Le 1er janvier 2013
- Genre : Série télé
– de Hervé Glevarec
– 160 pages, 12,70 euros
Un ouvrage synthétique et éclairant.
Un ouvrage synthétique et éclairant
Descriptif : À partir d’entretiens avec une trentaine d’amateurs, corpus dont le noyau dur est constitué d’une population de jeunes adultes, cet ouvrage rend compte des raisons d’une passion qui met en avant la valeur des personnages, aux personnalités fouillées, fréquemment traversés par des questions existentielles et pourvus de talents ignorés, mais aussi des univers narratifs troublants par leur rapport aux sentiments, au quotidien et aux faits du monde, ce qui en fait des sortes de fictions de l’ordinaire. Les séries contemporaines sont des séries à hypothèses. Elles offrent un espace de questionnement et de projection à des jeunes adultes notamment, individus en devenir et aux identités plus labiles qu’auparavant.
L’auteur : Hervé Glevarec est directeur de recherche au CNRS, au Laboratoire Communication et Politique. Ses recherches portent sur les pratiques culturelles et médiatiques où il développe un modèle de la diversité culturelle.
Notre avis : L’objet de cet ouvrage est d’étudier la sériephilie, qu’Hervé Glevarec définit dans son introduction comme "la passion déclarée pour les séries". Devenues depuis plusieurs années "l’objet d’un investissement social et culturel", les séries continuent de susciter l’intérêt d’un public considéré jusqu’alors comme étranger au divertissement populaire. Leur réception implique de ce fait une remise en question de la hiérarchie canonique des genres (format court vs long, comédie vs drame, etc.). L’introduction parcourt les enjeux de cette évolution et permet d’en cerner les spécificités : les séries ont permis un élargissement du champ du dicible et du représentable, à travers la mise en scène d’univers auxquels le cinéma, ou les séries télé antérieures aux années 90, ne nous donnaient pas accès ; elles ont su gagner un public qui n’était pas amateur de divertissements "populaires". H. Glevarec propose d’étudier la réception comme une mise en situation du spectateur, qui implique la formulation d’un "régime de valeur" dont l’auteur montre qu’il se distingue du régime de valeur ascétique analysé par Bourdieu dans La Distinction.
L’analyse est particulièrement sensible aux typologies établies par les spectateurs. Le visionnage des séries engage par exemple une hiérarchie des genres et des pratiques de visionnage. L’ouvrage s’intéresse à la comparaison entre série et cinéma, ce dernier étant quelque peu supplanté dans sa traditionnelle hégémonie. La brièveté du format sériel fait qu’à un régime de valeur "ascétique" se substitue un autre régime, d’ordre "hédoniste", qui revendique l’addiction et la "boulimie" filmique par opposition à la contrainte que constitue pour certains spectateurs le septième art.
Le principal mérite de cet éclairant livre est de poser les jalons d’une réflexion sur la réception des séries télé et la notion de "genre" audiovisuel. La bibliographie est éclairante et les sources, précises, ce qui évite le floutage mais entraîne parfois une légère difficulté à suivre le fil du raisonnement, dans la mesure où les citations occupent une place trop importante. En raison de son format bref, l’ouvrage ne peut pas toujours se donner les moyens d’une démonstration rigoureuse (on reprochera notamment à l’auteur de ne pas discuter certains avis de spectateurs, et de considérer son corpus comme un réservoir d’exemples trop homogène). Discutable est également le recours à certaines catégories d’analyse littéraire comme le "dialogisme" ou "l’effet de réel", qui auraient gagné à être éclairées dès l’introduction. En dépit de ces défauts, cet ouvrage de synthèse demeure pertinent pour qui souhaite réfléchir aux enjeux sociologiques de la réception des séries télé.
Galerie photos
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