Sans issue
Le 24 février 2015
Plongée sombre dans la solitude humaine... Une œuvre aride mais profondément touchante.


- Réalisateur : Saverio Costanzo
- Acteurs : Isabella Rossellini, Filippo Timi, Alba Rohrwacher, Luca Marinelli, Vittorio Lomartire
- Genre : Drame
- Nationalité : Italien
- Distributeur : Le Pacte
- Durée : 1h54mn
- Titre original : La solitudine dei numeri primi
- Date de sortie : 4 mai 2011
- Festival : Festival de Venise 2010
Résumé : 1984, 1991, 1998, 2007. Autant d’années qui séparent la vie de Mattia et Alice. Deux enfances difficiles, bouleversées par un terrible événement qui marquera à jamais leur existence. Entre leurs amis, leur famille et leur travail, Mattia et Alice sont malgré eux rattrapés par leur passé. La conscience d’être différent des autres ne fait qu’augmenter les barrières qui les séparent du monde, les menant à un isolement inévitable, mais conscient.
Critique : Un nombre premier est un nombre indivisible. Dans le long-métrage de Saverio Costanzo, Alice et Mattia sont des personnages esseulés - deux chiffres premiers - uniques l’un et l’autre, inséparables l’un de l’autre. Une unité, une entité à eux deux. Indivisibles. Mais ce n’est pas parce que le destin semble vouloir les réunir inextricablement que ces deux-là sont fait pour être ensemble. Au contraire, leur mal-être au monde, leur incapacité totale à sortir d’eux-mêmes les rend inatteignables. Ils ne sont pas ensemble mais côte à côte.
- © Le Pacte
L’incommunicabilité traverse La solitude des nombres premiers de la première à la dernière image. Les séquences sont longues, peu animées par des mouvements de caméra ; tout comme les personnages sont englués dans une existence dont ils ne veulent pas. Car le problème est bien là. Mattia et Alice n’auraient pas dû naître. Dès l’enfance, leur place aurait du être ailleurs que sur cette Terre. Ensuite, tout n’est que lutte pour trouver leur place - place qu’ils ne désirent pas tant que cela, quelque peu résignés à être « différents ». Volontairement et malgré eux. L’un en l’autre, ils se retrouvent mais la clé pour qu’ils existent, c’est de se parler. Pour de vrai. Mais ils ne le peuvent réellement pas ; le silence et la souffrance sont donc leur lot quotidien.
- © Le Pacte
Cette incapacité à communiquer est retranscrite par le clair-obscur du film. À la limite du fantastique parfois. Les ombres sont omniprésentes comme pour appuyer le poids de la solitude des "nombres premiers". Ce choix esthétique est judicieux, d’autant que la musique - ininterrompue, électro - empêche finalement toute forme de dialogue. Mais l’atmosphère du long-métrage est pesante. Étouffant même. Car du malaise, le cinéaste fait son crédo. D’issue, il n’y en pas et cela nous est (dé)montré dès le début. Mieux vaut le savoir car, même en étant prévenu, en ressortant de La solitude des nombres premiers, un coup de blues peut poindre son nez... Quand il n’y a plus d’espoir...
- © Le Pacte
Frédéric de Vençay 25 juin 2011
La solitude des nombres premiers - La critique
Baroque, audacieux, en mouvement, le néo cinéma italien compte parmi les plus passionnants de la planète. Après Guadagnino ("Amore"), Sorrentino ("Il divo") et surtout Marco Bellochio (le sublime "Vincere"), voici Constanzo qui adapte un roman adulé en éclatant sa structure et ses codes. L’atmosphère de film noir et les références incessantes à Dario Argento s’avèrent paradoxalement idéales pour disséquer un poignant malaise adolescent. Dommage que l’ensemble soit un peu inégal, entre un monumental pic d’intensité en milieu de métrage et un dénouement qui traîne la patte.