Le 8 avril 2015
Présenté au grand public avec un nouveau montage, Lost River, premier long-métrage de Ryan Gosling découvert lors du Festival de Cannes 2014, avait une nouvelle chance pour nous convaincre.
- Réalisateur : Ryan Gosling
- Acteurs : Saoirse Ronan, Barbara Steele, Ben Mendelsohn, Christina Hendricks, Iain De Caestecker
- Genre : Fantastique, Thriller
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h35mn
- Âge : Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs
- Date de sortie : 8 avril 2015
- Plus d'informations : Site du distributeur
- Festival : Festival de Cannes 2014
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Présenté au grand public avec un nouveau montage, Lost River, premier long-métrage de Ryan Gosling découvert lors du Festival de Cannes 2014, avait une nouvelle chance pour nous convaincre. C’est presque gagné : Lost River s’avère être un long-métrage au scénario des plus intrigants, onirique et original, mais à travers lequel on perçoit encore les tâtonnements d’un réalisateur qui cherche son identité visuelle et cinématographique.
L’argument : Dans une ville qui se meurt, Billy, mère célibataire de deux enfants, est entraînée peu à peu dans les bas-fonds d’un monde sombre et macabre, pendant que Bones, son fils aîné, découvre une route secrète menant à une ville engloutie. Billy et Bones devront affronter bien des obstacles pour que leur famille s’en sorte.
Notre avis : Très attendu, Lost River aura fait une première apparition sur la Croisette lors du Festival de Cannes 2014, sélection Un Certain Regard, avant de sortir sur les écrans français sous un nouveau montage. Pour ses débuts derrière la caméra, Ryan Gosling s’est entouré d’une équipe relativement réduite mais très efficace – Beth Mickle, chef décoratrice ayant travaillé sur Drive et Only God Forgives, Erin Benach, chef costumière dont le travail a pu être observé dans Blue Valentine, The Place Beyond the Pines et Drive ou encore le compositeur Johnny Jewel qui avait auparavant travaillé sur…Drive – avec pour but de faire de Lost River un long-métrage dans la veine du cinéma indépendant américain, un projet modeste dans ses moyens mais en tout autre point ambitieux. Il est vrai à ce titre que l’aspect visuel du premier long-métrage de Ryan Gosling impressionne d’emblée par son esthétique travaillée, traduisant un véritable attachement à la composition de l’image et aux couleurs, presque expressionnistes – l’on pense notamment aux scènes de cabaret, qui transportent le spectateur dans un univers hors du temps où violence insidieuse et beauté vont de pair.
© Le Pacte
La patte du directeur de la photographie Benoît Debie, dont les couleurs saturées et acidulées avaient fait leurs preuves dans Spring Breakers, est ici reconnaissable, tout comme les inspirations visuelles et cinématographiques du réalisateur. Ce qui fait la force de Lost River fait aussi sa faiblesse dans la mesure où Ryan Gosling semble parfois privilégier un côté esthétisant et maniériste de l’image à sa mise au service du récit. Le spectateur pourrait ainsi être rapidement lassé de la tendance fétichiste de Gosling à filmer divers objets brûlant au ralenti (vélo, maisons, meubles, voitures…). Il en résulte par ailleurs un léger manque d’unité visuelle, principalement lors des premières séquences du film où l’on a l’impression que le réalisateur se cherche entre la caméra aérienne de Terrence Malick dans Tree of Life (un enfant courant dans l’herbe, les flares, les plans dans la maison familiale dégradée) et l’image plus nerveuse de Derek Cianfrance (on pense ici à la courte scène où Bones parle à un voisin qui décide de quitter la ville) pour finalement rejoindre la stabilité envoûtante déployée par Nicolas Winding Refn dans Only God Forgives. L’ambiance générale du film dénote également la forte influence d’un cinéma américain de l’étrange et du macabre, où plane en premier lieu l’ombre de David Lynch.
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Il faut cependant souligner que le réalisateur et son équipe auront brillamment réussi à tirer parti de la ville de Detroit. Après Only Lovers Left Alive et It Follows, la ville en ruines reste sans aucun doute une source d’inspiration inépuisable pour l’imaginaire des cinéastes. Lost River se distingue ainsi par le soin apporté aux décors, qui embarquent immédiatement le spectateur dans ce monde urbain où le temps est suspendu et où la déliquescence des lieux entraîne la décadence des mœurs. A cela s’ajoute un scénario troublant et original écrit par Gosling, qui fait le choix d’une intrigue simple mais rendue riche et complexe par la mise en scène. Le caractère onirique de cette dernière, entremêlant rêve et cauchemar, crée une tension angoissante à l’écran. Les scènes du lac et de la ville engloutie, revêtant une dimension allégorique, sont à cet effet parmi les plus réussies du film. L’efficacité et la beauté de Lost River reposent également sur la performance de ses acteurs. Christina Hendricks dans la peau de Billy, mère célibataire qui va s’aventurer dans un monde inconnu et étrange pour subvenir aux besoins de sa famille, forme un tandem intéressant entre domination et soumission avec Ben Mendelsohn, dans le rôle de Dave. Si le personnage de Bones, interprété par Iain de Caestecker, montre quelques faiblesses, la performance de Saoirse Ronan dans le rôle de Rat et leur intrigue amoureuse en filigrane s’avèrent être deux points forts du film. Dans des rôles secondaires mais loin d’être anecdotiques, Eva Mendes, en vedette du cabaret des horreurs, et Reda Kateb, sorte de Charon qui mène Billy vers le royaume souterrain, tirent leur épingle du jeu pour contribuer à l’atmosphère singulière du film.
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En plus d’être un acteur de talent, Ryan Gosling montre en réalisant Lost River une maîtrise de la mise en scène et un sens certain de la direction d’acteur. Toutefois, le réalisateur gagnerait peut-être à aller dans le sens d’une plus grande sobriété de l’image afin de servir le développement dramatique de l’intrigue. C’est donc avec impatience que l’on attend le prochain long-métrage de ce réalisateur prometteur, en espérant qu’il réussisse à développer une esthétique cinématographique qui lui soit propre.
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