Le 9 septembre 2023
Un film noble et délicat qui, dans une douceur inouïe, évoque sans démagogie ou misérabilisme la surdité au quotidien au sein de la société japonaise, à un moment où l’héroïne s’interroge sur ses choix de vie.
- Réalisateur : Sho Miyake
- Acteurs : Yukino Kishii, Tomokazu Miura, Masaki Miura
- Genre : Drame, Film de sport
- Nationalité : Japonais
- Distributeur : Art House Films
- Durée : 1h39mn
- Titre original : Keiko, me wo sumasete
- Date de sortie : 30 août 2023
- Festival : Festival de Berlin 2022
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Résumé : Keiko vit dans les faubourgs de Tokyo où elle s’entraîne avec acharnement à la boxe. Sourde, c’est avec son corps qu’elle s’exprime. Mais au moment où sa carrière prend son envol, elle décide de tout arrêter…
Critique : Elle sourde depuis la tendre enfance où elle a subi une dégénérescence neurologique. Mais Keiko n’est pas que sourde. Elle est surtout boxeuse dans un petit club de Tokyo, au bord de la fermeture, la promettant à une carrière de haut niveau qui la sortira de l’ennui. Sauf que la jeune femme ne rêve pas du succès. Elle est surtout attentive à la manière dont elle sera traitée, aux coups terribles qui pourront la blesser. Car avec son handicap, plus que personne, elle connaît la solitude, l’impact des corps abîmés dans l’existence et la dépression qui peut en résulter. Le portrait de cette jeune femme est toujours proche du vertige. On perçoit une mélancolie profonde qui la hante, sans qu’elle ne cède pour autant à la facilité des larmes et de l’abandon. Keiko lutte dans son silence contraint par la surdité pour trouver un peu de sens à sa vie.
- Copyright 2022 KEIKO ME WO SUMASETE PRODUCTION COMMITTEE & COMME DES CINÉMAS
La beauté du geste est inspiré de la boxeuse Keiko Ogasawara. Autant dans les méta-commentaires que dans la manière de filmer, Sho Miyake choisit un parti pris très proche du documentaire. Le récit s’inscrit en pleine période de pandémie et le port des masques participe du sentiment d’un réalisme total, confirmé par le générique final où le réalisateur montre des images de la capitale japonaise. La mise en scène n’en rajoute jamais dans l’excès ou le mélodrame. Les personnages sont captés dans la continuité d’un quotidien, qu’il s’agisse de consultations à l’hôpital, d’entraînements sportifs ou de partages de repas. Les émotions sont effleurées, à l’instar de la vie réelle japonaise où la démonstration de ses émois doit se contenir derrière des gestes de politesse.
- Copyright 2022 KEIKO ME WO SUMASETE PRODUCTION COMMITTEE & COMME DES CINÉMAS
La beauté du geste, titre éminemment très beau, souffre peut-être d’une écriture finalement pas assez romanesque. Certes, le parti pris naturaliste n’est pas contestable mais le récit ne donne pas vraiment les clés de compréhension des ressentiments de la protagoniste. Le spectateur risque d’éprouver une sorte de déception ou de frustration, du fait d’une narration qui se ferme comme elle s’ouvre, dans un souffle à peine perceptible. Toujours est-il que la narrativisation du handicap auditif est très bien rendue à l’écran. Le spectateur vit en direct les effets permanents de la perte d’audition, en termes d’échanges avec les personnes, de solitude et même de stigmatisation. L’approche du handicap semble ici très inclusive, ce qui n’empêche pas la démonstration des difficultés quotidiennes que pose le handicap au sein d’une société capitaliste urbanisée comme le Japon.
- Copyright 2022 KEIKO ME WO SUMASETE PRODUCTION COMMITTEE & COMME DES CINÉMAS
On retiendra de ce long-métrage la beauté des gestes de boxeuse qui exultent de la jeune héroïne. Si elle finit par faire les choix qui lui semblent les meilleurs, on comprend dans le rapport extrême qu’elle entretient avec son corps, la nécessité pour chacun de nous de s’écouter, de trouver ses limites et de prioriser ce qui fait sens pour sa vie.
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