Le 15 octobre 2023
À travers le parcours d’une femme dans l’Iran contemporain, Leila est une tragédie qui ne comporte que des victimes. Fort et sobre.
- Réalisateur : Dariush Mehrjui
- Acteurs : Leila Hatami, Ali Mosaffa, Jamileh Sheikhi
- Genre : Drame
- Nationalité : Iranien
- Distributeur : Splendor Films
- Durée : 2h00mn
- Date de sortie : 6 décembre 2017
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– Année de production : 1996
Résumé : Leila et Reza, couple moderne iranien, sont ravis de leur mariage récent. Lorsque la mère de Reza apprend la stérilité de sa belle-fille, elle entreprend de convaincre son fils de changer d’épouse. L’oppression de cette mère étouffante et le poids de la tradition semblent mener droit à l’effritement du couple.
Critique : On ne peut s’empêcher en regardant Leila de s’agacer de coquetteries rattachées au cinéma moderne, depuis les adresses à la caméra jusqu’aux fondus au rouge, qui jurent par rapport à la rigueur toute classique de l’ensemble, et dont la densité de l’intrigue pouvait se passer. Maigres reproches pour un drame aussi poignant, maîtrisé et fort, que l’on suit la boule au ventre, happé par une situation inextricable et pour tout dire tragique.
- Copyright Splendor Films
Les premiers plans montrent une réunion de famille autour d’un plat traditionnel, qui reviendra à la fin comme une boucle de maigre espoir. Mais une voix-off, celle de Leila, nous informe du problème dont le film ne s’écartera quasiment plus : elle est stérile dans une société prompte à répudier. Son mari l’aime, accepte de ne pas être père, mais la belle-famille s’immisce dans la vie du couple et par un jeu subtil de lamentations et d’appels à la raison va dissoudre un amour réel dans une situation intenable. Leila, pour montrer cette évolution délétère, alterne des séquences en multiples variations : le couple dans la voiture ou chez eux, les réunions de famille, les dialogues belle-mère/fille. Si le système peut paraître limité, la subtilité de ces variations, appuyées par des symboles discrets, construit un crescendo oppressant d’une richesse insoupçonnée : ainsi voit-on des embouteillages au moment où la vie du couple est bouchée ; ainsi les prétendantes sont-elles hors-champ jusqu’à ce que la future mariée soit visible par Leila. Il faut dire que son point de vue est quasiment exclusif, et que ses pensées (parfois envahissantes) nous sont connues.
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Le film joue avec finesse sur des motifs récurrents, comme le téléphone et la panique qu’il suscite, les colliers et les perles, ou encore la nourriture qui prend une importance capitale. Mais ces motifs ne seraient rien sans l’aspect tragique, qui intervient sous la forme de « fatalité » dans les dialogues, et sans l’interprétation impeccable. Le cinéaste y décrit une société partagée entre modernité et tradition, dominée par des pratiques ancestrales et le diktat des apparences, et dans laquelle, comme le disait Renoir, « chacun a ses raisons ». Chacun y agit presque malgré lui, contraint par des obligations sociales, ce qui ajoute au caractère déchirant que Mehrjui enregistre avec une froideur étudiée, faite de plans soigneusement cadrés et de travellings précis. Il ôte de son métrage toute facilité, tout pathos, choisissant l’absence de musique extra-diégétique et la succession de dialogues retenus plutôt que les séquences dramatiques bercées de violons. Alors oui, malgré quelques tics gênants, Leila est une tragédie contemporaine de toute beauté, poignante et implacable.
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