Le 7 août 2022
Après un début virevoltant, le film de Truffaut privilégie une forme d’histoire aux affectations littéraires, qui se veut un hommage aux femmes, mais les essentialise le plus souvent.
- Réalisateur : François Truffaut
- Acteurs : Nathalie Baye, Leslie Caron, Jean Dasté, Charles Denner, Nelly Borgeaud, Brigitte Fossey, Geneviève Fontanel
- Genre : Comédie dramatique, Romance
- Nationalité : Français
- Distributeur : Diaphana Distribution, Carlotta Films, MK2 Distribution, Les Artistes Associés
- Durée : 2h00mn
- Date télé : 26 octobre 2020 20:55
- Chaîne : Arte
- Reprise: 3 août 2022
- Date de sortie : 27 avril 1977
- Plus d'informations : François Truffaut, les années d’or (site de Carlotta)
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– Sortie en version restaurée : 3 août 2022
Résumé : Bertrand Morane est ce que l’on appelle un homme à femmes dans toute sa splendeur. Il collectionne les conquêtes tel un besoin vital. L’univers d’amour et de séduction de Bertrand anime toute son existence à tel point qu’un beau jour, il décide de relater toutes ses histoires dans un roman.
Critique : Truffaut prolonge le personnage de Fergus, qui manifestait son amour des femmes, dans la dernière partie de La mariée était en noir et offre à cette figure archétypale un film à sa mesure. Ce long métrage, aux accents autobiographiques, n’est pas le portrait d’un dragueur : Bertrand dit lui-même qu’il déteste cette catégorie d’hommes et l’une des femmes courtisée remarque qu’il recherche la compagnie du sexe opposé, comme si sa vie en dépendait. D’où le rythme virevoltant des premières minutes : après une scène d’enterrement symbolique, l’histoire entremêle le marivaudage et le film policier. Tel le narrateur baudelairien du poème « A une passante », le protagoniste cherche à retrouver cette charmante inconnue qui a fait tomber la foudre sur lui, jusqu’à simuler un accident pour la revoir. La quête amoureuse, saisie comme un polar, aboutit à une première méprise. Truffaut s’amuse, comme Marivaux, à jouer sur les identités. Qu’à cela ne tienne, Bertrand continue à suivre le chemin que lui dicte son désir et le spectateur le regarde, d’abord attentif au destin de ce héros. Puis le personnage échappe à cette fuite incessante qui constitue son présent, pour s’intéresser à la réminiscence. Le long métrage amorce alors sa bifurcation majeure, privilégie la médiation de la littérature.
- © Carlotta Films
Le protagoniste au phrasé précieux et à l’introspection naturelle était sans doute destiné à l’écriture autobiographique, le choix du récit correspondant à une prédilection de Truffaut pour la narration, très tôt affirmée, dans sa carrière, par des allusions (on se souvient de l’autel consacré à Balzac, dans Les Quatre Cent Coups), puis par des revendications beaucoup plus explicites à travers l’adaptation d’histoires (le roman La Mariée portait le deuil de William Irish, la nouvelle Les Virginales de Maurice Pons) ou l’usage d’une voix off (L’Enfant Sauvage, Les Deux Anglaises et le Continent)
On peut voir dans Bertrand une modélisation du machiste : celui-ci tente d’objectiver par son regard des catégories de femmes, sur des critères de physiques et d’attitudes, l’homme figurant au centre, tentant de satelliser chacune des conquêtes, déclinant des invariants d’un "éternel féminin" qui se cristallisent à travers quelques blasons, les jambes en particulier. Il y a, chez cet acharné au regard triste, l’idée même d’une fatalité, que le réalisateur documente selon une accumulation de scènes qui réduisent le plus souvent les femmes à la frivolité, comme une sorte de mise en images des aphorismes de Sacha Guitry.
- © Carlotta Films
Qu’elles soient passives, à la fois surprises et flattées, animées par de fausses colères, voisines de l’envie, ou jalouses, elles ne sont là que pour être désirées, dans des situations qui relèvent parfois du vaudeville (l’une d’elle s’endort en attendant dans l’escalier), du grotesque (une autre fait une prise de catch à un goujat), de l’absurde (la baby-sitter convoquée, alors qu’il n’y a pas d’enfant à garder). Les signes d’un hommage trop voyant ont du mal à dissimuler le regard empreint de phallocratie. Les aventures sentimentales s’enchaînent, sans que la sensation de redite ne s’estompe après une bonne heure de film, avec, dans la mise en scène, un certain nombre d’afféteries qui se veulent des élégances et des sous-titres didactiques, prenant l’apparence d’aphorismes parfois médiocres ("quand on se s’aime pas soi-même, on est incapable d’aimer les autres"). Sur de semblables figures masculines et féminines, Rohmer a brodé des variations bien plus crédibles et imprévisibles, bien plus émouvantes, tout simplement.
- © Carlotta Films
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