Critique  : Douglas Kennedy retrace l’histoire d’un amour, d’un amour de toujours qui ne peut éclater en plein jour. Sam est américain. Il a rencontré Isabelle dans les années 1970, lors d’un séjour à Paris qu’il s’est accordé avant d’intégrer Harvard et de souscrire à son rythme infernal qui le mènera dans les plus hautes sphères du droit. Isabelle est française, mariée, traductrice. Elle a quinze ans de plus que lui, instaure des règles qu’ils ne peuvent enfreindre. Les braises de cette passion ne s’éteindront pas. Çà et là, dans les pages, elle renaît de ses cendres, ne se consume pas entièrement, à aucun moment – en partie parce que le quotidien ne la ravagera pas. L’un a sa vie, l’autre a la sienne. Et leur « cinq-à-sept » comme une parenthèse qui existe pour se refermer – et se rouvrir, plus tard.
Isabelle, l’après-midi, jamais loin, éternellement dans les pensées de Sam, dans un coin de son esprit. Même alors qu’il mûrit, grandit même, qu’il décroche un poste dans un prestigieux cabinet d’avocats, qu’il s’installe avec quelqu’un, qu’il se marie. Il ne respire que pour elle, dans l’espoir de revivre ces instants de magie. Mais l’existence est faite de choix guidés par la peur et par l’incapacité de sortir de la cage dorée dans laquelle nous nous enfermons un peu plus chaque jour. Un chemin semé d’embûches, complexe, sinueux, à la destination inconnue. L’imprévu domine dans ce roman, tout comme l’obsession que crée un premier amour, une aventure qui ne s’oublie jamais.
Le premier tiers du livre est répétitif, comme l’est sans doute la vie d’un homme. Il revient sur l’instauration de la complicité qui naît pour durer, sur la complémentarité des corps – à grand renfort de phrases un peu banales et là encore répétitives, mais les expériences et les désirs ne le sont-ils pas ?
Douglas Kennedy évoque les défis lancés par le destin, les cadeaux du quotidien et les pièges qui se cachent dans notre futur. Il raconte un amour rendu somptueux par son heureux dénouement impossible dans un livre entre amertume et douceur, toujours mélancolique, mais ne refermant à aucun moment la porte de l’espoir. Parce que l’espoir fait vivre, après tout.