L’astragale - la critique du film

Folie à deux, L’astragale rêve de grandeur plus que d’amour. Brigitte Sy fait d’Albertine une icône et de l’échappée sauvage des amants un idéal.

L’argument :Une nuit d’avril 1957. Albertine, 19 ans, saute du mur de la prison où elle purge une peine pour hold-up. Dans sa chute, elle se brise l’os du pied : l’astragale. Elle est secourue par Julien, repris de justice, qui l’emmène et la cache chez une amie à Paris. Pendant qu’il mène sa vie de malfrat en province, elle réapprend à marcher dans la capitale. Julien est arrêté et emprisonné. Seule et recherchée par la police, elle se prostitue pour survivre et, de planque en planque, de rencontre en rencontre, lutte au prix de toutes les audaces pour sa fragile liberté et pour supporter la douloureuse absence de Julien…

Notre avis :Adaptation d’un roman à succès publié dans les années soixante, L’astragale se jette à corps et coeurs perdus dans une quête de liberté désespérément romantique. D’ores et déjà porté à l’écran avec Marlène Jobert dans le rôle principal, le récit marque son temps et l’imaginaire de par sa portée sociale. Première femme à raconter son existence de prostituée, délinquante ainsi que son expérience en prison, l’auteure, Albertine Sarrazin, trouve en la passion déraisonnée le goût de vivre.

© Alfama Films
Romance symbolique, L’astragale emporte dans sa chute et celle de son héroïne principale tout espoir d’assister à l’union heureuse de la littérature et du cinéma. La cavale des sentiments consume tant ses interprètes que son sujet. La voix-off, empruntant ses tirades aux écrits originaux, entache les séquences incriminées de ses tournures compassées. Le scope noir et blanc donne à l’amour un goût de cendre. Brigitte Sy arrange ses compositions vidéastes comme autant de références en gerbes de fleurs mortuaires.
D’où Albertine tire-t-elle ses inspirations et aspirations littéraires ? Le mystère reste entier. Son éducation bourgeoise, sa scolarité dans des établissements religieux, ses parutions occasionnelles dans des journaux... L’astragale passe sous cape toutes les facettes de sa vie expliquant tant la cristallisation obsessionnelle de ses affects que le talent lyrique de la jeune femme. Brigitte Sy ne traite que la première année de l’histoire des amants maudits. Albertine s’échappe, rencontre Julien, s’en éprend et panse ses plaies jusqu’à leur arrestation commune. Il n’est rien, si ce n’est la passion que la femme ressent pour l’homme.

© Alfama Films

Mais L’astragale trouve en ses cadres la puissance quand les mots lui font défaut. L’élégante reconstitution d’époque d’un Paris oublié, la mise en scène d’un milieu de petites frappes, l’évocation de la Guerre d’Algérie, confèrent à la production un raffinement délicat. On s’éprend de l’idée du film plus que de lui même. Tout le monde aime les histoires d’amour.