Au marqueur rouge
Le 30 octobre 2013
Un film militant retraçant l’Histoire des révoltes qui agitèrent le monde à la fin des années 60.
- Réalisateur : Chris Marker
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Durée : 3hOO
- Titre original : Le fond de l’air est rouge
- Date de sortie : 30 octobre 2013
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- Année de production : 1977
- Nouvelles versions de montage : 1978, 1988, 1996, 1998
- Version définitive : 2008
Un film militant retraçant l’Histoire des révoltes qui agitèrent le monde à la fin des années 60.
L’argument : On a tendance à croire que la Troisième Guerre mondiale commencera avec le lancer d’un missile nucléaire. Je pense plutôt qu’elle s’achèvera ainsi. D’ici là continueront de se développer les figures d’un jeu compliqué dont le décryptage risque de donner du boulot aux historiens de l’avenir, s’il en reste.
C’est un jeu bizarre, dont les règles changent au fur et à mesure de la partie, où la rivalité des superpuissances se métamorphose aussi bien en Sainte-Alliance des riches contre les pauvres qu’en guerre d’élimination sélective des avant-gardes révolutionnaires, là où l’usage des bombes mettrait en danger les sources de matières premières, qu’en manipulation de ces avant-gardes elles-mêmes pour des buts qui ne sont pas les leurs. Au cours des dix dernières années, un certain nombre d’hommes et de forces (quelquefois plus instinctives qu’organisées) ont tenté de jouer pour leur compte - fût-ce en renversant les pièces. Tous ont échoué sur les terrains qu’ils avaient choisis. C’est quand même leur passage qui a le plus profondément transformé les données politiques de notre temps. Ce film ne prétend qu’à mettre en évidence quelques étapes de cette transformation. (Préface de la sortie en 1977, Chris Marker)
Notre avis : Ce mercredi 30 octobre 2013 reprise dans les salles d’une version restaurée de 3 heures du film Le fond de l’air est rouge de Chris Marker, disparu l’année dernière à l’âge de 91 ans dont le Centre Pompidou consacre actuellement une rétrospective.
En 1973 après le coup d’état et la mort du président chilien Salvador Allende, Chris Marker, cinéaste engagé, décide de produire un film à partir de rushes non exploitées par les auteurs des prises de vues issus du collectif SLON (Société pour le Lancement des Œuvres Nouvelles), qui deviendra ISKRA (Images, Son, Kinescope, Réalisation Audiovisuelle) en 1974 [1]. Ces séquences qui n’ont pas trouvé leur place dans le montage final de leurs films, Chris Marker se les approprie et en tire toute leur force en ne les montant non pas de façon aléatoire, mais de telle sorte que les images entre elles se reconnectent et engendre chez le spectateur une réflexion sur la réalité qui l’entoure. Marker est ici une sorte d’écolo d’avant-garde, repêchant des images inédites pour leur offrir une nouvelle vie. « J’avais un moment songé à baptiser d’une expression employée pour la première fois dans son sens constructif : Les Poubelles de l’Histoire. » (Chris Marker)
Marker débute un long travail de montage à partir de bobines datant de la fin des années 60, qui déjà reflètent les prémices d’une contestation planétaire qui atteindra son apogée en 1968 et par la suite sera étouffée par leurs gouvernements. En 1977, d’une durée initiale de 4 heures, Le fond de l’air est rouge sort en salle. Marker nous propose un film militant qui n’est ni un documentaire, ni une fiction, une œuvre aspirant à une analyse politique. Il est découpé en deux parties : Les mains coupées « Du Viet-nam à la mort du Che & Mai 68 et tout ça… », montrant les espoirs de la gauche à travers différents pays tels que le Vietnam, Cuba, la Bolivie, la France… et Les mains coupées, comme son nom nous l’indique, l’échec des révolutions et la reprise en main par un pouvoir conservateur « Du printemps de Prague au programme commun & Du Chili à – quoi, au fait ? ».
Cette manière dont à Marker de nous narrer « Le fond de l’air est rouge est de confronter le documentaire, l’image capté à un moment donné, à une interprétation des faits et donc par conséquence à introduire une forme de subjectivité et donc de fiction. Un film d’art et d’essai dont on retiendra deux séquences chocs, parallèles, qui ont lieu au début et à la fin du film. La première est celle d’un pilote d’hélicoptère américain se réjouissant de larguer des bombes de napalm sur les « Vietcongs » avec le contraste d’un Vietnamien entièrement brûlé, mais vivant. Et la seconde avec celle de l’abattage de loups afin de limiter sa population à un chiffre acceptable par un tireur issu d’un hélicoptère gouvernemental, avec en voix off, un soulagement sur le fait qu’il reste malgré tout encore des loups. Ainsi, bien qu’il sente monter en lui une volonté de rébellion et ceci malgré une deuxième partie pessimiste, le spectateur aguerri reste libre de ses pensées.
L’image pour Marker n’est jamais anodine : Le cameraman croit filmer un événement mais le temps passant, la pellicule se révèle autrement. Elle n’est pas scellée dans le marbre, elle peut évoluer avec le temps. Ainsi le réalisateur ne sait jamais ce qu’il capte. Donnant pour exemple une séquence prise lors des JO, le vainqueur d’une des épreuves sera un jour coréen, puis un autre, japonais. Ou bien encore un cavalier filmé lors d’une autre épreuve olympique, qui participera quelques années plus tard au renversement d’Allende et deviendra l’un des principaux généraux de Pinochet.
Le fond de l’air est rouge a connu différents montages à travers les années. Retravaillé et repensé, il n’est plus le même que celui qu’il a été lors de sa première sortie en 1977. A chaque fois que Marker s’est vu le remanier, pour pouvoir l’exploiter à l’étranger, il a pris une forme de recul pour le rendre plus fluide et plus compréhensif. La version définitive est celle qui est actuellement reprise au cinéma, elle date de 2008 lorsque le film a été édité dans le coffret « Sixties ».
[1] « SLON est née d’une évidence : que les structures traditionnelles du cinéma, par le rôle prédominant qu’elles attribuent à l’argent, constituent en elles-mêmes une censure plus lourde que toutes les censures. D’où SLON, qui n’est pas une entreprise, mais un outil — qui se définit par ceux qui y participent concrètement — et qui se justifie par le catalogue de ses films, des films QUI NE DEVRAIENT PAS EXISTER ! » (SLON 1971).
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