La Colombie au jour le jour
Le 30 juillet 2003
Un roman noir sur le business lucratif des enlèvements en Amérique latine.


- Auteur : James Grippando
- Collection : Nuits noires
- Editeur : Belfond
- Genre : Polar, Roman & fiction
- Nationalité : Américaine

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Entre les plages de Floride et les Andes colombiennes, un roman noir sur le business lucratif des enlèvements en Amérique latine. Adeptes du polar cynique s’abstenir, il n’y a rien que de très vrai dans tout ça.
Nick Rey a 27 ans, habite Miami, roule en jeep, joue une fois par semaine au street-ball avec son ami d’enfance, et entame une brillante carrière d’avocat dans l’antenne de Floride d’un prestigieux cabinet de Wall Street, Coolidge, Harding & Cash. Avec tout ça, on aurait du mal à imaginer que Nick Rey ne soit pas mignon, bronzé, bien habillé et un brin puritain. Et on aurait surtout du mal à imaginer que l’on puisse recommander un roman dont ce Nick Rey-là serait le héros. Mais en réalité, on finit par s’accommoder du personnage, dont l’analyse psychologique quelque peu rébarbative est gommée au profit du déroulement d’une intrigue tragique et effrayante : la disparition, rapidement identifiée comme un enlèvement, de Matthew, le père de Nick, en Colombie.
Précisément documenté (sur les différentes branches de la guérilla colombienne, sur l’industrie de l’enlèvement en Colombie, sur les conditions de détention des prisonniers et les démarches pour les faire libérer [1]), le roman de Grippando est un polar d’une facture classique mais efficace. Actionnaire d’une société de pêche au Nicaragua, Matthew avait souscrit une assurance contre l’enlèvement qui couvrait également la Colombie, mais la compagnie d’assurance, dont le siège social se trouve aux Bermudes, refuse mystérieusement de payer, ce qui contraint Nick à mener son enquête, à chercher l’appui du FBI et d’amis avocats qui, un à un, lui tournent tout aussi mystérieusement le dos, malgré la situation dramatique de son père. Mais surtout, Nick doit se résoudre à fouiller dans le passé d’un géniteur dont il n’était pas très proche et dont les activités en Amérique centrale pourraient se révéler quelque peu douteuses.
En contrepoint des chapitres à suspense sur Nick et sa recherche désespérée des trois millions de dollars de la rançon, James Grippando consacre quelques pages poignantes à la captivité du père, à sa lutte pour rester en vie, pour résister aux brimades, aux coups, et à l’isolement. On apprend aussi qui sont les ravisseurs, ces faux guérilleros sans foi ni loi, des mercenaires sanguinaires spécialisés dans le rançonnement de riches (ou supposés comme tels) occidentaux, qu’ils revendent aux Farc ou à l’ELN ou qu’ils abattent quand la famille ne paie pas. Tous ces ingrédients font de La rançon de la colère un bon polar au réalisme dérangeant, pas stupidement macabre ni gratuitement violent.
James Grippando, La rançon de la colère (A king’s ransom, traduit de l’américain par Bernard Ferry), Belfond, coll. "Nuits noires", 2003, 468 pages, 20,50 €
[1] A lire ou relire pour mieux comprendre la Colombie, la passionnante autobiographie d’Ingrid Bétancourt avant son enlèvement par les Farc en février 2002 : La rage au coeur, Pocket, 2002, 5,50 €