamment mis en danger pour que l’on puisse s’identifier à eux. Restent bien sûr un hommage discret à Chaplin, quelques passages drôles et surtout la figure de Jim Carrey, véritable monstre de charisme ici tenu en bride mais toujours susceptible de donner de l’intérêt à un divertissement quelconque. M. Popper en est peut-être une preuve supplémentaire, et se regardera comme une comédie familiale très plaisante, mais très lisse.