Le 6 février 2012
- Scénariste : Sylvain Runberg
- Série : Konungar
Alors pour commencer, pourriez-vous nous parler un peu de votre carrière dans la BD et ce qui vous y a poussé ?
Sylvain Runberg : Pour ma part, j’ai commencé à lire très jeune, de la BD, des romans, des livres d’histoire aussi. J’ai donc grandi avec des livres autour de moi. Après avoir passé un bac d’Arts Plastiques, j’ai obtenu une maîtrise d’Histoire contemporaine à la Fac, puis j’ai travaillé quelques années dans une librairie de Bande Dessinée à Aix en Provence avant de rejoindre les Humanoïdes Associés, au sein de leur service commercial. Mais je n’avais jamais pensé à l’écriture.
Il se trouve qu’en 2001, j’ai été victime d’un accident qui m’a immobilisé plusieurs mois, et comme il fallait que je trouve quelque chose à faire, j’ai commencé à écrire. Ca m’a plu, j’ai donc continué, en dilettante, puis en 2004 j’ai fini par proposer 4 projets de scénarios qui ont été acceptés presque en même temps (Astrid chez Soleil, Hammerfall, Les Colocataires et Orbital, chez Dupuis). J’ai donc quitté mon emploi et me suis alors consacré au scénario à plein temps. Ce premier tome de Konungar est ma 28e publication depuis ces débuts.
Comment avez-vous rencontré Juzhen, qui illustre la série ?
Sylvain Runberg : A vrai dire, Juzhen et moi ne nous sommes jamais rencontrés, même pas via Internet ! Juzhen habitant en Chine, tout passe par sa traductrice, et c’est grâce à mon éditeur chez Glénat que la « rencontre » a été possible. Ca ne nous a pas gênés du tout pour la réalisation de cet album, et je trouve que le trait de Juzhen, véritablement international, où se croisent influences franco-belges, manga et comics, donne un ton tout à fait original pour ce type de récit. Evidemment, je serai ravi qu’on puisse se voir un jour ! Une tournée de dédicaces en France pourrait se monter en 2012 afin de concrétiser cette envie, j’espère vraiment que ça se fera !
Comment vous est venue l’idée de cette nouvelle série ?
Sylvain Runberg : Pour ce qui est de la naissance de « Konungar », il se trouve que chez Dupuis, j’avais écrit une série se déroulant au VIIIe siècle en Scandinavie, « Hammerfall », avec Boris Talijancic, où je m’étais attaché à un maximum de réalisme concernant la culture et la civilisation « viking », pour sortir des clichés éculés des barbares assoiffés de sang portant le casque à cornes, ce qu’ils n’étaient absolument pas. « Hammerfall » terminé, je me suis dit que ça serait intéressant de prendre le contre-pied de cette approche, à la fois d’un point de vue graphique et scénaristique, non pas en reprenant ces clichés, mais en partant avant tout des récits de la mythologie scandinave, et d’en réaliser une libre interprétation, en y associant des éléments d’autres mythologies, grecques et celtiques, dans un cadre épique. Et c’est devenu « Konungar ».
Il y a quelque chose qui vous attire particulièrement dans la mythologie nordique ? Pourquoi ce choix ?
Sylvain Runberg : Ce qui m’attire dans la culture médiévale scandinave, c’est qu’il s’agissait d’une société de navigateurs, de marchands, de négociateurs. Ils ont commercé dans de très nombreux endroits, jusqu’à Bagdad, ce qui nécessitait aussi de leur part la connaissance des langues étrangères. Et ils ne se faisaient guerriers que si une bonne occasion se présentait, à savoir obtenir des richesses sans prendre de risques inconsidérés, le plus souvent par la ruse. Les attaques de monastères en sont un exemple frappant. Beaucoup de richesses et pas de défenses. Ils ne se sont donc pas gênés. Pour un scandinave de l’époque, le but principal était de pouvoir s’enrichir et de s’établir confortablement, certainement pas de mourir au combat. La poésie et l’écrit étaient aussi très importants pour eux. Savez-vous que l’Islande a pratiquement produit autant de textes durant cette période que toute l’Europe de l’Ouest réunie durant la Renaissance ? Que les femmes vikings pouvaient hériter des richesses familiales et avaient le droit de réclamer le divorce en cas de violences conjugales ? Leur approche religieuse différait aussi complètement de ce que connaissait l’Europe de l’époque. Il n’y avait pas de clergé, et chacun pouvait envisager son rapport aux Dieux comme il l’entendait. Ce qui explique certainement la facilité avec laquelle le christianisme s’est imposé ensuite dans ces pays.
