Le 8 octobre 2019


- Dessinateur : Paul Rey
- Genre : Roman graphique, Science-Fiction
- Editeur : Sarbacane
- Famille : BD Franco-belge
- Date de sortie : 4 septembre 2019
Dystopie effrayante, et tout sauf appétissante.
Résumé : Raoul travaille dans un restaurant étoilé parisien, mais n’est pas satisfait par sa situation. Enfant de l’après catastrophe climatique qui a ravagé les sols et les populations, il ne peut utiliser de végétaux, hormis ceux synthétiques fournis par la toute puissante entreprise Synthesia. Face aux pressions d’une société fermée et oppressante, il va devoir faire face à ses envies et ses intuitions...
L’idée de fonder une société future où une grande compagnie règne sur un monde désolé grâce à la nourriture, Soylent Green l’avait bien amenée. Avec Jardin d’hiver, Paul Rey (qui n’est pas de Nay) a visiblement digéré cette approche pour l’en faire sienne. Insistant sur le goût, sur le toucher, sur l’odeur, il ne veut pas faire une BD d’action ou de SF, mais bien un roman graphique qui joue sur le mélange des sensations, une synesthésie nostalgique éprouvante pour le lecteur, qui doit imaginer ce que serait un monde vide. C’est donc avec un héros lâche, un compagnon vieux et imprudent et une conclusion en forme de compromis que s’acheminent les personnages. L’ambiance est pesante sans être oppressante comme celle de 1984 ou du Meilleur des Mondes, mais elle représente un danger tout aussi lancinant, celle d’un monde où Monsanto aurait triomphé sans partage.
Paul Rey / Editions Sarbacane
Avec un dessin sobre, des personnages sans charisme et des décors aseptisés, les pages n’ont pas un attrait évident, comme s’il s’agissait de retranscrire le manque d’appétence de ce monde insipide. Pourtant, des détails s’échappent petit à petit, comme le tourment d’une terre rendue aride, une sauce aux champignons préparée ou une serre préservée. Calmement, sans heurt, ce dessin semble s’enliser, et pourtant il gagne en vigueur, se fait plus fort, avec des pics, et une apogée finale, là encore éprouvante, sans couleur mais pas sans saveur, finalement.
Véritable hymne cachée à une cuisine de terroir et bio, c’est sous un masque dystopique écologique mais aussi presque politique que cette histoire prend non pas au cœur ou au cerveau, mais bien à l’estomac, et donc aux tripes.
160 pages - 23,50€