L’axe du loup – Virgile Dureuil d’après Sylvain Tesson – la chronique BD

Critique : Passionné par les récits de Sylvain Tesson, le dessinateur Virgile Dureuil signe avec L’axe du loup sa troisième adaptation de l’œuvre de l’écrivain voyageur, après Dans les forêts de Sibérie (2019) et Bérézina (2021). Ce troisième album adapte ce qui est probablement le récit le voyage le plus ambitieux de Sylvain Tesson : la traversée du continent eurasiatique du nord au sud. Passionné d’histoire et fasciné par le livre de Slavomir Rawicz, Sylvain Tesson s’est mis en tête d’entreprendre lui-même le voyage décrit par l’auteur d’À marche forcée, afin d’en juger la crédibilité. Il faut dire que, s’il a connu un certain succès en librairie au moment de sa publication dans les années 1950, le témoignage de Slavomir Rawicz a immédiatement été remis en question. Pourtant, des témoignages concordants existent sur des évadés du goulag partis vers la Mongolie et qui tentent ensuite de rejoindre le monde libre. Dans sa postface, Sylvain Tesson signale que depuis la première publication de son livre en 2004, un dénommé Witord Glinski est sorti du silence pour signaler qu’en réalité, l’histoire d’À marche forcée était la sienne, et qu’il l’avait confiée à Slavomir Rawicz, lequel se serait approprié l’histoire…

Virgile Dureuil d’après Sylvain Tesson / Casterman

Mais comme le souligne Tesson, qu’importe finalement que l’histoire soit véridique ou (à demi) inventée, tant qu’elle est inspirante. Et c’est là l’intérêt de l’adaptation en bande dessinée de Virgile Dureuil : donner un nouveau souffle à ce récit et lui associer les images splendides des paysages – souvent hostiles… – que croise Sylvain Tesson durant de son périple. Pour ce faire, le dessinateur fait le choix du réalisme, avec un dessin au trait rehaussé d’aplats de couleurs pour rendre chaque case bien lisible. Les planches sont scandées de textes qui partagent les impressions de Sylvain Tesson, dont la plume est agréable à lire. Virgile Dureuil dessine également différentes cartes qui montrent l’avancée du périple. Il en résulte un récit vivant, qui ne masque pas les mésaventures parfois cocasses – comme lorsqu’il se retrouve nu en face d’une jeune femme en pleine forêt… – du personnage.

Virgile Dureuil d’après Sylvain Tesson / Casterman

Si Sylvain Tesson est aujourd’hui considéré comme une figure réactionnaire – en témoigne encore la pétition parue en janvier dans Libération qui s’oppose à sa désignation comme parrain du « Printemps des poètes » –, cette adaptation en bande dessinée ne laisse guère transparaître les idées politiques de l’écrivain voyageur, en dehors d’un regard occidentalo-centré. L’album rend d’abord hommage aux évadés politiques et à la beauté des grands espaces. C’est aussi bien ainsi.

Cette adaptation de L’axe du loup s’appuie sur le dessin soigné de Virgile Dureuil, grand amateur de l’œuvre de Tesson, pour mettre en images l’extraordinaire périple de l’écrivain-voyageur.