Le 7 mars 2024
- Scénariste : Jean-Denis Pendanx>
- Dessinateur : Jean-Denis Pendanx
- Genre : Chronique sociale
- Editeur : DANIEL MAGHEN
- Famille : Roman graphique
- Date de sortie : 7 février 2024
Un récit frappant sur la vie dans un camp de réfugié au Soudan du Sud, par les yeux d’enfants.
Résumé : Depuis 2013, la jeune république du Soudan du Sud est en proie à une terrible guerre civile entre les partisans du président de la République, Salva Kiir, de l’ethnie Dinka et ceux de son vice-président déchu, Riek Machar, qui appartient à l’autre ethnie du pays, les Nuers. Cette guerre est menée par des groupes armés qui terrorisent la population, et les massacres sont légions. Pour protéger la population civile, des camps de réfugiés sont créés sous l’égide des Nations Unies, à l’image de celui de Bentiu. Là, les familles séparées par les aléas de la guerre peuvent se retrouver et vivre dans une relative sécurité, car la violence n’épargne pas les camps. C’est dans ce contexte que Nialony, une petite fille de 6 ans, est ramenée à ses parents dans le camp de Bentiu par des humanitaires, après avoir été éloignée d’eux plusieurs mois. Son grand frère Georges, qu’elle connaît peu, lui fait découvrir les subtilités du camp…
Critique : Fruit d’un séjour du dessinateur dans le camp de Bentiu où il a été invité par l’Unicef afin de monter un atelier de dessin, L’œil du marabout témoigne de la vie des civils déplacés par la guerre, entre précarité et espoir de jours meilleurs. C’est avec la petite Nialony, dont les retrouvailles avec sa famille (on parle de « réunification » d’une cellule familiale) constitue un motif de fierté pour le humanitaires présents, que l’on découvre la vie à Bentiu. Surveillé par les Casques bleus de l’ONU, le camp se dresse derrière un long mur de barbelés destiné à protéger les civils des groupes armés qui terrorisent la région. Les habitations, alignées à la hâte pour former des rues, sont construites à même le sol sont faites d’un agrégats de tôle, de bois et de toile. Le camp fourmille de vie, avec des habitants qui exercent tant bien que mal leur métier, quand les enfants sont scolarisés dans une école élémentaire. Malgré la présence d’humanitaire et des Casques bleus, la violence n’a pas disparue du camp, comme Georges et son père l’expérimentent bien vite dans le récit. Celle-ci s’exerce d’autant plus facilement que les populations ont vécu des traumatismes : viol, perte d’une partie de la famille, enrôlement forcé dans une milice… L’enrôlement des enfants dans la guerre constitue d’ailleurs l’un des thèmes forts du récit.
- Jean-Denis Pendanx / Éditions Daniel Maghen
En bâtissant son récit autour d’une enfant, Jean-Denis Pendanx peut faire preuve de pédagogie. À travers les yeux d’une Jean-Denis Pendanx montre avec habileté ce tiraillement entre d’un côté l’espoir d’une vie meilleure et les petites joies du quotidien – le match de foot, le dessin que pratique Georges avec assiduité – et, de l’autre, les difficultés quotidiennes du camp : il faut faire la queue pour puiser de l’eau, les populations restent enfermées dans un petit espace, l’hygiène reste relative… Jean-Denis Pendanx recourt également au registre de la fable pour évoquer les causes du conflit qui déchire le Soudan du Sud, avec la conversation entre la petite Nialony et un marabout, ce grand échassier carnivore qui ressemble à un vautour, endémique dans la région. Sur le plan graphique, le dessinateur opte pour un trait réaliste aux couleurs chaudes et aux nombreux détails dans les décors, dans une logique documentaire.
On ressent clairement, au fil de la lecture, que Jean-Denis Pendanx fait corps avec son récit, qui sonne – malheureusement, compte tenu de ce qui est raconte – très juste. Le dessinateur explique d’ailleurs dans la postface avoir été très marqué par son séjour à Bentiu, si bien qu’il a souhaité en faire un album qui, s’il reste une fiction, raconte des trajectoires bien réelles : Pendaux a bien croisé une petite fille nommée Nialony qui a retrouvé sa famille, et Georges a été l’un des suiveurs les plus assidus de son atelier de dessin. Il en ressort un témoignage marquant, qui nous éclaire sur la réalité de la guerre dans un pays placé en dehors des radars médiatiques.
Doté d’une vraie force narrative, L’œil du marabout rappelle que les enfants demeurent les premières victimes de la guerre. L’éditeur signale que pour chaque album vendu, 0 80 € reviendra à l’Unicef, qui défend la cause des enfants dans le monde.
160 pages – 26 €
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