Peinture flamande
Le 22 avril 2024
Un récit savoureux sur la résistance d’une petite ville. Hommage aux peintres flamands, ce chef-d’œuvre de Jacques Feyder est porté par son épouse, Françoise Rosay.
- Réalisateur : Jacques Feyder
- Acteurs : Jean Murat, Françoise Rosay, Louis Jouvet, Micheline Cheirel, André Alerme, Bernard Lancret, Pierre Labry, Arthur Devère, Claude Sainval
- Genre : Comédie dramatique, Historique, Noir et blanc
- Editeur vidéo : Keep Case
- Durée : 1h50mn
- Date de sortie : 3 décembre 1935
- Festival : Festival de Venise 1936
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Résumé : En 1616, la domination espagnole s’exerce moins sévèrement en Flandres. Alors qu’ils préparent leur kermesse, des villageois apprennent la venue d’une délégation menée par le duc Olivares. Le bourgmestre, traumatisé par les pillages et violences subies sous l’occupation, se fait passer pour mort. Sa femme, révoltée par sa couardise, joue l’hôtesse de charme pour le duc et son cortège de fringants soldats.
Critique : Cinéaste français d’origine belge, ayant tourné dans notre pays mais aussi en Suisse, en Allemagne, aux États-Unis et en Grande-Bretagne, Jacques Feyder (1885-1948) est un réalisateur important victime d’un relatif mais injuste oubli. La kermesse héroïque est son film le plus célèbre, et l’un des chefs-d’œuvre des années 1930. On est frappé par le féminisme et la verve du scénario, qui voit Françoise Rosay (Mme Feyder à la ville) mener un bataillon de femmes pour combattre l’ennemi avec les armes de la ruse. L’actrice, d’une autorité et d’une élégance irrésistibles, s’imposa grande vedette du cinéma français. Le film oscille entre la farce de la commedia dell’arte, la fresque historique et la parabole patriotique, avec une étrange prémonition quant à la situation qui sera celle de la France quelques années plus tard sous l’Occupation. L’influence de toute une tradition satirique remontant à Molière est manifeste : la jeune première (Micheline Cheirel) est amoureuse d’un beau peintre (Bernard Lancret) mais son père (André Alerme) veut la marier de force à un commerçant prospère mais pleutre (Alfred Adam), divers quiproquos inhérents à tout comique de situation émaillent en permanence l’histoire. Cette légèreté de ton dans le cadre d’un propos plutôt sombre contribua au succès de l’œuvre, qui suscita pourtant des réactions violentes dans le Nord de la Belgique, les Flamands étant présentés comme des lâches ou des collaborateurs. Or la Flandres avait été occupée par les Allemands pendant la Première Guerre mondiale.
Au-delà de ces polémiques à replacer dans leur contexte historique, le scénario (écrit par Charles Spaak) frappe par son sens de la nuance, son anticléricalisme féroce (Louis Jouvet en chapelain pervers) et ses dialogues jubilatoires, les complots de ces hommes n’étant pas divulgués au nom « d’intérêts supérieurs qui ne concernent pas les femmes ». Mais on retiendra surtout de La kermesse héroïque sa splendeur esthétique. Si des personnages pittoresques, tels le nain Delphin ou le duc espagnol (Jean Murat) semblent échappés d’une toile de maître, on est frappé par les plans fixes tentant de recréer l’univers pictural, et contrastant avec le rythme effréné de l’action. Entièrement reconstituée en studio par le décorateur Lazare Meerson (également collaborateur de René Clair), la ville de Boom qui apparaît à l’écran semble un hommage à la peinture des primitifs flamands. Une séquence effrayante, cauchemar du bourgmestre imaginant tortures et viols par l’occupant, d’une violence et d’un humour noir inouïs, résume à elle seule la force et la créativité de cette œuvre à redécouvrir. La kermesse heroïque obtint plusieurs récompenses dont le prix de la mise en scène à la Mostra de Venise en 1936.
– Festival de Venise 1936 : Prix de la mise en scène
– New York Film Critics Circle Awards 1937 : Prix du meilleur film étranger
– Kinema Junpo Awards 1938 : Prix du meilleur film étranger
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