Le 30 avril 2024
Si le sujet du dépouillement par les paysans des terres forestières des indigènes du Brésil a été de nombreuses fois montré au cinéma, le contexte du réchauffement climatique et l’extraordinaire implication des comédiens amateurs rajoutent encore de l’intérêt au sujet. Un film magnifique d’un bout à l’autre.
- Réalisateurs : João Salaviza - Renée Nader Messora
- Acteurs : Ilda Patpro Krahô, Francisco Hỳjnõ Krahô, Solane Tehtikwỳj Krahô
- Genre : Drame
- Nationalité : Brésilien, Portugais
- Distributeur : Ad Vitam
- Durée : 2h03mn
- Titre original : Crowrã
- Date de sortie : 1er mai 2024
- Festival : Festival de Cannes 2023
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– Festival de Cannes 2023 : sélection officielle, Un Certain Regard
– Cannes 2023 : Prix d’Ensemble Un Certain Regard
Résumé : À travers ses yeux d’enfant, Patpro va parcourir trois époques de l’histoire de son peuple indigène, au cœur de la forêt brésilienne. Inlassablement persécutés, mais guidés par leurs rites ancestraux, leur amour de la nature et leur combat pour préserver leur liberté, les Krahô n’ont de cesse d’inventer de nouvelles formes de résistance.
Critique : On sait depuis toujours les maltraitances que les paysans et les nationalistes, au nom d’un capitalisme aveugle, imposent aux contrées d’Amazonie, mettant en péril les peuples et les animaux qui y vivent. Ce constat tragique a été particulièrement renforcé sous l’ère de Bolsonaro qui a accru les appétences réactionnaires et les haines raciales. La Fleur de Buriti est le nom que portait la grand-mère d’un chef du village, lequel a vu, lorsqu’il était enfant, toute sa famille se faire massacrer par les gens des villes et les agriculteurs. L’enjeu du film est donc à la fois narratif, mais aussi essentiellement militant. En effet, la caméra de João Salaviza et Renée Nader Messora plonge le spectateur dans les entrailles vertes de la jungle où les Krahô survivent avec leurs rituels, leur goût de la terre et de la nature. Ils habitent dans des régions protégées normalement, mais régulièrement des chasseurs viennent voler des animaux sauvages pour les vendre au marché noir ou les paysans y étendent l’espace de nourrissage de leurs troupeaux.
- Copyright Karõ Filmes - Entre Filmes / Ad Vitam
En 2018, les deux réalisateurs avaient fabriqué le sublime Le Chant de la forêt. On ressort de cette Fleur de Buriti avec le même sentiment : celui d’avoir été immergé dans un univers culturel, musical et naturel absolument magique. Pendant deux heures, le spectateur vit aux côtés de ces gens simples, qui se battent au quotidien pour défendre leur espace réservé et protéger la forêt. Bien sûr, les Krahô ne vivent pas en dehors du monde moderne. Ils ne passent pas leur temps nus ou à chanter des airs traditionnels. En cela, João Salaviza et Renée Nader Messora écartent dans leur propos toute forme de stéréotype malsain, assimilant le sauvage au bien absolu versus le colonisateur cruel. L’objet de ce film est politique. Les cinéastes donnent la parole à des personnes du réel qui s’improvisent comédiens au service du témoignage de l’histoire de leur peuple et de la nécessité que les États du monde interviennent pour protéger cette diversité humaine et animale.
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Nous avons ressenti un choc similaire à ce que nous avions éprouvé avec Le Chant de la forêt. Projeter ce film à Cannes n’est pas qu’un effet d’aubaine. Il s’agit d’amener le spectateur occidental à prendre conscience en profondeur qu’il fait partie de l’écosystème du monde, et qu’atteindre les Krahô, c’est blesser l’univers dans son entier. La musique accompagne ce peuple rural. Ils donnent à voir le goût du travail, ravivent des médecines douces traditionnelles et illustrent parfaitement le vivre-ensemble qui manque tant à nos sociétés dites contemporaines. On apprend avec eux le retour aux choses simples, on appréhende la possibilité d’un monde avec moins de consommation, et on mesure que la vérité a peut-être à voir avec ces modes de vie humbles, rattachés à la nature.
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La Fleur de Buriti est un film qui apprend à s’arrêter. Le rythme lent, les dialogues, les chants sacrés, les fêtes villageoises, le travail de la terre sont autant d’opportunités pour le spectateur à s’abandonner au bien-être. Le film a un effet autant vivifiant que reposant. Et la fin, extraordinaire, apporte un espoir immense, permettant à ce long-métrage d’échapper magnifiquement au spectre du misérabilisme.
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