Intraitable . T.2 – Choi Kyu-sok – chronique BD

Après un premier tome centré sur la mise en place du système de harcèlement dans l’entreprise et ses conséquences, le deuxième volume d’Intraitable se focalise essentiellement sur la difficile création d’une section syndicale dans la société Fourmis, nom d’emprunt qui désigne en réalité la multinationale Carrefour qui s’est implantée en Corée du Sud au début des années 2000. La Corée du Sud est victime à cette époque d’une importante crise économique qui provoque des vagues de licenciements. Au sein des entreprises, la direction fait tout pour dégraisser les effectifs à moindre frais, quitte à harceler les employés. Choi Kyu-sok met à nu avec une grande finesse l’engrenage qui conduit à la mise en place de ces pratiques managériales.

Choi Kyu-sok / Rue de l’échiquier pour l’édition française

L’auteur a l’intelligence de ne pas tomber dans une vision schématique qui opposerait de façon unilatérale la direction et les employés, les cadres aux précaires. Il privilégie la mise en scène des relations de pouvoir, le poids des statuts et des représentations de l’autre au sein de l’entreprise. Il démontre l’intérêt et le rôle du combat syndical en Corée du Sud sans tomber dans l’idéalisme : le leader syndical Go-shin est lui-même un personnage ambigu, finalement assez misanthrope.

S’il met en scène un combat syndical, Intraitable est très loin d’être un exposé redondant. Choi Kyu-sok construit une véritable intrigue et insuffle de la vie à des personnages complexes qui n’agissent jamais de façon mécanique. Son dessin, résolument réaliste, est remarquable par sa clarté et son sens du détail.

Choi Kyu-sok / Rue de l’échiquier pour l’édition française

Fruit d’un travail de terrain mené par Choi Kyu-sok, Intraitable s’avère une série remarquable sur les luttes sociales, à même d’interroger nos propres représentations sur les rapports sociaux aux sein des entreprises. Une lecture prenante et enrichissante.