Le 2 janvier 2023
Gabin, Delon, Ventura pour la crème du polar à la française et un gros succès du box-office de la fin des années 1960.
- Réalisateur : Henri Verneuil
- Acteurs : Alain Delon, Lino Ventura, Jean Gabin, Marc Porel, Irina Demick, Elisa Cegani, Amedeo Nazzari, Leopoldo Trieste, Gérard Buhr, Jacques Duby, André Pousse, Danielle Volle, André Thorent, Edward Meeks, Christian de Tillière
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters
- Nationalité : Français
- Distributeur : Twentieth Century Fox France
- Editeur vidéo : Twentieth Century Fox Home Entertainment
- Durée : 2h00mn
- Date télé : 20 août 2024 21:00
- Chaîne : Paris Première
- Date de sortie : 1er décembre 1969
- Festival : Festival de La Rochelle 2022
Résumé : Vittorio Malanese, chef du clan des Siciliens, organise l’évasion du truand Roger Sartet pour l’aider à réaliser un audacieux hold-up.
Critique : La prestance de Gabin en patriarche italien, la classe de Delon en truand revanchard, le naturel de Ventura en flic tenace et l’une des plus belles musiques de l’histoire du cinéma font du Clan des Siciliens la quintessence du polar à la française.
Le long métrage n’est pas un simple film : c’est une alliance. Alliance entre un réalisateur de talent capable de créer un climat propice à une forme d’art spectaculaire, trois monstres sacrés du cinéma travaillant de concert et non les uns contre les autres, et un compositeur sachant cristalliser sur une partition l’essence même du septième art. Beaucoup ont dit d’Henri Verneuil qu’il était « le plus américain des cinéastes français ». Une phrase qui prend vraiment tout son sens lorsqu’on revoie Le Clan des Siciliens, film au budget conséquent pour une production française toute entière mue par une volonté d’aller à l’essentiel, en évitant soigneusement les temps morts. Ce n’est pas un hasard si Verneuil s’est adressé à la Fox, quitte à tourner une double version en français et en anglais dans le but de commercialiser le film en Amérique. Pourtant, si Le Clan des Siciliens conquiert l’Europe, le film ne sera pas un franc succès aux Etats-Unis, au grand dam de Darryl F. Zanuck, qui avait même réussi à imposer sa petite amie de l’époque, Irina Demick (excellente d’ailleurs) dans le rôle de Jeanne Malanese. Pourtant, tout était là pour séduire un public qui avait soif de sensations fortes et même d’un certain érotisme (la scène d’amour filmée derrière un rocher est tout bonnement géniale !).Si l’aspect fataliste de l’histoire rappelle les films de Jean-Pierre Melville (où un certain Alain Delon a d’ailleurs fait ses armes), Verneuil propose un style radicalement opposé, reniant l’épure et l’exquise lenteur du réalisateur du Cercle rouge au profit de cadres lumineux chargés d’une kyrielle de détails et d’un rythme trépidant. Le réalisateur n’en oublie pas pour autant ses personnages, à qui il semble accorder une importance toute particulière. Loin de se contenter du talent de sa brochette de stars, il s’attache non seulement à leur donner un vrai background en quelques scènes bien pensées (la scène où Gabin sert les spaghettis à toute la famille avant de sermonner sa belle fille qu’il juge trop légèrement habillée est un modèle du genre) mais parvient surtout à gérer chaque individualité pour en tirer le meilleur. Ainsi, chaque "ego" a une présence suffisamment forte pour donner du relief à son personnage sans pour autant prendre le pas sur les autres, ce qui permet également de laisser de la place aux seconds rôles. Un redoutable exercice d’équilibriste mené tambour battant par un Verneuil sans complexe déjà habitué à tourner avec les plus grands. Dès la présentation des personnages, où l’apparition progressive de la star est traitée dans la plus pure tradition hollywoodienne, chacun a droit, à égalité, à son moment de bravoure. On découvre Delon à moitié caché derrière la porte de son fourgon cellulaire, Gabin arrive lentement dans le champ par un ascenseur tandis que Ventura est filmé de dos pendant plus de deux minutes avant que la caméra ne saisisse son visage. Le film est alors investi par une sorte d’aura propre à l’utilisation du corps de la star comme réceptacle des attentes populaires, magnifié par la mise en lumière d’un Henri Decae qui n’a pas son pareil pour inscrire les corps et les visages au cœur d’un environnement.Ce n’est cependant pas la seule force du Clan des Siciliens, dont le scénario (tiré du roman d’Auguste Le Breton), d’une confondante fluidité, s’appuie sur les dialogues ciselés de José Giovanni (celui là même qui réunira de nouveau Gabin et Delon dans Deux hommes dans la ville) et la concision d’écriture de Verneuil et Pierre Pelegri. Entièrement conçu autour de la scène du détournement d’un avion DC-8 chargé d’une importante cargaison de bijoux, avec un avant et un après, le film s’offre même une scène d’anthologie lorsque l’appareil doit atterrir en urgence sur une autoroute américaine en construction. Un véritable défi technique pour l’époque dont la réussite fit couler beaucoup d’encre. Saluons également le travail de Jacques Saulnier, le chef décorateur, dont les intérieurs impeccablement reconstitués donnent au film cette touche d’authenticité supplémentaire qui nous permet d’adhérer sans mal à la réalité de toute cette faune gravitant autour des Siciliens. Basés non dans un énième troquet ou épicerie mais dans une salle de jeu style flippers, ces derniers sont également davantage en accord avec l’idée d’un gangster "moderne" ou du moins "modernisé". Enfin, que serait Le Clan des Siciliens sans sa musique ? Les variations sur le thème d’Ennio Morricone, qui signe ici le début de sa collaboration avec les cinéastes français, illustrent à merveille le mélange de grandeur, de tension et de force tranquille qui se dégage du film et des comédiens. Avec cette mélodie aux accents romantiques, presque mélancolique, Morricone donne aussi un avant-goût du drame à venir qui scellera le sort de Sartet et de la jeune épouse d’un des fils Malanese, amants fugaces frappés du sceau de la vengeance. Une touche de féminité qui vient encore ajouter au charme de cet éternel classique, appartenant à une époque où le cinéma avait encore vocation à nous faire rêver...
