Le 30 juin 2020
Entre avant-garde et cinéma d’exploitation, ce film de vampires chic cherche sa voie et s’apprécie pour ses effets de style et le jeu sophistiqué de Delphine Seyrig.
- Réalisateur : Harry Kümel
- Acteurs : Delphine Seyrig, John Karlen, Danielle Ouimet, Andrea Rau, Paul Esser, Georges Jamin
- Genre : Fantastique, Épouvante-horreur, Romance, Érotique, LGBTQIA+, Film de vampire
- Nationalité : Français, Allemand, Belge
- Distributeur : Malavida Films
- Editeur vidéo : Malavida
- Durée : 1h27mn
- Reprise: 22 juin 2020
- Âge : Interdit aux moins de 16 ans
- Date de sortie : 25 novembre 1971
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Résumé : Valérie et Stefan, immobilisés à Ostende, séjournent dans un vaste hôtel désert en cette morte-saison. Le couple fait alors la connaissance de l’inquiétante comtesse Bathory et de sa protégée Ilona, ténébreuses créatures de la nuit. Elles envoûtent d’abord le jeune homme, fasciné par des meurtres mystérieux perpétrés dans la région, puis Valérie, intriguée par l’étrange relation qui unit les deux femmes…
Critique : Fondateur du FILMGROUP 58 d’Anvers, à l’origine de toute une génération de cinéastes flamands, Harry Kümel avait réalisé des courts métrages expérimentaux ainsi qu’un premier long, Monsieur Hawarden (1969), qui n’avait connu qu’une audience confidentielle. Les Lèvres rouges est, avec Malpertuis (1972), son métrage le plus célèbre, et les deux œuvres se sont bonifiées avec les années, devenant l’objet d’un culte. Coproduction franco-germano-belge, le film est en langue anglaise dans sa version originale, sans doute en raison de la présence au casting de l’Américain John Karlen dans le rôle masculin principal, et afin de cibler le marché anglophone. Coécrit avec Pierre Drouot et Jean Ferry, le scénario des Lèvres rouges n’est a priori guère palpitant et original : des jeunes mariés en stand-by dans un hôtel de luxe désaffecté, une comtesse étrange et séductrice, que l’on devine mêlée à une histoire de meurtres, un policier qui mène l’enquête sur une série d’assassinats dans la région…
- © Malavida
Cela pourrait s’apparenter à un scénario de série B, voire Z, comme il en fleurissait dans le cinéma d’exploitation de l’époque ; le moindre synopsis d’une production Hammer fauchée s’avérait bien plus imaginatif. Mais l’essentiel n’est pas là, tant il est clair qu’une lecture au premier degré de la narration pourra laisser de marbre. Harry Kümel préfère transcender ce matériau, et distiller une atmosphère onirique et ésotérique, misant sur l’étrangeté des situations et des personnages, et tentant une synthèse entre l’univers avant-gardiste d’un Alain Robbe-Grillet et les délires visuels des gialli de Dario Argento ou Mario Bava. Mêlant avec habileté plusieurs autres genres, du film de vampires à la romance érotique, Les Lèvres rouges bénéficie d’une photographie splendide et d’une musique envoûtante composée par François de Roubaix, qui rend hommage aux stridences de Bernard Herrmann dans Psychose de Hitchcock (un film auquel semble également se référer une mortelle scène de douche).
- © Malavida
D’autres séquences hanteront les esprits bien après la projection, de la plage d’Ostende désertée aux déambulations de la comtesse dans le palace, en passant par le mystérieux coup de téléphone donné par Stefan à « sa mère ». Objet distancié et hybride, Les Lèvres rouges connut à sa sortie un succès d’estime, que l’on peut imputer à ses scènes sulfureuses, mais peina à convaincre la presse, hermétique à ce mélange de poésie et de cinéma bis, qui n’était pas très tendance à l’époque. Avec le recul, l’œuvre exerce un réel pouvoir de fascination, même s’il ne s’agit pas de la réévaluer excessivement : son kitsch assumé et ses afféteries pourront toujours rebuter. L’unanimité a lieu toutefois quant au jeu de la divine Delphine Seyrig. Celle qui fut, avec Jeanne Moreau, la plus grande actrice française de sa génération, vampirise également le spectateur et établit une réelle complicité avec la caméra.
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