Western spaghetti 2.0
Le 8 février 2015
Enzo G. Castellari offre au western italien son dernier chef-d’œuvre et Franco Nero une des ses meilleures prestations dans cette véritable ode à la nature et au respect des êtres vivants. Un film méconnu qui mérite d’être redécouvert d’urgence.
- Réalisateur : Enzo G. Castellari
- Acteurs : John Saxon, Franco Nero, David Hess
- Genre : Western, Inédit (salle, vidéo)
- Nationalité : Italien, Russe
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Enzo G. Castellari offre au western italien son dernier chef-d’œuvre et Franco Nero une des ses meilleures prestations dans cette véritable ode à la nature et au respect des êtres vivants. Un film méconnu qui mérite d’être redécouvert d’urgence.
L’argument : Le jeune Jonathan Kowalski échappe de peu au massacre de sa famille par une bande de hors-la-loi. Il rencontre par la suite un ourson avec lequel il se lie d’amitié. Les deux orphelins vivent ensemble dans les bois jusqu’à leur découverte par une tribu indienne. Élevé comme un fils par le chef de la tribu, le jeune Jonathan apprend vite à se faire respecter et prend comme nom d’Indien Shaya. Des années plus tard, la tribu est menacée par le magnat Fred Goodwin qui découvre du pétrole sur leur terre sacrée. Toujours hanté par la mort de ses parents qu’il n’a pu sauver, Jonathan décide de protéger son clan contre Fred Goodwin et ses mercenaires...
Le film : Plus de quinze ans après avoir offert au western spaghetti son chant du cygne avec Keoma, Enzo G. Castellari surprend encore et réalise là un authentique chef-d’œuvre du genre. Ode au respect de la nature et à la tolérance vis-à-vis des hommes et des animaux, Jonathan des Ours surprend d’autant plus au regard de la filmographie globalement très bourrine d’Enzo G. Castellari, entre un Big Racket et un Justicier du Bronx, où le vivre-ensemble se résumait à grands coups de tatanes et de plomb dans les gencives. Les us et coutumes, ainsi que les décors majestueux russes très crédibles, sont filmés ici avec beaucoup de sensibilité. La filiation avec Danse avec les loups est d’ailleurs plus qu’évidente. De plus, Castellari et Nero ont du attendre le succès du film de Kevin Costner et du Dernier des Mohicans de Michael Mann pour ressusciter le temps d’un film le western à l’italienne, dont le scénario a été écrit avant la réalisation de Danse avec les loups. Si le film possède de nombreuses qualités narratives et esthétiques, il est littéralement porté par la prestation de Franco Nero, qui a souvent affirmé qu’il s’agissait de son titre préféré dans sa filmographie, en plus d’être l’œuvre la plus aboutie de Castellari. L’acteur, dont l’implication fut totale, a également fait part de son amertume concernant son choix du responsable des ventes internationales, dont la gestion catastrophique l’empêcha d’avoir le succès qu’il méritait et une distribution correcte, notamment en France. Franco Nero, dont les yeux bleus et le charisme ont rarement été aussi bien mis en avant, incarne ici une sorte de frère aîné de Keoma, qui aspire à la sagesse et au respect de ses ancêtres, mais dont l’existence même sera menacée par les prospecteurs de pétrole, l’obligeant à reprendre les armes pour se venger. L’acteur offre ici une des ses meilleures prestations. Jonathan des Ours offre en outre un regard réaliste et respectueux sur les tribus indiennes confrontées à l’intrusion du capitalisme sauvage incarné par John Saxon, un habitué du cinéma de genre et des films d’horreur américains, parfait dans le rôle du magnat du pétrole charismatique et manipulateur, entouré d’une horde de mercenaires vêtus de noir tendance SM qui font immédiatement penser à Tire encore si tu peux, le film culte de Giulio Questi, sans oublier l’hommage rendu au Grand silence de Sergio Corbucci, dont le film est dédié, à travers le chef des mercenaires, incarné par un acteur russe au jeu assez limité, et équipé d’un Mauser C96... Le casting secondaire est d’ailleurs pourvu de véritables "gueules" du cinéma, dont David Hess, surtout connu pour son rôle de violeur dans La dernière maison sur la gauche de Wes Craven. Floyd "Red Crow" Westerman incarne quant à lui le chef indien, après avoir également joué dans le film de Costner. Construit autour de deux parties bien distinctes, dont une première très contemplative, alternant flash-back de l’enfance de Jonathan et errance au milieu de la nature, Jonathan des Ours est donc un unique mélange de western post-Danse avec les loups et de western spaghetti, où la marque visuelle de Castellari apparaît nettement lors des gunfights, secs, nerveux, accompagnés des cascades et des ralentis chers au réalisateur. Ce dernier réussit là le tour de force de rassembler dans un seul film les délires baroques de Keoma, la sécheresse de ses films d’actions et la contemplation de la beauté de la nature et des hommes qui vivent en harmonie avec elle, et tout cela avec peu de moyens. Mais la réussite de ce film n’aurait pas été la même sans la superbe musique composée par Aleksandr Belyayev, Fabio Costantino et Clive Riche, et qui est sans aucun doute une des meilleures bandes-originales du genre. Faisant autant référence aux œuvres de Morricone qu’à la musique des frères De Angelis pour Keoma, la musique de Jonathan des Ours est tour à tour inquiétante, apaisante, rythmée, incroyablement variée, tandis que le thème principal rappelle les ballades de Leonard Cohen pour John McCabe. A une époque où le cinéma italien était moribond, Castellari offre son plus grand film aux côtés de Big Racket, un film malheureusement peu connu en-dehors de l’Italie qui le rediffuse fréquemment, mais qui doit absolument être redécouvert, comme le souhaite Franco Nero.
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