Les drapeaux de papier - la critique du film

Copyright Sensito Films

Notre avis : Entre 12 et 18 ans, Nathan Ambrosini réalise en amateur plusieurs courts-métrage au goût de cinéma d’horreur. Il découvre ensuite la filmographie du canadien Xavier Dolan (un autre cinéaste précoce) et apprend du même coup qu’il est possible de se lancer très jeune dans une carrière de réalisateur sans pour autant devoir passer par les chemins obligés. A 17 ans, il s’inspire d’un fait divers qui dresse le portrait d’un prisonnier totalement démuni après voir purgé sa peine et entame l’écriture d’un scénario autour de la notion de liberté. Ainsi naît une solide chronique sociale et familiale qui ne se contente pas de séduire par sa maturité mais offre aussi à Guillaume Gouix l’un de ses plus beaux rôles. Habitué des formats courts, ce jeune réalisateur sait d’emblée aller à l’essentiel et c’est donc à travers une histoire dont la simplicité fait la force qu’il raconte la trajectoire de ces personnages ordinaires aux allures de héros.

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Quand Vincent (Guillaume Gouix), le crâne rasé, l’air égaré, frappe à la porte de sa sœur (Noémie Merlant), un malaise diffus s’installe. Elle l’accueille sans effusion et accepte de l’héberger, plus poussée par le devoir fraternel que par le bonheur de ses retrouvailles encombrantes. Pas vraiment rassurée, elle se calfeutre dans sa chambre et impose quelques règles de bonne conduite, entre autre l’obligation pour Vincent de trouver rapidement un travail. Car si elle aspire à devenir graphiste, elle ne survit pour l’instant que grâce à un maigre salaire de caissière de supermarché et habite un appartement exigu. Commence alors entre le frère et la sœur une cohabitation forcée dominée par les réactions impromptues de ce voyou au cœur tendre (interprété par un Guillaume Gouix totalement habité par le personnage) qui tente maladroitement de se reconstruire entre révolte et raison auxquelles sa sœur (Noémie Merlant vibrante de lucidité et de sensibilité contenue) s’efforce de répondre. S’instaure alors une complicité explosive autour de ce duo authentique à qui l’on doit les beaux moments d’émotion.

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Soucieuse de ne pas accabler plus que de raison ce jeune paumé, l’histoire a la pudeur de ne dévoiler que tardivement et par bribes les faits qui l’on conduit en prison. Les dialogues s’effacent pour laisser toute la place à une mise en scène qui privilégie les gros plans sur les visages des comédiens de manière à nous faire partager au plus prés leurs sentiments. Avec une précision d’orfèvre, le réalisateur décrypte les limites de la solidarité familiale et la peur qu’un être marginalisé -fut il votre fils ou votre frère- fait naître chez les autres. L’inoubliable scène de la rencontre père/fils au climat férocement rigide rend compte sans compromis de la profondeur du fossé jeté entre ces deux hommes pourtant unis par les liens du sang.
Malgré la lourdeur du sujet, notre cinéaste prometteur réussit le tour de force de ne jamais s’égarer vers des voies obscures et de déjouer astucieusement le piège d’une violence excessive, allant même jusqu’à s’offrir le luxe d’une conclusion optimiste.