Mortel
Le 4 août 2009
Bilal oublie le fond et sombre dans l’abstrait : élégiaque et froid.


- Réalisateur : Enki Bilal
- Acteurs : Charlotte Rampling, Linda Hardy, Thomas Kretschmann
- Genre : Fantastique, Animation
- Nationalité : Français
- Editeur vidéo : TF1 Vidéo

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– Durée : 1h42mn
Bilal oublie le fond et sombre dans l’abstrait : élégiaque et froid.
L’argument : En 2095, New York est devenue une ville totalitaire où tentent de vivre mutants et humains. Dans ce lieu, se croisent une femme aux cheveux bleus qui sert de cobaye et qui ignore son passé, un dissident et un dieu à tête de faucon.
Notre avis : Avec son nouveau film, Enki Bilal construit un univers visuel saisissant qui semble emprunter à l’esthétique des mangas et à Blade runner, notamment dans la description de New York. Mais ce ne sont que des apparences : Immortel est en fait un puzzle composé de morceaux personnels (adaptation partielle de La trilogie de Nikopol, sa BD culte) et qui ne ressemble qu’à lui-même. D’un point de vue technique, le film s’avère prometteur et le pari diablement excitant : Bilal incruste de la 3D dans des images réelles et mixe de vrais acteurs avec d’autres, de synthèse.
Visuellement intéressant par ses mélanges hybrides, Immortel trouve hélas vite ses limites dans un scénario nébuleux qui recycle une thématique complexe (eugénisme, abus, manipulations en tous genres). Bilal semble gommer les allusions politiques qui figuraient dans la BD d’origine (le régime fasciste, l’opposition entre le dictateur et Nikopol) pour se fourvoyer dans une pseudo-romance inutilement alambiquée. Linda Hardy est suffisamment mauvaise actrice pour donner à son héroïne toute la désincarnation possible. C’est un choix adéquat puisqu’elle est ainsi synchrone avec un univers déshumanisé et glacial, morne et déprimant.
Et c’est ainsi qu’on retombe dans les travers de Bunker palace hôtel et Tykho moon, ses deux précédentes tentatives. A l’époque, faute de moyens suffisants, Bilal ne pouvait pas tout se permettre. Cette fois-ci, c’est le contraire : à force de soigner la forme quitte à tomber dans le maniérisme le plus apprêté, Bilal oublie le fond et sombre dans l’abstrait. Le film, élégiaque et froid, a certes le mérite de l’originalité mais n’en demeure pas moins frustrant.