Rendez-vous en terre inconnue
Le 13 août 2021
Voir les bobos parisiens découvrir que les "couches populaires" ne se composent que d’analphabètes et de voyous, il paraît que ça fait encore rire en 2019. La France va mal, c’est ce que nous rappelle, à sa façon, ce soi-disant feel good movie.
- Réalisateur : Mohamed Hamidi
- Acteurs : Gilles Lellouche, Sabrina Ouazani, Hugo Becker, Malik Bentalha, Harmandeep Palminder, Karim Belkhadra, Camille Lou
- Genre : Comédie
- Nationalité : Français
- Distributeur : Mars Distribution
- Durée : 1h30mn
- Date télé : 12 avril 2024 22:20
- Chaîne : Ciné+ Premier
- Date de sortie : 27 février 2019
- Festival : Festival de l’Alpe d’Huez
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Résumé : Fred Bartel est le charismatique patron d’une agence de communication parisienne branchée, Happy Few. Après un contrôle fiscal houleux, il est contraint par l’administration de délocaliser du jour au lendemain son entreprise à La Courneuve. Fred et son équipe y font la rencontre de Samy, un jeune de banlieue qui va vite se proposer pour leur apprendre les règles et usages à adopter dans ce nouvel environnement. Pour l’équipe d’Happy Few comme pour les habitants, ce choc des cultures sera le début d’une grande histoire où tout le monde devra essayer de cohabiter et mettre fin aux idées préconçues.
Critique : Après la découverte de l’Algérie à travers les yeux d’un jeune Parisien (Né quelque part, en 2013) et la traversée de la France au côté d’un vieil Algérien (La Vache, en 2016), on aurait pu espérer que Mohamed Hamidi trouverait autre chose pour nous faire rire que les clichés discriminatoires pour son troisième film. Avec, en guise de producteur, Jamel Debbouze qui n’a que trop souvent joué avec de telles rengaines, il était peu probable de le voir passer à quelque chose de plus subtil. La différence est que, cette fois, le choc des cultures ne se fait plus entre les ressortissants de deux pays, entre les habitants de deux recoins de l’Ile-de-France. Pour faire simple, le périphérique a remplacé la Méditerranée... et les stéréotypes sociaux les stéréotypes nationaux.
- Crédit photo : Arno Roth - Copyright Mars Films
Dès le générique d’ouverture, la découverte de La Courneuve par Gilles Lellouche se fait sur le son de Seine-Saint-Denis Style, que chantait le Suprême NTM 20 ans plus tôt...Oui, l’image qu’Hamidi veut donner du 93 ne date pas d’hier. Samy, l’attachant nigaud beau parleur qu’incarne Malik Bentalha n’est d’ailleurs qu’un fade réchauffé du personnage qui, à la même époque, a rendu Jamel Debbouze si populaire. Les choses sont de toutes façons inlassablement figées puisque, à en croire ces fins sociologues, les habitants de La Courneuve, s’ils ne sont pas des Maghrébins trop réactionnaires pour espérer s’intégrer (c’est le cas de la famille de Samy, et on en rigole), sont tous, au choix, des voleurs ou des dealers.
Là où la naïveté du personnage principal de La Vache parvenait à donner quelques émotions au gré de ses pérégrinations et des rencontres qui s’ensuivaient, ici les sentiments ne sont que le fait de la balourdise avec laquelle Samy drague la jeune fille incarnée par la ravissante Camille Lou. L’autre ficelle affective vient de la relation que le personnage de Lellouche entretient avec son branleur de fils. Une piste qui, toutefois, ne parviendra jamais ni à faire rire ni émouvoir. Il faut donc uniquement compter sur l’exploitation des caricatures ringardes pour trouver de quoi nous chatouiller les zygomatiques, ce qui est particulièrement effectif dans les scènes d’entretiens d’embauche.
- Crédit photo : Arno Roth - Copyright Mars Films
Toutefois, ce pouvoir comique perd au passage au moins la moitié de son potentiel puisque les caricatures ne viennent que d’un seul et unique côté du panel de personnages. Hamidi semble tout ignorer de ce dont les Parisiens aiment se moquer entre eux depuis déjà quelques années. Après tout, son film n’est pas pour les riches parisiens - puisque, à ces yeux, ils sont tous riches, et donc dédaigneux. En effet, la condition sine qua non pour qu’il soit perçu comme un feel movie est sans doute d’être vu par des personnes pour qui le goût commun pour la magouille et la discrimination positive seraient les uniques espoirs de se voir embauchés dans les nébuleuses start-ups de la capitale.
- Copyright Mars Films
Au milieu de tous ces personnages, tous aussi grossièrement caractérisés les uns que les autres, un seul semble malgré tout avoir quelque chose de positif de nous raconter. Il s’agit de la vendeuse incarnée par Sabrina Ouazani, qui, dans la première demi-heure, insiste pour ne pas « retourner » à La Courneuve. Ainsi, en plus d’incarner un espoir de réussite professionnelle, et donc d’une potentielle échelle sociale, son passé semble marqué par un terrible traumatisme. Et pourtant, ce personnage va rapidement passer en second plan, sans que l’on n’apprenne jamais rien de son parcours. Le scénario va même la limiter à son seul caractère antipathique, inhérent à son métier de commercial. Et oui, toutes les caricatures ne sont pas drôles. Loin de là !
- © 2019 Mars Films. Tous droits réservés.
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