Le 20 novembre 2017
- Plus d'informations : La radio du sale
Voilà un peu plus d’un an qu’a débarqué Le Règlement sur YouTube, pour apporter un surplus d’intérêt dans le milieu des critiques rap de YouTube, trôné par cette tendance sans intérêt des premières écoutes. Focus sur cette chaîne qui mérite définitivement le coup d’œil.
Il aurait été bien difficile de penser fin septembre 2016 que Le Règlement, à l’approche de 2018, aurait à son actif plusieurs chroniques musicales, des freestyles, et une application radio du même nom. En peu de temps finalement, la chaîne est devenue un acteur important du rap francophone profitant de sa notoriété grandissante auprès des amateurs du genre musical pour servir de trampoline (celui de Community) à des artistes débutants ou plus confirmés. Sa radio, d’abord en streaming sur YouTube avant de débouler sur Android et Apple à la demande des auditeurs, agit comme une plate-forme à la portée significative pour des MC’s de tout horizon de pays francophone et de tout horizon stylistique. Boom bap, trap, auto-tune, pas auto-tune, gros kickeurs, rap qui tâche ou rap ambiant se suivent sans aucune pub – la radio vivant de ses dons – conviant les aficionados à digger comme le staff de la chaîne pour (re)découvrir et s’ouvrir à ceux qui ont fait le rap d’hier, qui font le rap d’aujourd’hui et qui feront celui de demain. Guidée par son envie de partage - chaque auditeur pouvant proposer ses kiffs - Le Règlement se caractérise par le lien très fort qu’elle entretient avec sa miff (aujourd’hui de presque 230 000 abonnés), à l’écoute des propositions de chacun pour alimenter sa radio, ses freestyles et bien sûr ses sujets d’analyse. A contenu hétéroclite son public hétéroclite, assez éloigné des débats régissant parfois le genre jusqu’à la dichotomie de son public. Il y a du bon à prendre comme du mauvais, et ce dans chaque branche du rap, et la radio ne se prive bien évidemment pas de piocher dans cette diversité pour y extraire du sale.
Davodka côtoie Tengo John, Lunatic, Népal, Columbine (difficile de les oublier), et la liste est extrêmement longue, avec une part belle aux freestylers émergents. Une ligne directrice au Règlement : proposer du sale, érigé au fil des chroniques comme une véritable valeur. Mais plus que d’en proposer par sa radio et ses freestyles ultra-propres dans les exécutions, Le Règlement, là est son origine première, le décortique par le biais d’analyse aux qualités indéniables, et surtout croissantes depuis sa première chronique sur Django. D’une vidéo comparative somme toute assez basique mais pas inintéressante évaluant le degré de plagiat du jeune rappeur algorithme (allez, on est de mauvaise foi, il se détache de plus en plus de ça), Le Règlement a posé les bases formelles de son univers. Car chose très rare sur YouTube, c’est avec une patte bien reconnaissable que Max Brodi (le mec à l’origine de la chaîne) aborde de gros morceaux du rap francophone, basée sur un montage aussi ultra-référencé et soigné que peuvent l’être ses textes. Poussé par l’amour qu’il porte envers ses sujets d’analyse, le créateur de la chaîne prend son temps pour construire comme des dissertations (mot qui fait peur) ses réflexions tellement bétons qu’il peut glisser sans pression des rapprochements entre Les Quatre Cent Coups et Enfants Terribles de Columbine. En s’attaquant dans le plus grand sérieux à des artistes comme Damso, Vald ou encore Hugo TSR, Le Règlement donne la plus grande des importances à des artistes souvent sous-estimés et victimes de préjugés réducteurs.
On peut ne pas toujours partager l’avis de la chaîne lorsqu’elle évoque certains artistes (surtout lorsqu’elle en diffuse), mais rares sont les fois où l’argumentaire ne fait pas mouche. Les nombreuses comparaisons avec une culture que certains jugeraient plus « noble » fonctionnent et contribuent à cette ambition de donner au rap ses lettres de noblesse encre violette, alors que le genre musical continue de subir les dénigrements de médias bloqués dans leur petit monde étriqué. Dans ce grand sérieux pour analyser ses sujets, Le Règlement n’en oublie pas pour autant de les rendre attractif et accessible. Aucune prétention n’émane de ces chroniques et c’est avec un langage décontracté et clair que Brodi déroule son argumentaire (souvent en 5 sections, intro, 3 parties, conclu, classique, efficace) consolidé par un montage ludique et culturellement varié. Avec un humour absurde voire flegmatique, cet inconditionnel de rap accompagne ses images pleines de sens de punchlines pince-sans-rire, de références décalées sur des thèmes également très empruntés par le genre musical (les jeux vidéo avec Pokémon, le sport avec le bilboquet, le cinéma avec Kill Bill et bien plus encore). Finalement, tout dans ses chroniques et dans cette entreprise à but non-lucrative respire le hip-hop comme on l’aime, du langage, de la convivialité, du sens dans les textes, de l’énergie dans la forme, bref : du sale. Du très très sale.
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