Tigres et yogis
Le 21 décembre 2011
Mise en scène avec un sens sûr du spectaculaire feuilletonnesque et des moyens impressionnants la première adaptation du roman de Thea von Harbou garde un irrésistible pouvoir d’envoûtement.
- Réalisateur : Joe May
- Acteurs : Paul Richter, Erna Morena, Bernhard Goetzke, Conrad Veidt, Mia May, Lya de Putti, Olaf Fønss
- Genre : Aventures, Film muet
- Nationalité : Allemand
- Durée : 4h ( 2h10mn + 1h50mn)
- Titre original : Das indische Grabmal
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– Premier volet : Die Sendung des Yoghi (sortie en Allemagne : 22 octobre 1921)
– Deuxième volet : Der Tiger von Eschnapur (sortie en Allemagne : 17 novembre 1921)
Das indische Grabmal - afficheMise en scène avec un sens sûr du spectaculaire feuilletonnesque et des moyens impressionnants la première adaptation du roman de Thea von Harbou garde un irrésistible pouvoir d’envoûtement.
L’argument : Le maharadjah d’Eschnapur envoie le Yogi Ramigani en Angleterre, auprès de l’architecte Herbert Rowland. celui-ci doitconstruire un tombeau monumental pour l’épouse du maharadjah. Rowland suit le Yogi en Inde et laisse à sa fiancée Irène une lettre que Ramigani fait disparaître. Irène parvient néanmoins à retrouver les traces de son fiancé et part elle aussi pour l’Inde.
Le maharadjah révèle à Rowland que Savitri, son épouse, est vivante, enfermée dans ses appartements...
Notre avis : Sensiblement différent de celui des deux versions ultérieures, signées Richard Eichberg (1938) et Fritz Lang (1958), le scénario de cette première adaptation du roman de Thea von Harbou Das indische Grabmal (1918) associe un esprit feuilletonnesque de récit d’aventures exotiques à un mysticisme orientalisant et réunit des ingrédients qui avaient déjà fait le succès des films précédents du producteur et réalisateur Joe May, en particulier le serial en huit épisodes Die Herrin der Welt (1919).
Les moyens logistiques mis en oeuvre pour cette véritable superproduction sont impressionnants : casting de stars entourant la vedette maison Mia May, décors de Otto Hunte et Erich Kettelhut reproduisant en grandeur nature des temples et des palais indiens à Woltersdorf près de Berlin, tigres et éléphants empruntés au Cirque Sarrasani, foule de figurants.
- Bernhardt Goetzke - Mia May
Il semble d’ailleurs que ce soit les risques (et accessoirement le prestige) liés au budget faramineux de l’entreprise qui ait incité Joe May à se charger lui-même de la réalisation, remplaçant Fritz Lang initialement prévu sous prétexte que ce dernier, qui avait pourtant déjà fait ses preuves, était trop jeune et inexpérimenté.
Le résultat est sans doute moins rigoureusement architecturé, plus inégal que le film que Lang aurait pu réaliser et dont la version admirable de 1958, tournée dans des conditions très différentes, ne peut guère donner une idée. Mais Joe May, plus préoccupé certes d’effets spectaculaires que de cohérence profonde, est loin d’être un cinéaste négligeable et si certaines facilités et retournements dramatiques trop attendus font sourire, l’ensemble, animé d’un vrai souffle romanesque, ne manque pas d’allure.
Une atmosphère de rêve éveillé traverse le film, en particulier lors de la magnifique séance d’errance nocturne de l’héroïne, et plus d’un passage impressionne par un souci de réalisme du détail non exempt d’une touche de voyeurisme morbide, bien dans l’esprit forain du cinéma des attractions des origines, par exemple dans le prologue montrant l’exhumation du yogi qu’on ramène à la vie en lui tirant la langue, ou lorsqu’on voit longuement les rats grouillants sur la poitrine du prisonnier ligoté dont ils vont ronger les liens.
Das indische Grabmal - Conrad Veidt
Das indische Grabmal - Mia May
La touche fantastique, un peu gommée dans les versions ultérieures, est omniprésente et Bernhard Goetzke confère au personnage, ici central, du yogi Ramigani une présence aussi hallucinante que celle qu’il conférera à la figure de la Mort dans Les trois lumières.
Seul Conradt Veidt, autre cabotin génial, parvient à lui voler la vedette en Maharadjah névrosé habité par son idée fixe de vengeance. Mais les autres ne déméritent pas, en particulier Mia May qui , bien qu’un peu âgée pour son rôle, mène la danse avec la fausse vulnérabilité et la vraie détermination requises et Paul Richter (futur Siegfried pour Lang) se démène comme un beau diable dans des scènes d’action souvent acrobatiques.
Bref : le frisson de l’étrange et du grand spectacle souffle sur les quatre heures (en deux volets) de ce Tombeau hindou qui garde un fort pouvoir d’envoûtement.
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