Le 1er mars 2018


- Scénariste : Stéphane Piatzszek>
- Dessinateur : Maffre, Laurent
- Genre : Action , Historique
- Editeur : Soleil
- Famille : BD Franco-belge
- Date de sortie : 24 janvier 2018
- Durée : T.1
Si Louis XIV peut se targuer du titre de Roi Soleil, Anacréon pourrait revendiquer celui de la Lune et de la Nuit. Siégeant au cœur de la Cour des Miracles, il compte comme sujets de joyeux drilles, de piètres estropiés, orphelins et prostituées, parisiens réputés sans foi ni loi, mais qui obéissent à des commandements et rituels connus d’eux seuls. Sentant son pouvoir et son corps sur la pente descendante, il souhaite passer le pouvoir à son fils, voleur exceptionnel. Mais la succession ne sera pas une partie de plaisir.
Être le roi des pauvres implique n’empêche pas une riche histoire.
Révélée par Victor Hugo, la Cour des Miracles est un lieu de fascination, notamment pour ceux qui apprécient une Histoire plus éloignée de la Galerie des Glaces ou des puissants. Les pauvres, les malhonnêtes et la canaille ont aussi leurs histoires, et tant pis si elle n’a pas de grand H. Celle concoctée par le duo Piatzszek et Maffre offre de nombreux avantages : virevoltante, elle débute, et devrait visiblement s’achever, dans l’action, le sang et la souffrance. Rien n’est gratuit dans ce bas monde, mais ceux qui doivent voler plutôt qu’acheter ne sont épargnés en rien. Dans ce monde, sorte de Game of Thrones, avec des castes d’escrocs à la place des maisons nobles, des "cagoux" au lieu des capitaines de la Garde, il ne faut cependant pas s’attendre à voir un peu de compassion ou trop de fidélité. Et comme la police de l’époque semble vouloir faire le ménage dans ce lieu empli de légendes, la rencontre de l’ordre et du chaos promet de belles péripéties. Ce premier tome, qui présente autant les protagonistes qu’il les écorche ou les oppose, est une fameuse entrée en matière, sans concessions mais pas sans arguments. Le scénario, solide et bien en place, est déjà à la hauteur.
© Soleil
Le dessin est un second argument. Le pinceau de Julien Maffre a choisi la boue au doré, le haillon à l’apparat, la fange au faste. Ses personnages sont charismatiques par leurs paroles, leurs actions, mais n’ont pas l’éclat des protagonistes habituels de séries historiques. Pas de chevalier, baron, prince, mais des tire-laines et des mendiants, la quête d’une aumône remplaçant celle d’un objet magique. Pourtant, rapidement, les décors sales servent à rehausser le courage, voire les qualités de certains d’entre eux, sans jamais masquer leurs attributs sombres. La rivalité, la trahison se perdent dans les traits, qui rendent compte d’un Paris d’époque plus proche de la réalité que beaucoup de planches ou gravures.
© Soleil
Réaliste, plongeant d’entrée dans un univers cruel et retors, La Cour des Miracles démarre sur un premier tome qui promet une belle série. Ses personnages sont déjà fins et complexes, son intrigue peut partir dans de nombreuses directions, de quoi séduire d’entrée les lecteurs curieux, et de s’assurer de leur fidélité comme autant de "malingreux" de l’époque.
66 pages - 15,50€