LE TEST BLU-RAY
Une double édition (Blu-ray + DVD) de toute beauté et tout ce qu’il faut savoir autour du film malgré une qualité d’écoute discutable. L’achat idéal en cette période de fêtes !
Les suppléments
Lorsqu’on vous annonce trois heures de bonus exclusifs, on commence à saliver. On salive déjà un peu moins lorsqu’on regarde le détail, qui comprend près de deux heures de films en version anglaise. Petit rappel : Le Clan des siciliens a été tourné en deux versions (française et anglaise), mais seul Delon, en contrat avec la Fox, a pu garder sa propre voix dans la version destinée à être commercialisée aux USA (les Américains ne supportant pas les accents frenchy de Gabin et Ventura).
C’est ce genre d’information que l’on apprend grâce au documentaire La légende du Clan, qui revient en près d’une heure sur l’histoire du film et du tournage. Avec les interviews du producteur, de l’assistant réalisateur, du décorateur Jacques Saulnier et du fils d’Henri Verneuil. Ludique et très instructif ! La petite intervention du réalisateur Fred Cavayé est fort sympathique, mais a l’inconvénient de ne durer que quatre minutes... Enfin, un petit livret glissé à l’intérieur du boîtier renseigne tous ceux qui étaient trop fatigués pour voir le documentaire sur la petite histoire (illustrée de jolies photos noir et blanc) du film. Manque tout de même une vraie analyse du long métrage pour tendre à la perfection.
L’image
Une image au poil avec un léger grain qui redonne au film son charme d’antan. La profondeur de champ (particulièrement intéressante lors de l’atterrissage de l’avion) est impressionnante. Quant à la qualité de détail de cette édition, elle est en parfait accord avec un Verneuil qui, à l’intérieur de son cadre, ne laissait rien au hasard.
Le son
Le thème d’Ennio Morricone prend toute son ampleur dans cette édition Blu-ray, mais les dialogues manquent de puissance et de clarté dans la version française en Mono, en dépit de la reprise en Master DTS. Mieux vaut mettre le son à fond si vous voulez tout comprendre... La version anglaise, en 5.1, est moins sujette au problème. Chapeau en revanche pour l’aspect immersif proposé, grâce à un superbe travail de retouche sur les effets sonores.
– Sortie du Blu-ray : 27 novembre 2013
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philippe 17 novembre 2019
Le clan des Siciliens - Henri Verneuil - critique
J’ai regardé pour la énième fois le clan des siciliens, je trouve toujours ce film comme l’un de mes meilleurs films français. j’ai d’ailleurs un poster plastifié dans une de mes pièces ou j’ai mes DVD, K7 et Blu Ray des 3 acteurs.C’est curieux que ce film n’est pas marché aux Etats Unis. Les acteurs sont fabuleux, les seconds rôles aussi. Une bonne histoire, une super musique. Un bon polar, plein d’action et de rebondissement. Des scènes bien tournées qui certaines n’ont pas du être faciles notamment la scène de l’avion qui atterri à New York (enfin filmé à Chateauroux).Et puis les 3 acteurs sont sublimes. Gabin disait que ces 3 films préférés étaient Le Chat (que j’aime moyennement) Un Singe en hiver et La Horse. Pour moi c’est Le Clan des Siciliens, Mélodie en Sous Sol, et Les Misérables, puis Le Président, Le Pacha et tous les autres ensuite mais il y en a aucun avec Jean Gabin que je n’aime pas.