Le 9 mars 2021
Récit traumatique, pas aussi fort qu’on l’espérait, et tout entier consacré à la lumineuse Sophia Loren.
- Réalisateur : Vittorio De Sica
- Acteurs : Sophia Loren, Jean-Paul Belmondo, Renato Salvatori, Raf Vallone, Carlo Ninchi, Andrea Checchi
- Genre : Drame, Film de guerre, Noir et blanc
- Nationalité : Français, Italien
- Distributeur : Les Acacias, Les Films Marceau-Cocinor
- Editeur vidéo : TF1 Vidéo
- Durée : 1h40mn
- Date télé : 12 juin 2023 12:57
- Chaîne : Arte
- Box-office : 2 024 049 entrées France / 507 221 Paris Périphérie
- Date de sortie : 17 mai 1961
- Festival : Festival de Cannes 1961
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Résumé : A l’été 1943, Cesira et sa fille Rosetta fuient les bombardements de Rome pour retourner dans le village natal de la jeune veuve, la Ciociara. Toutefois, elles n’y trouveront pas le répit escompté puisqu’une troupe de soldats français y abusent d’elles, les laissant en proie à un fort traumatisme que même le gentleman Michele aura du mal à estomper.
Critique : La Ciociara appartient à la période la plus décriée de De Sica, alors qu’il a renoncé au néo-réalisme et se tourne vers un cinéma de vedettes et, même si cette adaptation de Moravia est encore écrite par Zavattini (scénariste du Voleur de bicyclette et de Umberto D.), on voit bien que le temps des acteurs amateurs et de l’approche documentaire est passé. Hommage donc à Sophia Loren, omniprésente, dans un rôle douloureux à Oscars (qu’elle obtint d’ailleurs en 1962, ainsi qu’un prix à Cannes). Pour autant, le film ne cède pas à un lyrisme exacerbé malgré l’aspect dramatique des événements ; il y aura peu de larmes, pas beaucoup de musique lacrymale. On est encore dans la retenue et dans l’absence de pathos.
L’itinéraire de Cesira et de sa fille Rosetta les fait quitter Rome après un bombardement éprouvant : le train, puis la marche les mènent jusqu’au village natal de la jeune mère. Tout l’art du cinéaste est de suggérer la permanence du danger : du regard appuyé d’un voyageur au cycliste abattu par un avion, la fragilité des deux femmes est mise en valeur à plusieurs reprises, le scénario les transformant en objet de désir constant. Et même le village si rassurant n’est qu’un havre temporaire, avec ses troubles internes et ses déchirements. C’est la partie la plus faible du film que cette halte assez laborieuse, et la rencontre avec Michele le « subversif » tient plus de la convention abstraite que de la nécessité narrative. On est loin d’une romance touchante, sans doute aussi parce que, quel que soit le talent de Belmondo, le personnage est inexistant.
Mais c’est sur le chemin du retour qu’a lieu l’événement dramatique qui noue le film : Rosetta se fait violer par des soldats dans une église désaffectée sous les yeux de sa mère. Dramatique mais un peu voyant (le zoom, le plan entre les jambes), ce viol côtoie le symbole, puisqu’il est commis dans un espace traditionnellement protégé, et sur une fille dont la religiosité est soulignée plus avant. Au fond, c’est le saccage de l’innocence présenté comme un sacrilège que filme De Sica. Le début du métrage peut être vu comme la lente préparation à la violence qui, quand elle survient, ravage tout : Cesira apprend presque en même temps la mort de Michele. Elle qui passait son temps à protéger sa fille découvre l’impuissance, sa rage tournant à vide : tout au plus peut-elle encore, dans une belle séquence, jeter une pierre à des Américains qui ne la comprennent pas. Ironiquement, ce sont les libérateurs qui la détruisent, qui réalisent ce que les bombardements et les menaces n’avaient pas réussi à faire. En temps de guerre, il n’y a pas de salut.
De Sica soigne quelques plans, comme le magnifique travelling final, mais il a la plupart du temps les yeux de Rodrigue pour Sophia Loren, dont l’impeccable abattage phagocyte le film au point de sacrifier tout ce qui n’est pas elle. C’est dommage, il y a des éclairs (la réaction de Rosetta après le viol, les compromis avec l’occupant lors d’un repas) qui auraient mérité plus ample développement. Reste une œuvre bancale, ode à une actrice qui en constitue l’attrait aussi bien que la limite.
Le test Blu-ray :
Les suppléments :
Maurizio Porro introduit le film avec une présentation basique et didactique (6mn) ; puis ce sont des entretiens (26mn) avec deux témoins, dont la fille de De Sica, qui rivalisent d’anecdotes plus ou moins passionnantes (ainsi apprendra-t-on que Belmondo se lavait peu…). Les scènes alternatives muettes intéresseront surtout les adorateurs du métrage (5mn30). Enfin, deux bandes-annonces d’époque complètent ces bonus au final plutôt décevants. Par ailleurs le coffret propose un livret que nous n’avons pas reçu.
L’image :
La copie a été bien nettoyée : pas de parasites, une image stable à la définition largement satisfaisante. Plus que tout, les noirs et la luminosité sont impeccables, et le grain léger n’affecte que les ciels.
Le son :
Les dialogues sont parfaitement audibles, et la musique sans saturation. Tout au plus peut-on regretter une légère confusion dans les moments collectifs. La VF d’époque est en revanche redoutable, avec ses accents hors de propos.
– Sortie du combo DVD + Blu-ray : le 12 décembre 2018
- (C) TF1 Studios - Compagnia Cinematografica Champion - Cocinor - Les Films Marceau - Société Générale de Cinématographie (S.G.C.)
- (C) TF1 Studios - Compagnia Cinematografica Champion - Cocinor - Les Films Marceau - Société Générale de Cinématographie (S.G.C.)
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