Cette nouvelle série s’appelle Konungar et j’ai cru comprendre qu’elle serait assez courte ? Combien de tomes prévoyez-vous ?
Sylvain Runberg : Nous avons prévu trois tomes, qui formeront un véritable récit complet, mais qui pourraient aussi être considérés comme un premier cycle, si jamais l’envie nous prenait de continuer sur notre lancée.
Quelles ont été les références pour le scénario ? On dirait un mélange du Trône de Fer avec Rome ! J’ai vu juste ?
Sylvain Runberg : Les références premières sont les différentes mythologies dont je me suis inspiré pour créer cet univers, celle issue de la Scandinavie médiévale étant celle qui est la plus évidente. Sinon, le « Trône de Fer », je ne l’ai jamais lu, mais j’attends avec impatience d’en voir l’adaptation à la télévision par HBO. Mais oui, des séries comme « Rome » ou les « Tudors » ont été des sources d’inspiration au sens où j’aime les récits épiques, réalistes et sans concession par rapport à un contexte donné. Si « Konungar » a aussi sa part d’imaginaire, je veux que ce que vivent les personnages puissent toucher le lecteur. Sigvald, Rildrig et Elfi ont des destinés extraordinaires, au sens où elles sont hors du commun, mais ce sont avant tout des êtres humains, comme vous et moi, et montrer quels sont les différents aspects de leur psychologie est aussi un aspect important de ce récit. Ils ont leurs faiblesses, leurs défauts, leurs doutes, ils souffrent, ils tentent de survivre, et tout peut leur arriver, même le pire.
Pour parler de l’histoire, c’est une famille royale déchirée et les centaures reviennent alors qu’ils avaient été chassés. Vous vouliez vous attaquer aux grandes sagas royales ?
Sylvain Runberg : Ce territoire est en effet à la fois la proie d’invasions, Centaures et Celtes, et d’une guerre civile qui oppose deux frères, Rildrig et Sigvald, ce dernier n’acceptant pas que son frère ait pu succéder à leur père sur le trône du royaume. Cette famille qui se déchire violemment entraine donc tout un pays dans la violence, et face aux ennemis venus de l’extérieur, ils doivent choisir entre deux priorités : leurs propres velléités de pouvoir ou la défense de leur peuple. C’est une saga royale, mais qui s’attache à montrer les conséquences de tels conflits. Quand les puissants s’affrontent, c’est avant tout leurs peuples qui souffrent. Les actes et les décisions de ces personnages à la destiné extraordinaire ont souvent des conséquences abominables, non seulement sur leurs ennemis mais aussi sur ceux qui les soutiennent. C’est un des aspects principaux de cette histoire.
Et puisque tout à l’heure on parlait de séries TV, la première scène de « Konungar » est un hommage direct à une autre série que j’adore. Vu le contexte, ça peut paraître surprenant, mais ceux qui ont vu la nouvelle version de « Battlestar Galactica » comprendront de quoi je parle ;) !
Et pour finir : Si vous deviez convaincre nos bedeonautes de se plonger dans Konungar en une phrase ce serait laquelle ? (vous pouvez parler viking si nécessaire !)
Sylvain Runberg : Une plongée dans le monde viking comme vous ne l’avez jamais vu, à l’heure où s’y joue une terrible épopée familiale : soyez aux avants postes pour en connaître l’issue !
Merci à vous !
Sylvain Runberg : Tack själv !
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