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Le 3 novembre 2004
Quand la violence de l’écriture fait écho à celle d’une humanité perdue.
Jean Rhys déploie un univers fait de désespoir et d’une cruauté inéluctable, où la violence de l’écriture fait écho à celle d’une humanité perdue.
De son enfance antillaise et d’une vie de fêlures et d’excès, Jean Rhys fait la trame d’une œuvre sombre et cruelle, jamais très loin de l’autobiographie, puisant sans cesse dans sa tragédie intime pour mettre en scène des destins brisés. Née en 1890, la romancière publie dans les années 30 des nouvelles et quatre romans. Suivront des années de silence, jusqu’en 1966 où La prisonnière des Sargasses, qu’elle met neuf ans à écrire, rendra justice à son talent singulier.
L’histoire, c’est celle d’une descente aux enfers aux allures de malédiction. Celle d’une famille créole de planteurs mise à mal par l’abolition de l’esclavage. Antoinette Cosway, l’héroïne et narratrice, grandit dans cette société stigmatisée par la violence de son histoire. Elle sera mariée contre son gré à un anglais ruiné, et menée peu à peu à la folie.
On retrouve les thèmes chers à Jean Rhys, marqués par une vision sans concessions du monde dans lequel elle évolue. On n’échappe pas à la violence d’une société où la cruauté et l’injustice font loi. Antoinette joue de cette ambiguïté sociale des créoles, négriers, riches, méprisants, mais ployant sous le même mépris de la part d’une société anglaise qui ne les reconnaît pas. C’est peut-être ce désir d’être ce qu’elle n’est pas qui mène Antoinette à sa perte, qui lui fait accepter l’inacceptable dans l’espoir insensé de se glisser dans un moule de bien-pensance britannique, refusant de voir qu’elle n’est pas de ce bord et qu’elle ne le sera jamais.
L’écriture est violente, dure. L’histoire, racontée à deux voix puisqu’à celle d’Antoinette se joindra bientôt celle de l’homme qui fera son malheur, est aussi implacable que l’incompréhension qui s’installe entre les personnages, l’impossibilité de communiquer qui ouvre à toutes les extrémités. Les vapeurs de rhum estompent la réalité pour laisser jaillir la fureur de la frustration, la noirceur de l’âme et la rédemption impossible. Souhaitons que la réédition de La prisonnière des Sargasses marque le retour en grâce de Jean Rhys, et lui rende la place qui est la sienne parmi les plus grandes romancières anglaises du siècle dernier.
Jean Rhys, La prisonnière des Sargasses, (Wide Sargasso Sea, traduit de l’anglais par Yvonne Davet), Gallimard, coll. "L’Imaginaire", 239 pages, 6,50 €
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