Le 20 novembre 2014
- Scénariste : Godart, Loïc >
- Dessinateur : Godart, Loïc
- Editeur : Akileos
- Famille : BD Franco-belge
- Date de sortie : 1er août 2014
- Durée : 1
L’oiseau chante comme le lui permet son bec part à la découverte d’un personnage, d’un quartier, de rencontres. Un parti pris graphique tranché couronne ce curieux voyage dans Lyon.
Résumé :
Le parcours d’un jeune homme, visiblement sans domicile fixe, sans le sou, mais pas sans amis. Car notre héros, ou plutôt anti-héros, a lié des connaissances qui l’aident régulièrement. Pourquoi, comment ? Peu importe. Tout au long de cette étrange errance dans un quartier de Lyon, sur les traces de cet inconnu, nous découvrons aussi, par le hasard de quelques rencontres, d’autres personnages, peut-être mieux insérés mais, quelque part, tout aussi marginaux.
Notre avis :
Curieux protagoniste sans nom, qui nous entraîne à sa suite dans sa vie dépourvue de direction. Notre avantage par rapport à tous ceux qui l’entourent, c’est que nous pouvons savoir ce qu’il pense. Car ce personnage à la dégaine nonchalante ne parle pas. A personne. Le lecteur a donc le privilège de partager ses pensées, ce qui lui permet de vraiment entrer dans la psychologie de ce personnage.
C’est par touche que nous découvrons, ressentons les événements du passé mais la plupart du temps, il nous faudra imaginer. Nous sommes à l’image du personnage central, ne sachant pas trop bien où nous allons au long de cette histoire.
Pour profiter de ce drôle de chant d’oiseau, il faut accepter de lâcher du lest, de laisser derrière soi la narration construite d’une intrigue classique, pour profite de ce double voyage, autant intérieur qu’extérieur. Pas d’objectif, pas d’obstacle flagrant, pas de nœud dramatique intense, juste un road-movie pédestre de quartier.
La ville a son importance : l’action, voire parfois l’inaction, se déroule dans Lyon. Errant dans le quartier qu’il surnomme la guillotine, l’inconnu nous entraîne à sa suite dans les rues lyonnaises, jour et nuit, pour nous présenter une galerie de personnages secondaires, donnant lieu à des scènes cocasses, dramatiques, violentes ou drôles.
Ces personnages secondaires sont originaux – le médecin et sa famille – ou parfois plus classiques - Moe, l’homme du « café qui fait l’angle » - et ils rythment la vie de l’inconnu qui nous guide. Plutôt, c’est cet inconnu qui rythme aussi leur vie, comme le montrera l’histoire.
Une histoire marquée par un prologue et un épilogue de deux pages qui ouvre et conclut le récit. Deux situations qui prennent encore plus de sens à la seconde lecture.
Cette BD est donc un one-shot bouclé en une soixantaine de pages. Bien sûr, la non-intrigue, les quelques révélations et la fin ouverte laissent beaucoup de questions en suspens. Mais il s’agit là d’une volonté de l’auteur, lié à la construction même de son récit.
Nous avons côtoyé pendant un temps cet anonyme, pour une tranche de vie, sans vraies explications. Il nous incombe donc d’extrapoler les non-dits de l’histoire, d’interpréter un regard, un geste, une pensée. Chacun aura sa vision de ce drôle d’oiseau, au bec trop cassé pour chanter. Ce personnage est-il muet ? Nous le découvrirons bien. Que cherche-t-il ? Nous le saurons peut-être. Où ses pas le mèneront ? Ce n’est finalement pas le plus important.
Ce choix narratif tranché et fort est rehaussé par un parti-pris graphique très net.
Le dessin réaliste des personnages est parfois dérangeant, car il nous arrive souvent de ne pas être sur de reconnaître quelqu’un. Les visages expressifs ont la capacité de varier parfois d’une page à l’autre. Les décors également réalistes tranchent avec le véritable Lyon par le choix des couleurs. Godart a dessiné sa BD en noir, blanc et ocre. Mais en pus de cela, il ponctue son trait de points, de sortes de salissures volontaires qui renforcent l’aspect étrange de ce récit. Ce choix, poussé à l’extrême, crée parfois une sorte de brouillard, mental ou réel qu’importe. Ce choix se remarque d’autant plus qu’il n’est pas présent tout le temps et qu’il est travaillé à différents degrés. La couverture donne d’ailleurs une idée assez nette du style de dessin choisi.
Le cadrage se compose de une à quatre bandes de une à trois cases. Ce cadrage permet de laisser place à des dessins pleine page, demi-page ou encore des bandes composées d’une unique case. Ainsi, certains dessins laissent vivre la ville au gré des cases, nous permettant de suivre le personnage central, ou de le perdre dans la foule.
A l’image de l’histoire, la mise en scène évolue et ne se fige pas, permettant aux différentes cases de se toucher, se joindre par l’absence de bordure, grâce à ce blanc qui se répand partout et lie parfois les dessins.
Le cadrage utilise le choix des couleurs pour paraître plus flou, plus vivant, peut-être même plus organique. Contrairement à la narration, qui évite le récit classique, le cadrage reste quand même dans des lignes standards auxquelles nous sommes habitués.
L’oiseau chante comme le lui permet son bec nous invite à un curieux voyage, parfois mobile, d’autres fois immobiles. Si vous acceptez de vous laisser porter par cette histoire, peut-être y trouverez-vous quelque chose d’inattendu. C’est tout ce que nous vous souhaitons...
62 pages - 15€
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